Intervention de Dominique Tian

Séance en hémicycle du 29 janvier 2014 à 21h30
Privatisation de la société nationale maritime corse méditerranée

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Tian :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat de ce soir devait porter initialement, me semble-t-il, sur le rapport de la commission d’enquête sur les conditions de la privatisation de la Société nationale maritime Corse Méditerranée.

Nous n’avons consacré que quelques minutes à ce sujet important. Comme l’ont indiqué le président et le rapporteur de la commission, avec une rigueur intellectuelle que nous leur reconnaissons, il n’y a pas grand-chose à reprocher au gouvernement de l’époque. Certains pensent que de mauvaises décisions ont été prises – d’autres pensent que non –, mais comme l’a dit M. le ministre, aucune irrégularité n’a été commise.

M. Paul Giacobbi a quant à lui rappelé la pression considérable qui régnait en 2005, notamment à Marseille et en Corse. L’ensemble des personnes auditionnées partagent cette analyse. Les élus locaux étaient soumis à une pression très importante, tout comme les services de l’État. Le préfet de région nous a raconté l’inquiétude qui était la sienne, le ministre des transports, les membres de son cabinet, le Premier ministre de l’époque ont évoqué la situation quasi insurrectionnelle qui régnait à Marseille : le port était bloqué et l’ensemble des syndicats en proie à une poussée de grande violence.

Cela a conduit beaucoup à penser que la privatisation totale ou partielle de cette société nationale était peut-être la bonne solution. Vous l’avez reconnu tout à l’heure, monsieur Giacobbi : qu’auriez-vous fait si vous aviez été en charge de ce dossier à l’époque ? Peut-être auriez-vous penché également en faveur d’une solution de privatisation ou de semi-privatisation.

La pression, le climat terrible et l’urgence de trouver une issue ont conduit deux gouvernements successifs, en 2005, à penser que la solution était la privatisation partielle ou totale, optant finalement pour la privatisation partielle.

Aujourd’hui, c’est tout simplement la question de la survie de la société qui se pose. C’est pourquoi la constitution de cette commission d’enquête nous a gênés, à l’UMP. Nous pensions que la majorité, en remontant à 2005, chercherait, et trouverait aisément, un bouc émissaire, un péché originel qui explique cette situation assez catastrophique. Nous le craignions, et nous ne nous sommes pas beaucoup trompés. Mais, au cours de son travail, la commission s’est trouvée empêchée de pousser davantage cette logique consistant à prouver que la situation de quasi-liquidation dans laquelle se trouve la SNCM – mais vous nous avez rassurés sur ce point, monsieur le ministre, ce ne sera pas le cas – était tout simplement due au choix de la privatisation. La réflexion tournait en rond et la commission a finalement conclu, ainsi que l’ont reconnu MM. Leroy et Giacobbi, que la situation de 2013 était bien distincte de celle de 2005.

Bien sûr, les uns et les autres reconnaissent que la privatisation n’a probablement pas été la bonne solution. Veolia n’a pas été un bon gestionnaire, un grand gestionnaire, un vrai gestionnaire. Nous mêmes qui sommes libéraux ne pouvons que regretter l’attitude désinvolte, peu professionnelle et peu courageuse de Veolia, qui même n’a pas été capable, par exemple, de mettre en place un plan de suppressions d’emplois. Fruit d’un accord avec les syndicats, ce plan, qui concernait 400 emplois, aurait permis de déboucher sur une situation plus acceptable. Aucune des mesures nécessaires pour sauver la société n’a été prise par cet actionnaire privé. Nous le regrettons et nous dénonçons l’attitude de Veolia.

L’État a-t-il joué son rôle pour autant ? Sûrement pas. Avait-il seulement un grand rôle à jouer, compte tenu du montant peu significatif de ses participations ? Sans doute n’a-t-il pas joué son rôle comme il le fallait.

Cela fait deux ans que nous appelons le Gouvernement à la vigilance. J’ai moi-même posé une question d’actualité, car nous ne savions pas il y a quelques semaines si nous passerions le cap des fêtes de Noël. Vous avez tenu une réunion, monsieur le ministre, et apporté 30 millions d’euros de trésorerie pour assurer les quelques jours qui viennent, ou plus exactement, serait-on tenté de dire, pour tenir jusqu’aux élections municipales… Je ne veux pas polémiquer, mais 30 millions, ce n’est pas grand-chose par rapport aux fonds qui seront nécessaires. Je dois néanmoins reconnaître que vous avez réuni récemment au ministère l’ensemble des collectivités locales pour chercher des solutions.

Cela ne se fait pas de le dire, mais je trouve, avec Camille de Rocca Serra, gênant que Paul Giacobbi s’exprime à cette tribune à double titre : en tant que rapporteur de la commission d’enquête et en tant que président du conseil exécutif de Corse. Cette collectivité passe des contrats avec Corsica Ferries, à qui il est accordé 14 millions d’euros par an.

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