Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Réunion du 28 janvier 2014 à 17h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • CFA
  • apprenti
  • apprentissage

La réunion

Source

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION

Mardi 28 janvier 2014

La séance est ouverte à dix-sept heures quarante.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la commission)

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avant d'aborder l'ordre du jour de cette réunion, nous devons procéder à la désignation d'un rapporteur.

Depuis plusieurs années, nous étions nombreux, dans la majorité comme dans l'opposition, à demander l'harmonisation des taux de TVA applicables à la presse imprimée et à la presse en ligne, au nom des principes d'égalité devant l'impôt et de neutralité des supports. Le Premier ministre a finalement décidé d'appliquer, à partir du 1er février, le taux « super-réduit » de 2,1 % à la presse en ligne, ce dont nous pouvons tous nous réjouir. Le code général des impôts doit maintenant être modifié avant que ne soit calculé le montant de la taxe exigible sur les opérations effectuées le mois prochain, donc avant le 1er mars. C'est pourquoi j'ai accepté de cosigner, avec M. Bruno Le Roux et M. Michel Françaix, la proposition de loi n° 1730 tendant à harmoniser les taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicables à la presse imprimée et à la presse en ligne, sur laquelle je vous propose de rapporter dès demain.

Le texte, sur lequel le Gouvernement a engagé la procédure accélérée, sera inscrit en séance mardi 4 février et examiné par le Sénat avant la fin du mois. Vous pourriez légitimement exprimer un certain mécontentement devant une telle précipitation, mais il est souhaitable que cette mesure, approuvée sur tous les bancs de l'Assemblée nationale, entre en vigueur le plus tôt possible.

M. Patrick Bloche est nommé rapporteur de la proposition de loi.

La commission examine ensuite pour avis, sur le rapport de Mme Colette Langlade, les articles 8, 12 et 13 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale (n° 1721).

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Le calendrier d'examen de ce projet de loi est également très serré, puisqu'il a été présenté le 22 janvier en conseil des ministres et viendra à l'ordre du jour de la séance publique dès le 5 février. La commission des affaires sociales, saisie au fond, devant l'examiner à partir de demain, nous n'avions d'autre choix que de donner notre avis aujourd'hui, ce qui nous conduit malheureusement à nous réunir au moment même où, en salle Lamartine, se tient un débat sur un sujet qui nous intéresse directement, l'évaluation des politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes.

Malgré ces délais contraints, notre commission a donc souhaité examiner pour avis les dispositions du texte relevant de sa compétence afin de s'assurer de leur cohérence avec celles qui ont été adoptées dans la loi de refondation de l'école de la République : il s'agit des articles relatifs aux centres de formation des apprentis (CFA), au service public de l'orientation tout au long de la vie et aux contrats de plan régionaux de développement des formations et de l'orientation professionnelles.

L'ensemble de ces mesures ne pourra que contribuer à consacrer l'égale dignité des voies de formation, scolaire ou en alternance, et à offrir une seconde chance à chaque jeune sorti sans qualification du système de formation. Nous retrouvons donc des préoccupations qui ont su nous rassembler lors d'autres débats, notamment à propos de la refondation de l'école.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Avant de présenter les dispositions contenues dans les articles 8, 12 et 13 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, je ferai deux remarques.

La première est que notre commission est fondée à se saisir d'un texte qui vise à développer l'alternance et à améliorer l'offre d'orientation, car ces politiques s'articulent étroitement avec la refondation de l'école. D'un côté, la rénovation de notre système éducatif vise à assurer l'égalité des chances ; de l'autre, la relance de l'apprentissage est un moyen sûr de favoriser l'insertion professionnelle de celles et ceux qui passent par cette voie de formation. Dans les deux cas, il s'agit de promouvoir, en faveur de la jeunesse, des politiques d'avenir corrélées et efficaces. L'orientation tout au long de la vie, quant à elle, se situe au croisement de ces ambitions.

La deuxième remarque concerne la situation des lycées professionnels, abordée à de nombreuses reprises au cours de mes auditions, en lien avec la question de l'orientation et de la prise en charge des élèves « décrocheurs ». Rappelons que l'annexe de la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l'école comprend plusieurs engagements à l'égard de ces lycées, parmi lesquels la création de 4 000 postes dans les collèges les plus difficiles et les lycées professionnels, afin de favoriser l'adoption d'organisations pédagogiques adaptées à des publics hétérogènes et, ainsi, de lutter contre le décrochage – plus de 40 % des décrocheurs étant issus des lycées professionnels – ; et l'organisation de campus des métiers et des qualifications, regroupant sur un même lieu toutes les voies de formation, ainsi que des entreprises et des universités.

Ces mesures fortes devraient nous inciter à ériger en priorité nationale – au même titre que l'apprentissage – la valorisation de l'enseignement professionnel, aujourd'hui très fragilisé.

J'en viens aux trois articles dont nous sommes saisis. Nous avons effectivement des choses à dire sur les passerelles entre les CFA et les filières d'enseignement, sur la mise en route effective du service public de l'orientation tout au long de la vie, sur la lutte contre le décrochage et sur le cadre de concertation de l'organisation des formations professionnelles, y compris initiales.

Je me réjouis que l'article 8 assigne aux CFA de véritables missions pédagogiques, qui les apparenteront à des formations professionnelles sous statut scolaire. Ces missions se fondent sur quatre principes ou objectifs : la cohérence entre la formation générale, la formation pratique et la formation en entreprise ; la poursuite d'études, qui nécessite l'instauration de passerelles ; l'assistance aux candidats à l'apprentissage et l'accompagnement des apprentis. La mise en oeuvre de ces nouvelles obligations impliquera de valoriser davantage les formateurs et les maîtres d'apprentissage.

La question de l'orientation est traitée par l'article 12. La loi du 24 novembre 2009 relative à la formation professionnelle a institué un service public d'orientation tout au long de la vie, appelé communément SPO, dont la mise en place a été jugée décevante par une mission constituée par trois inspections générales. En effet, la question essentielle, voire stratégique, de l'orientation ne saurait se limiter à la désignation d'un délégué interministériel, au lancement d'un site Internet et à la labellisation d'organismes.

Il est vrai que l'on compte près de 8 000 structures et plus de 35 000 professionnels répertoriés ou services locaux en charge de l'accueil, de l'information, du conseil ou de l'accompagnement en orientation, relevant d'une vingtaine de réseaux aux statuts très variés. Nous sommes donc confrontés à un problème d'organisation des ressources.

