Intervention de Frédéric Cuvillier

Séance en hémicycle du 29 janvier 2014 à 21h30
Privatisation de la société nationale maritime corse méditerranée

Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Et pour la Corse, oui. Mais j’essayais d’équilibrer les choses en citant tous les intéressés !

Il ne faut pas cacher ou sous-estimer les difficultés. Elles sont nombreuses. La principale est liée aux contentieux européens : le premier concerne les conditions de la privatisation de 2005, avec un risque de remboursement de la SNCM à l’État de l’ordre de 220 millions d’euros ; le second, qui vient de s’achever – Arnaud Leroy en a parlé –, est relatif à la DSP, pour laquelle le service complémentaire, correspondant aux pics de fréquentation de l’été, est considéré comme illicite et pourrait conduire au remboursement de 220 millions d’euros à la collectivité territoriale de Corse.

Comme je m’y étais engagé devant tous, et particulièrement devant les salariés, le Gouvernement a mis en oeuvretous les recours possibles pour défendre les intérêts de la SNCM, en référé et au fond. Nous nous battons sans retenue et sans ambiguïté.

Pour autant, le temps judiciaire européen n’est pas celui de l’entreprise. C’est un temps long qui handicape réellement le redressement de l’entreprise. Nous ne pouvons pas attendre l’issue des recours, en première instance, en appel et en cassation, pour avancer. Nous ne pouvons pas attendre plusieurs mois, voire plusieurs années, pour mettre en oeuvre un plan de redressement de l’entreprise afin d’assurer dans des conditions correctes l’exécution de la nouvelle DSP – la convention qui a été signée a commencé de s’appliquer au 1er janvier de cette année et prendra fin en 2023.

Au passage, qui peut comprendre que la SNCM soit finalement condamnée à rembourser, en tout, 440 millions d’euros, huit ans après les faits ? Quelle entreprise au monde pourrait-elle supporter de tels risques, une telle instabilité financière ? Cette situation est tout bonnement incompréhensible. Il faut que nous puissions appeler à la responsabilité, car la vie économique de l’entreprise ne peut rester en suspens, sous la menace d’une épée de Damoclès.

Nous n’attendons donc pas l’issue des contentieux pour agir. C’est pour cette raison que le Gouvernement apportera son soutien en 2014 pour faciliter la mise en oeuvre d’un plan de redressement.

Outre les actions juridiques pour défendre les intérêts de la SNCM et de l’État, le Gouvernement a décidé – cela a été annoncé par le Premier ministre à la fin de l’année dernière – de financer la trésorerie de la SNCM pour 2014, avec un apport complémentaire de 30 millions d’euros. C’est tout simplement le rôle de l’État actionnaire, qui fait ainsi ce qu’a fait l’actionnaire principal Transdev, ces derniers mois, avec un apport de 117 millions de trésorerie.

Nous avons également demandé à la Caisse des dépôts et à la Banque publique d’investissement de proposer une solution de financement des navires sous deux mois – nous sommes dans ce délai – permettant ensuite de passer la commande de deux navires, au plus tard le 30 juin 2014. Le renouvellement de la flotte de la SNCM est une condition essentielle au rééquilibrage des comptes de la société. Il convient désormais de trouver le montage juridique et financier de nature à permettre ce renouvellement. Aujourd’hui même, le président de la Banque publique d’investissement m’a confirmé que les choses avançaient – favorablement, crois-je pouvoir préciser. Nous devons cependant réfléchir afin de déterminer quel montage financier permettra d’associer le plus grand nombre d’acteurs. Un grand nombre de collectivités se sont déclarées disposées à s’engager : nul doute que nous aurons l’occasion de les associer à ce qui est à la fois un grand défi et une responsabilité importante.

Parallèlement, j’ai réuni, la semaine dernière, les principales collectivités territoriales concernées afin que nous puissions activer les principaux leviers permettant de sortir l’entreprise de l’ornière. Un certain nombre de pistes ont été évoquées, qui nécessitent d’être approfondies, notamment en ce qui concerne le financement des navires et les possibilités de reprise des personnels de la SNCM – je rappelle que le pacte social est concomitamment engagé et je salue l’esprit de responsabilité qui a amené l’ensemble des représentants des salariés à accepter un plan qu’il faut, certes, adapter aux conditions nouvelles, mais qui va permettre de définir des directions qui constitueront autant de pistes de travail.

Sur la question de l’actionnariat, il me semble très difficile d’envisager des évolutions à court terme, ne serait-ce qu’en raison des incertitudes engendrées par les contentieux européens. Les bonnes volontés ne manquent pas : ainsi, on a entendu plusieurs industriels maritimes faire part de leur volonté de s’impliquer. Toutefois, ces déclarations sont systématiquement assorties d’une condition : « sous réserve que les contentieux européens soient purgés ». Or, s’il ne manquera pas de candidats pour intégrer l’actionnariat, les contentieux sont bien réels ! Il est bien difficile de pouvoir envisager, dans ces conditions, l’évolution de l’actionnariat – même si, je le dis de façon tout à fait officielle, l’actionnariat doit permettre de donner une impulsion nouvelle à la société, dans une configuration qu’il conviendra de déterminer. C’est pourquoi, si nous devons nous concentrer sur ce qui est immédiatement utile à la société, nous ne devons pas perdre de vue cette question sensible de l’actionnariat.

Enfin, j’insiste sur la priorité des priorités : le redressement de l’entreprise. Il faut absolument que le directoire de la SNCM mette tout en oeuvre pour instaurer un plan de modernisation et d’économies de l’entreprise.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion