Intervention de Colette Langlade

Réunion du 28 janvier 2014 à 17h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaColette Langlade, rapporteure pour avis :

Avant de présenter les dispositions contenues dans les articles 8, 12 et 13 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, je ferai deux remarques.

La première est que notre commission est fondée à se saisir d'un texte qui vise à développer l'alternance et à améliorer l'offre d'orientation, car ces politiques s'articulent étroitement avec la refondation de l'école. D'un côté, la rénovation de notre système éducatif vise à assurer l'égalité des chances ; de l'autre, la relance de l'apprentissage est un moyen sûr de favoriser l'insertion professionnelle de celles et ceux qui passent par cette voie de formation. Dans les deux cas, il s'agit de promouvoir, en faveur de la jeunesse, des politiques d'avenir corrélées et efficaces. L'orientation tout au long de la vie, quant à elle, se situe au croisement de ces ambitions.

La deuxième remarque concerne la situation des lycées professionnels, abordée à de nombreuses reprises au cours de mes auditions, en lien avec la question de l'orientation et de la prise en charge des élèves « décrocheurs ». Rappelons que l'annexe de la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l'école comprend plusieurs engagements à l'égard de ces lycées, parmi lesquels la création de 4 000 postes dans les collèges les plus difficiles et les lycées professionnels, afin de favoriser l'adoption d'organisations pédagogiques adaptées à des publics hétérogènes et, ainsi, de lutter contre le décrochage – plus de 40 % des décrocheurs étant issus des lycées professionnels – ; et l'organisation de campus des métiers et des qualifications, regroupant sur un même lieu toutes les voies de formation, ainsi que des entreprises et des universités.

Ces mesures fortes devraient nous inciter à ériger en priorité nationale – au même titre que l'apprentissage – la valorisation de l'enseignement professionnel, aujourd'hui très fragilisé.

J'en viens aux trois articles dont nous sommes saisis. Nous avons effectivement des choses à dire sur les passerelles entre les CFA et les filières d'enseignement, sur la mise en route effective du service public de l'orientation tout au long de la vie, sur la lutte contre le décrochage et sur le cadre de concertation de l'organisation des formations professionnelles, y compris initiales.

Je me réjouis que l'article 8 assigne aux CFA de véritables missions pédagogiques, qui les apparenteront à des formations professionnelles sous statut scolaire. Ces missions se fondent sur quatre principes ou objectifs : la cohérence entre la formation générale, la formation pratique et la formation en entreprise ; la poursuite d'études, qui nécessite l'instauration de passerelles ; l'assistance aux candidats à l'apprentissage et l'accompagnement des apprentis. La mise en oeuvre de ces nouvelles obligations impliquera de valoriser davantage les formateurs et les maîtres d'apprentissage.

La question de l'orientation est traitée par l'article 12. La loi du 24 novembre 2009 relative à la formation professionnelle a institué un service public d'orientation tout au long de la vie, appelé communément SPO, dont la mise en place a été jugée décevante par une mission constituée par trois inspections générales. En effet, la question essentielle, voire stratégique, de l'orientation ne saurait se limiter à la désignation d'un délégué interministériel, au lancement d'un site Internet et à la labellisation d'organismes.

Il est vrai que l'on compte près de 8 000 structures et plus de 35 000 professionnels répertoriés ou services locaux en charge de l'accueil, de l'information, du conseil ou de l'accompagnement en orientation, relevant d'une vingtaine de réseaux aux statuts très variés. Nous sommes donc confrontés à un problème d'organisation des ressources.

C'est la raison pour laquelle l'article 12 vise à préciser les rôles respectifs de l'État et de la région en matière d'orientation. En effet, si tous deux assurent le service public de l'orientation tout au long de la vie, leurs responsabilités respectives en la matière doivent être clairement établies.

D'un côté, l'État a pour mission de définir au niveau national la politique d'orientation des élèves et des étudiants dans les établissements scolaires et les établissements d'enseignement supérieur, et de délivrer à cet effet l'information nécessaire aux publics concernés. De l'autre, la région doit coordonner sur son territoire l'action des autres organismes – ceux qui ne relèvent pas de l'éducation nationale.

Toutefois, le projet de loi a prévu que la région puisse mettre en réseau l'ensemble des acteurs, y compris les centres d'information et d'orientation (CIO). C'est actuellement le cas dans huit régions volontaires – Aquitaine, Auvergne, Bretagne, Centre, Limousin, Pays-de-Loire, Poitou-Charentes et Rhône-Alpes – qui, à titre expérimental, préfigurent le service public régional de l'orientation prévu par le projet de loi.

Afin de rendre opérationnel ce partage des compétences, l'article 12 propose qu'une convention annuelle détermine les conditions dans lesquelles l'État et la région coordonneront l'exercice de leurs compétences respectives en région – ce qui est bien la preuve qu'aucun transfert de moyens n'est prévu entre les deux niveaux de décision.

Enfin, en ce qui concerne le suivi des décrocheurs, l'article 12 confie de nouvelles compétences à la région : en particulier, elle coordonnera au niveau local, en lien avec les autorités académiques, les actions de prise en charge de ces jeunes et elle aura autorité sur le service public régional de l'orientation ainsi que sur les organismes participants lorsqu'ils organiseront la réinscription du décrocheur dans un parcours de formation ou son accompagnement. La région semble en effet l'acteur le mieux placé pour identifier les voies alternatives les plus adaptées aux jeunes qui rejettent l'environnement scolaire, mais non les savoirs.

Enfin, l'article 13 tend à enrichir le contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles et à améliorer sa procédure d'adoption en invitant les partenaires sociaux à le signer. Les dispositions concernées sont plutôt techniques, mais j'insiste sur le fait qu'elles ne modifient en rien l'équilibre atteint par la loi Peillon en ce qui concerne les ouvertures et fermetures de sections professionnelles dans les lycées. En effet, dans la mesure où, depuis le vote de la loi du 8 juillet 2013, la région ne peut arrêter la carte des formations qu'après l'accord du recteur, les deux collectivités publiques sont condamnées à s'entendre.

Au total, voici trois articles positifs pour nos jeunes et nos territoires, trois articles qui favoriseront l'égale dignité des parcours de formation initiale. Je propose donc de donner un avis favorable à leur adoption, sachant que je présenterai plusieurs amendements de précision et de clarification.

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