C'est la raison pour laquelle l'article 12 vise à préciser les rôles respectifs de l'État et de la région en matière d'orientation. En effet, si tous deux assurent le service public de l'orientation tout au long de la vie, leurs responsabilités respectives en la matière doivent être clairement établies.

D'un côté, l'État a pour mission de définir au niveau national la politique d'orientation des élèves et des étudiants dans les établissements scolaires et les établissements d'enseignement supérieur, et de délivrer à cet effet l'information nécessaire aux publics concernés. De l'autre, la région doit coordonner sur son territoire l'action des autres organismes – ceux qui ne relèvent pas de l'éducation nationale.

Toutefois, le projet de loi a prévu que la région puisse mettre en réseau l'ensemble des acteurs, y compris les centres d'information et d'orientation (CIO). C'est actuellement le cas dans huit régions volontaires – Aquitaine, Auvergne, Bretagne, Centre, Limousin, Pays-de-Loire, Poitou-Charentes et Rhône-Alpes – qui, à titre expérimental, préfigurent le service public régional de l'orientation prévu par le projet de loi.

Afin de rendre opérationnel ce partage des compétences, l'article 12 propose qu'une convention annuelle détermine les conditions dans lesquelles l'État et la région coordonneront l'exercice de leurs compétences respectives en région – ce qui est bien la preuve qu'aucun transfert de moyens n'est prévu entre les deux niveaux de décision.

Enfin, en ce qui concerne le suivi des décrocheurs, l'article 12 confie de nouvelles compétences à la région : en particulier, elle coordonnera au niveau local, en lien avec les autorités académiques, les actions de prise en charge de ces jeunes et elle aura autorité sur le service public régional de l'orientation ainsi que sur les organismes participants lorsqu'ils organiseront la réinscription du décrocheur dans un parcours de formation ou son accompagnement. La région semble en effet l'acteur le mieux placé pour identifier les voies alternatives les plus adaptées aux jeunes qui rejettent l'environnement scolaire, mais non les savoirs.

Enfin, l'article 13 tend à enrichir le contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles et à améliorer sa procédure d'adoption en invitant les partenaires sociaux à le signer. Les dispositions concernées sont plutôt techniques, mais j'insiste sur le fait qu'elles ne modifient en rien l'équilibre atteint par la loi Peillon en ce qui concerne les ouvertures et fermetures de sections professionnelles dans les lycées. En effet, dans la mesure où, depuis le vote de la loi du 8 juillet 2013, la région ne peut arrêter la carte des formations qu'après l'accord du recteur, les deux collectivités publiques sont condamnées à s'entendre.

Au total, voici trois articles positifs pour nos jeunes et nos territoires, trois articles qui favoriseront l'égale dignité des parcours de formation initiale. Je propose donc de donner un avis favorable à leur adoption, sachant que je présenterai plusieurs amendements de précision et de clarification.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je remercie notre rapporteure pour avis pour le travail qu'elle a accompli dans un délai très bref – elle a notamment effectué un nombre impressionnant d'auditions –, ainsi que pour la présentation très synthétique de son rapport.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voici donc à la veille de la discussion d'un projet de loi qui est le fruit d'une méthode, celle du dialogue social, et d'un état d'esprit, celui qui avait déjà prévalu lors de l'examen en 1971, dans le cadre de la « Nouvelle société », de la loi de Jacques Delors sur la formation professionnelle, marquée par la volonté de s'adapter aux exigences de son temps. Désormais, ce sont la mondialisation et l'apparition de nouveaux acteurs tels que les collectivités territoriales qu'il faut prendre en compte.

Le projet de loi traite de trois sujets, la formation professionnelle, la démocratie sociale et l'inspection du travail, au bénéfice d'une même finalité : l'emploi.

Aujourd'hui, en France, seulement 11 % des formations suivies sont qualifiantes : c'est un des taux les plus bas d'Europe. De plus, cette formation professionnelle est dispensée de façon très inégalitaire, ceux qui y accèdent étant plutôt des cadres, des salariés des grandes entreprises, des hommes et surtout des actifs.

D'autre part, l'examen de la loi sur la refondation de l'école et celui de la loi sur l'enseignement supérieur et la recherche ont fait apparaître de nouveaux enjeux. Que faire, par exemple, de ces 140 000 « décrocheurs » qui quittent chaque année le système sans formation ? Rappelons qu'en 2013 – d'après le bilan publié le 8 janvier dernier –, plus de 180 000 jeunes ayant décroché ont été contactés par les réseaux « formation-qualification-emploi » – FOQUALE –, et que 20 000 d'entre eux sont de retour en formation initiale diplômante.

Mais les circonstances restent difficiles pour l'apprentissage. À cet égard, les injonctions de la précédente ministre de la formation professionnelle et de l'apprentissage et les suppressions de filières décidées dans l'enseignement professionnel n'ont pas facilité l'action de l'institution éducative ni favorisé, chez les jeunes, l'envie de se former. Dans ce domaine également a été appliquée une politique du chiffre : en imposant l'objectif de 800 000 apprentis en 2015, en ouvrant l'apprentissage dès quatorze ans dans le travail saisonnier et intérimaire, on s'est éloigné du premier principe énoncé dans ce projet de loi : mettre la personne au coeur du dispositif et adopter la concertation pour méthode.

De plus, comme l'a souligné Yves Durand dans un rapport de 2011, les régions ont dû non seulement financer les équipements des lycées techniques et professionnels – qui plus est à perte, en raison des fermetures de classes –, mais aussi reprendre en formation professionnelle les enseignements qui n'étaient plus assurés en formation initiale. Or les régions préfèrent étudier les besoins réels du terrain.

Il s'agit donc, avec ce projet de loi, de rétablir une justice et une ambition.

Cette réforme globale prend en charge tous les champs de la formation. Elle vise à favoriser l'emploi pour toutes les générations, mais surtout pour les plus jeunes qui, partout en Europe, sont frappés deux fois plus que les autres par le chômage. C'est d'ailleurs ce qui avait amené la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso, à vouloir porter, en cinq ans, de 7 à 17 % la proportion d'alternants dans l'enseignement supérieur.

L'article 8 permettra aux CFA de travailler au plus près des besoins des jeunes. Ils sont appelés à travailler en pleine cohérence avec les entreprises, à favoriser la poursuite d'études, à accompagner les postulants dans leur recherche d'une entreprise d'accueil. L'apprentissage ne doit en effet être ni une voie de garage – nous proposerons un amendement précisant que son objectif est bien la progression sociale –, ni une possibilité d'orientation réservée à ceux qui auraient des relations dans le monde de l'entreprise.

Par ailleurs, le passage dans les CFA doit être l'occasion pour les jeunes apprentis de découvrir le volet européen de leur domaine d'études, ce que cherche à faciliter la nouvelle forme de mobilité européenne organisée dans le cadre du programme Erasmus Plus. Nous proposerons également un amendement sur ce sujet.

Le projet de loi crée enfin un service public régional de la formation professionnelle, afin que l'ensemble des compétences dans ce domaine s'exerce dans un cadre rénové. Il s'agit de rendre effectif l'accès de tous à un premier niveau de qualification, de faciliter l'insertion et les transitions professionnelles, d'adapter les qualifications proposées aux caractéristiques du tissu économique de chaque territoire et de mettre en place des programmes dédiés aux personnes en grande difficulté. Il s'agit de donc préparer l'avenir en s'appuyant sur tous les outils permettant d'évoluer dans l'emploi. Tout apprenant doit pouvoir être formé dans sa région, encadré par l'État et prêt pour les mobilités en Europe.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je salue le travail réalisé par la rapporteure, d'autant qu'elle l'a accompli dans des conditions particulièrement difficiles. On peut même juger les parlementaires malmenés, puisqu'il ne s'est passé que deux jours entre le moment où nous avons disposé du texte définitif et la clôture du délai de dépôt des amendements. Cela nous a contraints à travailler plusieurs semaines sur ce qui n'était encore qu'un avant-projet de loi, profondément remanié depuis en Conseil d'État : les dispositions sur les conseils de prud'hommes en ont été retirées, tandis que demeure celle relative à la durée minimale hebdomadaire de vingt-quatre heures, qui ne figurait pourtant pas dans l'accord national interprofessionnel (ANI).

Le Gouvernement se félicite de sa méthode, fondée sur une concertation avec les partenaires sociaux. Mais s'en remettre à la démocratie sociale ne signifie pas mépriser la démocratie parlementaire. C'est pourtant ce à quoi nous assistons.

C'est d'autant plus vrai que, contrairement à ce qu'affirme le Gouvernement, ce projet de loi, comme je l'ai dit, ne se contente pas de retranscrire l'ANI du 14 décembre dernier. C'est aussi un véhicule législatif pour des dispositions sur la représentativité patronale ou sur l'inspection du travail, sujets qui n'étaient pas abordés par l'accord. On peut donc se demander si ce texte respecte l'esprit qui avait prévalu lors de la négociation de l'ANI. Enfin, nous déplorons que le Gouvernement ait décide recourir à la procédure accélérée pour l'examen du projet de loi.

À cela s'ajoutent plusieurs problèmes de fond.

Le premier concerne le compte personnel de formation. Ce compte, dont les droits sont transférables, qui peut être crédité jusqu'à un plafond de 150 heures et faire l'objet d'abondements de la part de l'État ou des régions, est présenté par le Gouvernement comme une véritable révolution. Or il n'en est rien : 150 heures, cela ne représente que 30 heures de plus que dans le cadre du droit individuel à la formation. Or une formation qualifiante nécessite plutôt un crédit de 400, voire 800 heures. Nous en sommes loin.

L'idée d'un compte personnel dont les crédits seraient mobilisables selon les souhaits des salariés est d'ailleurs contredite par la nécessité de bénéficier d'abondements supplémentaires pour accéder aux formations qualifiantes. Tout reste à prouver quant à la facilité de les obtenir. En attendant, en l'absence d'un plafond plus élevé, la liberté du titulaire du compte reste très limitée.

De plus, les listes devant fixer les formations éligibles posent question. Non seulement elles sont multiples – listes des branches, des régions, de l'État, listes destinées aux salariés ou aux demandeurs d'emploi –, ce qui va à l'encontre d'une réelle codécision des acteurs, mais elles représentent une contrainte pour le salarié ou pour le demandeur d'emploi, d'autant qu'elles s'ajoutent aux listes et inventaires existants. Il y a donc un écart entre ce qui est proposé et le prétendu mouvement de simplification administrative.

Le deuxième problème concerne l'apprentissage. Alors que le Président de la République maintient son objectif de porter à 500 000 le nombre d'apprentis en 2017, son gouvernement prend dans ce domaine, depuis plusieurs mois, des décisions contradictoires et floues qui déstabilisent les entreprises. Pour mémoire, le projet de loi de finances a divisé par deux le bénéfice du crédit d'impôt apprentissage et supprimé l'indemnité compensatrice forfaitaire, qu'il a remplacée par un dispositif de compensation s'appliquant au détriment des régions. En outre, le projet de réforme de la taxe d'apprentissage qui figurait dans la loi de finances rectificative de fin d'année a été censuré par le Conseil constitutionnel et son rétablissement n'est pas prévu par ce projet de loi.

Ce texte marque donc le désengagement de l'État, qui transfère la gestion des CFA aux régions sans pour autant en assurer le financement. Une fois de plus, le transfert d'une compétence aux collectivités se fera sans aucune compensation.

Je relève aussi, toujours en ce qui concerne l'apprentissage, une incertitude quant à la capacité qu'auront les entreprises de décider librement des établissements qu'elles souhaitent faire bénéficier des fonds aujourd'hui non affectés.

Enfin, l'articulation entre formation initiale et formation tout au long de la vie n'est pas suffisamment pensée dans ce projet, qui accorde également peu de place à l'enseignement supérieur alors que celui-ci a aussi un rôle à jouer en matière de formation professionnelle.

En définitive, ces dispositions sont très en retrait sur l'ambition affichée dans l'exposé des motifs. Force est de constater encore une fois le décalage entre les discours du Gouvernement et ses actes !

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais tout d'abord vous remercier, madame la rapporteure, pour l'efficacité dont vous avez fait preuve en effectuant un travail de qualité dans un temps très court.

Ce projet de loi comprend des dispositions visant à élargir et à simplifier l'accès à la formation professionnelle. Aujourd'hui en effet, celle-ci bénéficie majoritairement à des salariés disposant d'une formation initiale solide et capables de trouver les financements et d'identifier les interlocuteurs utiles dans le maquis des structures oeuvrant dans ce champ. La commission d'enquête relative aux causes du projet de fermeture de l'usine Goodyear d'Amiens-Nord a ainsi démontré que les salariés les moins qualifiés de cet établissement étaient ceux qui avaient le moins bénéficié de formations, de sorte que certains ont même vu leur qualification régresser, jusqu'à l'illettrisme dans certains cas.

L'échec du droit individuel à la formation – en 2011, 5 % seulement des salariés en ont fait usage – a fait apparaître la nécessité d'un dispositif facilitant l'orientation des salariés souhaitant suivre une formation, via un meilleur accès aux financements et une meilleure connaissance de leurs droits et des formations disponibles : le projet de loi répond en partie à cette exigence. Les écologistes saluent en particulier le renforcement des compétences des régions : c'est en effet l'échelon territorial le plus à même de s'occuper avec cohérence et efficacité tant de la formation et de l'orientation que du développement économique, qui doivent aller de pair. C'est aussi le niveau qui permet une vision stratégique à court, moyen et long termes pour adapter aux défis de l'avenir les apprentissages et les formations professionnelles proposés aujourd'hui. En effet, ceux-ci doivent, non seulement satisfaire les besoins immédiats, mais aussi préparer à l'exercice des métiers de demain. C'est pourquoi nous veillerons à ce que les secteurs décisifs pour la transition écologique, comme les énergies renouvelables ou encore les transports, soient prioritaires.

L'enjeu est aussi d'assurer la lisibilité des politiques menées et de les rendre accessibles au plus grand nombre, via un guichet clairement identifiable où le public puisse trouver l'ensemble des informations et des compétences disponibles en matière d'orientation. Il faut que l'information soit identique quel que soit l'organisme auquel on s'adresse – centre d'information et d'orientation, mission locale ou Pôle emploi. Cela suppose des logiciels compatibles afin d'assurer des transferts d'information encore trop difficilement mis en oeuvre aujourd'hui. Cette question revêt une importance cruciale pour remédier aux difficultés rencontrées par nombre de nos concitoyens pour accéder aux formations.

Si nous soutenons le renforcement du rôle de la région, nous pensons qu'il faut aller plus loin encore et en faire l'interlocuteur unique en ce qui concerne la formation, afin de mettre celle-ci au service des territoires. Les régions devraient ainsi récupérer la totalité de la compétence concernant les demandeurs d'emploi.

Le compte personnel de formation représente une réelle avancée : chacun pourra le conserver, quelle que soit sa situation professionnelle, et n'aura pas besoin du consentement de son employeur pour l'utiliser. Tout en saluant dans ce dispositif un premier pas vers le droit universel à la formation tout au long de la vie, nous avons toutefois des doutes quant à son applicabilité aux fonctionnaires, aux demandeurs d'emploi ou encore aux intermittents du spectacle. Pourriez-vous, madame la rapporteure, nous éclairer aussi sur le cadre dans lequel les bénévoles et les jeunes engagés en service civique pourront bénéficier d'actions de formation, comme le texte le prévoit ?

Les cent cinquante heures prévues par le projet de loi représentent une amélioration incontestable, mais encore insuffisante, la plupart des formations nécessitant entre 400 et 1 200 heures. Il serait peut-être nécessaire que les personnes peu formées comme les salariés en contrat précaire, les demandeurs d'emploi ou les personnes en situation de handicap aient droit à un plus grand nombre d'heures de formation pour que cette réforme bénéficie vraiment à ceux qui en ont le plus besoin, les personnes les moins formées et les chômeurs de longue durée. C'est là un enjeu de justice sociale, au même titre que l'éducation prioritaire.

Les écologistes souhaitent que la validation des acquis de l'expérience soit plus accessible et valorisée et prônent un droit universel à la formation tout au long de la vie, d'une durée minimale de cinq ans pour toutes et tous, utilisable à tout moment de sa carrière professionnelle. Nous en sommes encore loin, mais ce projet de loi constitue une avancée dont nous ne pouvons que nous réjouir.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

De même que la loi de sécurisation de l'emploi était la traduction législative d'un accord national interprofessionnel, le présent projet de loi est issu d'un accord sur la formation professionnelle conclu, le 14 décembre 2013, par les partenaires sociaux. Il faut saluer à cet égard le sens du dialogue social du Gouvernement, qui contraste avec ce que nous connaissions jusqu'ici. Contrairement à Patrick Hetzel, je préfère que ce dialogue soit fécond même si cela complique le travail des parlementaires !

Premier des trois articles sur lesquels nous sommes consultés, l'article 8 renforce et précise les missions confiées aux centres de formation : il vise notamment à consolider le projet de formation, à fournir un appui aux jeunes pour la recherche d'employeurs et il traite de la relation avec les maîtres d'apprentissage. Selon le rapport de Colette Langlade, notre pays compte actuellement 443 000 apprentis et l'objectif du Gouvernement est de porter ce nombre à 500 000 d'ici à 2017 : la nécessité de revaloriser cette voie de formation s'impose donc, d'autant qu'elle n'a rien à envier à la filière générale pour ce qui est du taux de réussite aux examens.

L'article 12 précise la répartition des compétences entre l'État et la région. Surtout, il institue un conseil gratuit en évolution professionnelle, qui sera mis en oeuvre dans le cadre du service public régional de l'orientation. Il faudra simplement veiller à ce que les régions aient les moyens de l'organiser : il ne faudrait pas que les disparités économiques et sociales qui existent entre elles aboutissent à une inégalité dans ce domaine.

L'article 13, enfin, précise les modalités de mise en oeuvre du contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles. Il met en exergue la négociation entre l'État, la région et les autorités académiques. Il me semble toutefois que ces dispositions auraient mieux trouvé leur place dans le futur projet de loi relatif à l'acte II de la décentralisation, qui tend précisément à étendre les compétences des régions.

Reste que ce texte fait avancer la cause d'une formation tout au long de la vie que le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste a toujours défendue.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je salue à mon tour, madame la rapporteure, la qualité de votre travail et vous félicite de votre capacité à faire progresser la réflexion sur la formation professionnelle dans un temps très court !

Ce texte est la traduction concrète de la double priorité affirmée par le Président de la République : tout mettre en oeuvre afin de remporter la bataille pour l'emploi et remettre la jeunesse au coeur de toutes les politiques. Et il faut être reconnaissant au ministre Michel Sapin d'avoir su élaborer un projet de loi pleinement au service de cette grande mission.

Conformément aux mêmes objectifs, la loi de refondation de l'école a déjà posé les jalons pour un système éducatif porteur d'espoir et instrument d'une insertion professionnelle réussie. Ces principes devaient impérativement être également appliqués à la voie professionnelle. Mais, au-delà de la nécessaire adaptation aux attentes des jeunes et aux exigences du marché du travail, c'est le souci de donner un nouvel élan à l'apprentissage que je retiens tout spécialement dans ce texte.

Trop souvent malmené, méconnu, dévalorisé, l'apprentissage souffre de représentations négatives qui empêchent les jeunes de s'y engager avec enthousiasme et fierté. Pourtant, ses bénéfices sont remarquables, autant pour les apprentis que pour les entreprises. Il contribue en effet à sensibiliser progressivement les jeunes aux réalités d'un milieu professionnel et à leur donner confiance dans leur capacité à exercer un métier, cela tout en maintenant un lien fort avec la formation théorique et en conduisant à l'obtention d'un diplôme. L'employeur peut bénéficier de la motivation et de l'implication ainsi obtenues pour former de futurs collaborateurs, voire, à terme, un futur repreneur.

C'est pourquoi il est crucial de dynamiser et de valoriser cette voie de formation et de changer le regard que la société porte sur cette forme de pédagogie pour inspirer aux jeunes un appétit pour cette filière.

Cette ambition pose la question de l'orientation. Or, si l'intention de revaloriser l'apprentissage est incontestable, le texte dit peu de chose des moyens nécessaires à une orientation de qualité. Le rôle du conseiller d'orientation, par exemple, n'est pas évoqué. Nous savons pourtant qu'une bonne orientation du futur apprenti est une des clés de la réussite de sa formation. Ne pourrait-on prévoir une sensibilisation à l'apprentissage et une information dès l'étape de l'orientation, au collège ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais, moi aussi, déplorer l'excessive rapidité avec laquelle les projets de loi se succèdent, ce qui, dans la présente occurrence, nous a interdit de tirer tout le profit possible du travail de notre collègue rapporteure pour avis.

Il me semble peu cohérent de nous proposer d'accroître le rôle des régions dans le domaine de la formation, comme le Gouvernement le fait à travers ce projet de loi, avant de nous soumettre le projet de loi de décentralisation qui sera consacré à ces collectivités. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles elles se montrent quelque peu circonspectes quant à la dévolution de cette nouvelle compétence. En d'autres temps, qui ne sont pas si lointains, tout un chacun aurait crié au désengagement de l'État !

Je m'interroge également sur l'efficacité d'un dispositif qui dépendra à la fois de l'État et des régions. Il conviendra à cet égard d'évaluer sérieusement les expérimentations en cours.

D'autre part, madame la rapporteure, vous entendre affirmer l'égale dignité des diverses voies de formation et reconnaître que certains jeunes qui rejettent l'environnement scolaire ne rejettent pas pour autant les savoirs ne laisse pas de me surprendre : je me demande pourquoi vous avez souhaité abroger la loi Cherpion, qui abaissait à quatorze ans l'âge de l'entrée en apprentissage. Elle répondait très exactement aux préoccupations que vous exprimez !

La possibilité de conclure un contrat d'apprentissage à durée indéterminée est intéressante, notamment pour les employeurs des zones frontalières, qui se désespèrent de voir les jeunes qu'ils ont formés partir travailler dans le pays voisin. Ce dispositif doit permettre de garder le jeune dans l'entreprise qui l'a formé. Cependant, compte tenu de la difficulté de trouver des maîtres d'apprentissage, il ne faudrait pas que ce dispositif se traduise par un alourdissement des contraintes dissuadant un peu plus les entreprises d'embaucher des apprentis.

Plus de simplification, de lisibilité, d'efficacité : c'est ce que nous souhaitons tous. Faut-il rappeler que, alors que la formation mobilise un budget annuel de trente-deux milliards d'euros, 8 % seulement des chômeurs suivent une formation alors même que des centaines de milliers d'emplois ne sont pas pourvus ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie, madame la rapporteure, des éclairages que vous nous avez apportés sur ces articles 8, 12 et 13 du projet de loi, qui s'inscrivent parfaitement dans le prolongement de la loi de refondation de l'école de la République, définissant le socle de la politique de redressement éducatif.

Pour construire une politique ambitieuse de l'apprentissage, il faut certes améliorer l'orientation des jeunes, valoriser la voie de l'apprentissage et développer les formations. Mais on ne parviendra pas à faire de l'alternance une voie d'excellence, à poursuivre la relance de l'apprentissage et à faciliter l'insertion des jeunes dans le monde du travail sans une implication massive des entrepreneurs et des artisans. Existe-t-il des incitations propres à assurer cette mobilisation des acteurs économiques ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'adresse à mon tour mes remerciements à Colette Langlade pour son travail, tout en déplorant le peu de temps qui nous a été accordé pour en prendre connaissance.

Le rôle de chef de file reconnu à la région par ce texte dans le domaine de la formation professionnelle me semble justifié. Cependant, le Gouvernement est-il si peu assuré de la solidité de cette disposition qu'il éprouve le besoin d'y revenir alors qu'une loi récente a déjà consacré ce rôle et que celui-ci sera à nouveau réaffirmé par l'acte II de la décentralisation ? Je crains d'autre part que la répartition des compétences entre l'État et la région définie par l'article 12 ne garantisse pas une réponse efficace, cohérente et lisible aux demandes d'information et d'orientation, dans la mesure où elle risque d'être peu lisible pour les premiers intéressés.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je tiens, comme tous, à féliciter Mme Langlade pour son excellent rapport.

La formation professionnelle est une réponse efficace au chômage des jeunes ainsi qu'au décrochage scolaire, à l'unique condition qu'elle soit complétée par un système d'orientation clair et efficace. Si nous voulons lutter contre le préjugé qui fait des formations professionnelles des voies de garage, il convient de ne pas y envoyer indistinctement tous les élèves en difficulté.

Le volet « orientation » de ce projet de loi est donc une pierre indispensable à la construction d'un parcours professionnel adapté aux besoins individuels. Il redonne tout son sens à la formation professionnelle, dont la vocation est de tirer le meilleur profit des qualités et des savoir-faire de tous, pour assurer l'insertion dans le monde professionnel par un emploi adapté à chacun.

L'article 13 affirme à la fois la compétence de l'État en matière de politique d'orientation des élèves et de délivrance de l'information, tout en impliquant les acteurs locaux sous l'égide de la région, chargée de coordonner l'action d'un service public régional de l'orientation et la prise en charge locale du décrochage. À ce titre, un large volet du second projet de loi de décentralisation portant sur les régions sera consacré à l'orientation.

Aux termes de ce projet de loi, tel que l'a présenté Mme Lebranchu en conseil des ministres, la région disposera de la possibilité, dans le respect des règles de la commande publique, d'habiliter des organismes pour la mise en oeuvre d'actions de formation en faveur des publics en difficulté. Or vous soulignez dans votre rapport que la réaffirmation du rôle des régions dans la valorisation de l'enseignement professionnel doit aller de pair avec un dialogue plus dynamique avec les branches professionnelles. Pourriez-vous nous indiquer quelles mesures permettront d'intensifier ce dialogue ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie, madame la rapporteure pour avis, pour la qualité de votre travail. Certes, ce projet de rapport ne porte que sur trois articles du projet de loi relatif à la formation professionnelle, mais ces trois articles sont en parfaite cohérence avec l'action du Gouvernement et avec la politique qu'il entend mener en faveur de la jeunesse.

Enfin l'apprentissage est placé au coeur du dispositif éducatif et retrouve ses lettres de noblesse ! Se mobilisent en sa faveur tous ceux qui se consacrent à la formation dans l'éducation nationale comme dans le monde de l'entreprise, ainsi que les régions bien sûr. Le but est de tout faire pour remotiver les jeunes et pour les diriger vers les filières où ils trouveront du travail, afin de leur éviter le chômage. Je peux témoigner que cela fait des années que parents, artisans et entreprises nous demandent de développer cette voie de formation.

La région aura un rôle essentiel à jouer. Le soutien des organismes consulaires et des branches professionnelles sera indispensable à la réussite du projet. Il faudra aussi parvenir à concilier les besoins des entreprises et les aspirations des jeunes : la formation professionnelle doit rester un choix pour ceux-ci tout en leur permettant de trouver un débouché professionnel.

Ma question porte sur les moyens qui accompagneront la réforme. Si on veut atteindre l'objectif des cinq cent mille apprentis, supérieur compris, il va falloir renforcer les structures de formation, telles que les CFA qui dispensent souvent un enseignement d'une très grande qualité. Est-il prévu des moyens supplémentaires pour les régions ? Comment faire en sorte que tous les jeunes de tous nos territoires bénéficient de la même qualité d'enseignement ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais d'abord, madame la rapporteure, saluer la qualité du travail que vous avez accompli dans des délais très contraints.

Si le taux d'accès des salariés à la formation était de 40,6 % en 2010, la part des formations qualifiantes restait faible : la proportion n'était que de 11 % des formations suivies, soit l'un des plus bas niveaux d'Europe. Il existe en outre de très fortes disparités, en fonction de la taille de l'entreprise, des catégories socioprofessionnelles, de l'âge, du sexe ou selon qu'on est actif ou chômeur. Ce dernier point est illustré par l'enquête de l'INSEE d'octobre 2013 portant sur la formation des adultes : dans la tranche d'âge des 25-54 ans, 60 % des personnes occupant un emploi au second trimestre 2012 avaient participé à au moins une formation au cours des douze mois précédant l'enquête, contre 40 % seulement des chômeurs.

Face à ce constat, le projet de loi se doit de répondre à l'exigence posée par le ministre d'engager un effort supplémentaire pour ceux qui en ont le plus besoin : chômeurs, salariés vulnérables, salariés des PME et des TPE. Différentes dispositions sont proposées dans cet objectif, telle l'augmentation de 50 % des moyens dédiés par les partenaires sociaux au financement de la formation des demandeurs d'emploi.

Notre commission s'étant saisie des articles 8, 12 et 13 du projet de loi, je souhaiterais vous interroger sur le rôle que doit jouer l'orientation tout au long de la vie dans l'insertion professionnelle. Votre rapport rappelle l'observation des inspections générales selon laquelle « avec 300 à 400 bassins de formation ou zones d'emploi à couvrir, la mauvaise visibilité de l'offre auprès des différents publics relève a priori plus d'un problème d'organisation et d'optimisation des ressources ». Or les articles 12 et 13 précisent les rôles respectifs de l'État et de la région, en confortant le rôle de cette dernière. Cette volonté de clarification, affirmée par le Président de la République dans son discours d'ouverture de la deuxième conférence sociale de l'emploi, ne peut être que saluée.

Les acteurs de la formation que j'ai rencontrés dans ma circonscription se sont plaints de l'existence de doublons entre les appels d'offre de Pôle emploi et ceux de la région et regrettent l'absence de coordination ainsi que de corrélation entre l'offre et les besoins. Par exemple, des cahiers des charges différents sont proposés aux organismes pour une même formation, ce qui complique l'instruction de ces dossiers.

Pouvez-vous nous indiquer comment cette clarification des compétences permettra aux régions et à Pôle emploi de gagner en complémentarité ? Ne serait-il pas préférable de confier à la région une compétence pleine et entière dans le domaine de la formation professionnelle ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais, après mes collègues, saluer le travail de notre rapporteure.

J'avais déjà interrogé le Gouvernement au début de 2013 sur les difficultés rencontrées par les jeunes désireux de se former en alternance pour trouver une entreprise susceptible de les accueillir. Alors que le département de la Guadeloupe connaît un taux de réussite de 86 % dans le cadre du service militaire adapté, j'ai dû dans ma commune ouvrir des postes pour permettre à des jeunes de poursuivre leur formation, du fait de l'impossibilité de trouver un patron qui les accepte en contrat d'apprentissage. Ces difficultés se rencontrent surtout dans le secteur de l'action sociale et sanitaire, étant donné le faible nombre de crèches et de centres communaux d'action sociale dans notre département au regard du nombre de jeunes qui souhaitent suivre cette formation. Je pense que la situation est la même dans les autres collectivités d'outre-mer. Ne faudrait-il pas trouver un dispositif susceptible de permettre à un plus grand nombre de jeunes ultramarins de poursuivre dans cette voie de formation ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous avez raison, madame Doucet : ce projet de loi est un projet de justice et d'avenir pour nos jeunes.

Monsieur Hetzel, le compte personnel de formation figure à l'article 1er, qui est hors du champ de saisine de notre commission. Il reste qu'il est urgent de mobiliser ces trente milliards d'euros pour mieux former les jeunes et les chômeurs. Je relève d'autre part que, si la droite a ouvert la voie à la décentralisation de la formation professionnelle avec la loi du 30 décembre 1993, nous avons, nous, donné corps à ce processus.

M'appuyant sur le rapport de nos collègues Régis Juanico et Jean-Frédéric Poisson, j'indique dans mon rapport que l'objectif de 500 000 apprentis est à notre portée d'ici à 2017, monsieur Braillard.

Madame Tolmont, l'orientation au niveau de collège relève de la loi de refondation de l'école de la République de juillet 2013.

Je tiens à vous rappeler, mesdames Genevard et Nachury, qu'actuellement huit régions expérimentent le service public régional d'orientation, où elles tiennent le rôle de chef de file. Ces expérimentations seront évaluées d'ici à la fin de l'année. Quant à la loi Cherpion, elle a été abrogée par la loi Peillon, qui supprime la possibilité d'entrer en apprentissage dès quatorze ans.

Vous m'avez interrogée, madame Faure, sur l'implication des acteurs économiques. Sachez que le Gouvernement est pleinement mobilisé en faveur de cette voie d'excellence que constitue la formation en alternance assurée par les CFA et par les entreprises.

M. Travert a à juste titre insisté sur le rôle accru que les régions et les acteurs locaux devraient jouer à l'avenir en matière d'orientation, compte tenu du second projet de loi de décentralisation. En réponse à sa question, je lui indique qu'un Conseil national éducation-économie a été institué afin d'animer le dialogue entre les branches professionnelles et l'Éducation nationale.

Madame Dessus, vous m'avez interrogée sur les moyens alloués à l'apprentissage : n'étant pas en mesure de vous répondre pour le moment, je poserai la question au ministre lors de l'examen de ce projet de loi en séance publique, la semaine prochaine.

Pour éviter les doublons dont Jean-Pierre Le Roch déplore l'existence, il conviendrait de rappeler aux différents réseaux présents sur nos territoires qu'ils se doivent d'être complémentaires, et non pas concurrents, afin d'oeuvrer ensemble à l'avenir de nos jeunes.

Enfin, pour répondre à la question posée par M. Ary Chalus sur la Guadeloupe, il me paraît effectivement nécessaire de travailler à la carte des formations de l'État et des régions, là encore avec l'objectif de mieux couvrir les besoins.

La commission en vient à l'examen des articles.

Article 8 : Missions des centres de formation d'apprentis

La commission est saisie de l'amendement AC4 de Mme Sandrine Doucet.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à réaffirmer notre ambition de faire de l'apprentissage une voie de promotion sociale, et non de relégation professionnelle. Il fait ainsi écho au rapport d'information du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques en faveur de la mobilité sociale des jeunes, examiné en ce moment même en séance publique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je suis favorable à cet amendement qui tend à corréler deux objectifs assignés aux centres de formation d'apprentis (CFA) : celui de développer l'aptitude des apprentis à poursuivre des études et celui de favoriser leur mobilité sociale.

La commission adopte l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement AC2 de Mme Sylvie Tolmont.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à soumettre les CFA aux mêmes obligations en matière de formation à la citoyenneté que celles assignées par la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République aux écoles et aux établissements d'enseignement du second degré publics et privés sous contrat. Il y a là, en effet, un enjeu majeur si l'on veut préparer au mieux les apprentis à entrer dans la vie professionnelle et sociale, au même titre que tous les autres jeunes en formation.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement me semble capital puisqu'il vise à faire en sorte que tous les jeunes d'une même classe d'âge, qu'ils soient formés sous statut scolaire ou par la voie de l'apprentissage, disposent des mêmes repères pour mener une vie de citoyens actifs et responsables : faire nation est quelque chose qui s'apprend, que l'on soit élève ou apprenti.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

« Faire nation », « faire famille », « faire sens » : voilà bien des expressions à la mode que je ne comprends guère…

La commission adopte l'amendement.

Elle aborde ensuite l'amendement AC15 de la rapporteure pour avis.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement tend à préciser que la mission d'accompagnement des apprentis confiée aux CFA « pour résoudre les difficultés d'ordre social et matériel susceptibles de mettre en péril le déroulement du contrat d'apprentissage » peut également viser à prévenir ces difficultés. Une expérience de suivi menée en Côte-d'Or, s'appuyant sur des entretiens mensuels d'apprentis ou d'employeurs ainsi que sur des interventions auprès des apprentis en difficulté, a en effet montré qu'on pouvait, grâce à de telles actions de prévention, réduire notablement le risque de résiliation des contrats d'apprentissage.

La commission adopte l'amendement.

Puis elle examine l'amendement AC3 de Mme Sylvie Tolmont.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à rappeler que l'objectif de mixité et d'égalité des sexes s'impose aux centres de formation des apprentis comme à tous les autres organismes ou institutions de ce pays.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Voilà un amendement qui me paraît tout à fait cohérent avec votre mobilisation de ces dernières semaines.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement tend à assigner une nouvelle mission aux CFA, consistant à favoriser la mixité, d'une part, en sensibilisant les formateurs à l'enjeu de l'égalité entre les sexes et, d'autre part, en menant une politique d'orientation qui mette l'accent sur les avantages de la mixité. Une telle proposition fait écho à la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l'école, en vertu de laquelle l'orientation et les formations proposées aux élèves favorisent une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les différentes filières de formation. Les formateurs et les maîtres d'apprentissage des CFA ont à l'évidence un rôle à jouer à la matière. Avis favorable, par conséquent.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'expression de formations « fortement genrées » figurant dans l'exposé sommaire de l'amendement ne me paraît guère plus heureuse que celle que j'ai relevée tout à l'heure.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cette expression figurant non pas dans l'amendement lui-même, mais uniquement dans son exposé sommaire, il ne me paraît pas nécessaire de la rectifier.

La commission adopte l'amendement.

Elle en vient ensuite à l'amendement AC5 de Mme Sandrine Doucet.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Cet amendement vise à confier aux CFA la mission de promouvoir la mobilité internationale des apprentis, notamment grâce aux programmes de l'Union européenne. Cette dernière est en effet actuellement sur le point de mettre en application son programme Erasmus Plus, qui tend à favoriser cette mobilité des apprentis. À ce programme s'ajoutent d'ailleurs le réseau EURES et les financements du Fonds social européen, sans parler de l'action de l'Agence Europe-Éducation-Formation France (AEEFF), chargée de promouvoir ces dispositifs dans notre pays.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si je suis favorable à l'objectif poursuivi, je propose à l'auteur de l'amendement de le sous-amender afin de substituer le verbe « encourager » au verbe « promouvoir », qui semble assigner une obligation de résultat aux CFA alors que tous n'en auront pas forcément les moyens financiers.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si j'ai retenu ce terme, c'était, non pas pour adresser une injonction sans fondement aux CFA, mais parce que je savais que des moyens financiers étaient effectivement alloués à cette politique. Cela étant, j'accepte la modification proposée.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si la mobilité des jeunes en apprentissage dans l'espace européen ne pose aucun problème, on ne saurait en dire autant de celle des jeunes qui, formés en France, souhaiteraient faire leur apprentissage en Suisse, pays avec lequel nous avons pourtant des relations économiques intenses : la législation les en empêche en effet, alors même qu'ils ne parviennent pas à trouver de maître d'apprentissage en France et que la demande en Suisse est considérable dans certains secteurs – à tel point que ces jeunes seraient assurés d'y trouver un emploi à l'issue de leur formation. Ne pourrait-on profiter de ce projet de loi pour résoudre ce problème par amendement ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si je comprends parfaitement votre préoccupation, le présent amendement ne me semble pas un support adéquat pour régler le problème que vous soulevez. Je vous suggère donc plutôt de profiter de la semaine qui nous sépare de l'examen du projet de loi en séance publique pour rédiger un amendement spécifique.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Si j'ai souhaité soulever cette question maintenant, c'est pour y sensibiliser les membres de la commission afin d'éviter qu'un amendement sur le sujet ne soit rejeté ensuite sans examen, en séance publique, au seul motif qu'il aurait été déposé par l'opposition. Ayons une position constructive sur ce point, dans l'intérêt même des jeunes.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il n'est pas dans les habitudes de notre commission de rejeter systématiquement toute proposition émanant de l'opposition : nous sommes mêmes parvenus à adopter une proposition de loi du groupe UMP sur le livre – que l'Assemblée examinera d'ailleurs en deuxième lecture le 20 février.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

M'engageant dans la voie ouverte par Mme Genevard, je souhaiterais que l'on fasse également référence, dans cet amendement à venir, à l'espace caraïbe : il est en effet plus facile pour un Guadeloupéen d'aller suivre une formation dans un pays de la Caraïbe que dans un pays de l'Union européenne.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La mobilité internationale des apprentis visée par mon amendement concerne tous les pays du monde dans la mesure où les programmes de l'Union européenne, notamment le programme Erasmus Plus, permettent de financer des mobilités en dehors des États membres – comme le permettait d'ailleurs auparavant le programme Erasmus Mundus.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Quand bien même il s'avérerait nécessaire de préciser les choses, il ne me paraît pas opportun de le faire à cet endroit du texte, qui a trait aux missions des CFA.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Il est vrai aussi que la question que j'ai soulevée porte moins sur la mobilité que sur le statut des jeunes effectuant leur apprentissage en Suisse.

La commission adopte l'amendement AC5 rectifié.

Puis la commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 8 modifié.

Après l'article 8

La commission en vient à l'amendement AC7 de Mme Sylvie Tolmont portant article additionnel après l'article 8.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Toujours dans un souci de cohérence avec la loi pour la refondation de l'école, cet amendement vise à soumettre les centres de formation d'apprentis aux mêmes obligations d'affichage des symboles républicains que celles en vigueur dans les écoles et dans les établissements d'enseignement du second degré publics et privés sous contrat.

La commission adopte l'amendement.

Article 12 : Service public de l'orientation tout au long de la vie et lutte contre le décrochage

La commission examine en discussion commune les amendements AC16 de la rapporteure pour avis et AC6 de Mme Julie Sommaruga.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L'article 12, qui organise l'architecture générale du service public de l'orientation tout au long de la vie, dispose que l'État définit au niveau national la politique d'orientation scolaire et universitaire et la met en application dans les établissements d'enseignement. L'amendement AC16 précise que, pour ce faire, l'État s'appuie « notamment » sur les centres d'information et d'orientation (CIO) et sur les services universitaires d'information et d'orientation (SUIO). Il s'agit ainsi de donner un nouveau départ à ces centres, en leur permettant de tisser des liens avec les autres instances chargées de l'orientation.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mon amendement vise à faire en sorte que l'apport des CIO et des SUIO continue d'être regardé comme indispensable à une bonne politique de l'orientation.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je demanderai à Mme Sommaruga de bien vouloir retirer son amendement au profit du mien, dans lequel j'emploie à dessein l'adverbe « notamment » afin de ne pas tenir à l'écart du service public de l'orientation le réseau des centres d'information et de documentation « jeunesse » (CIDJ), qui relève du ministère de la jeunesse et des sports.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je soutiendrai l'amendement de la rapporteure pour avis, qui couvre un champ plus large que l'amendement AC6. Il convient en effet de prendre en compte, non seulement les CIO, les CIDJ et les SUIO, mais également les services communs universitaires d'information et d'orientation (SCUIO).

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mon amendement vise à mettre en valeur le rôle d'animation de la politique d'orientation que jouent les CIO, car je suis très attachée à ce que ces derniers puissent continuer à assurer cette mission de service public.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

En énumérant limitativement les organismes concernés, l'amendement proposé par Mme Sommaruga risque de figer une situation que nous souhaitons au contraire faire évoluer afin de permettre aux régions de développer leur propre service public d'information et d'orientation. La rédaction proposée par la rapporteure pour avis me paraît au contraire beaucoup plus ouverte puisqu'elle permet de prendre en compte les structures existantes sans pour autant empêcher toute évolution.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je doute que M. Hetzel soit le meilleur défenseur de l'amendement de la rapporteure pour avis : il nous donne en effet l'impression que les CIO vont disparaître – situation que mon amendement vise précisément à éviter.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

J'ai pour ma part du mal à appréhender le sens de cette controverse dans la mesure où les deux amendements dont nous débattons poursuivent le même objectif…

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ces deux amendements poursuivent effectivement le même objectif : ayant moi aussi entendu l'inquiétude des CIO lors de mes auditions, je suis convaincue qu'ils doivent rester des acteurs majeurs de la politique d'orientation tout au long de la vie. Il reste qu'aux termes de la loi, il convient de parler de « centres publics d'orientation scolaire et professionnelle », et non de « CIO ». C'est pourquoi j'ai rédigé ainsi mon amendement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Dans ce cas, je retire le mien au profit du vôtre.

L'amendement AC6 est retiré.

La commission adopte l'amendement AC16 de la rapporteure pour avis.

Elle émet ensuite un avis favorable à l'adoption de l'article 12 modifié.

Article 13 : Contrats de plan régionaux de développement des formations et de l'orientation professionnelles

La commission adopte l'amendement de coordination AC17 de la rapporteure pour avis.

Puis elle émet un avis favorable à l'adoption de l'article 13 modifié.

La séance est levée à dix-neuf heures dix