Intervention de Sandrine Doucet

Réunion du 28 janvier 2014 à 17h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Doucet :

Nous voici donc à la veille de la discussion d'un projet de loi qui est le fruit d'une méthode, celle du dialogue social, et d'un état d'esprit, celui qui avait déjà prévalu lors de l'examen en 1971, dans le cadre de la « Nouvelle société », de la loi de Jacques Delors sur la formation professionnelle, marquée par la volonté de s'adapter aux exigences de son temps. Désormais, ce sont la mondialisation et l'apparition de nouveaux acteurs tels que les collectivités territoriales qu'il faut prendre en compte.

Le projet de loi traite de trois sujets, la formation professionnelle, la démocratie sociale et l'inspection du travail, au bénéfice d'une même finalité : l'emploi.

Aujourd'hui, en France, seulement 11 % des formations suivies sont qualifiantes : c'est un des taux les plus bas d'Europe. De plus, cette formation professionnelle est dispensée de façon très inégalitaire, ceux qui y accèdent étant plutôt des cadres, des salariés des grandes entreprises, des hommes et surtout des actifs.

D'autre part, l'examen de la loi sur la refondation de l'école et celui de la loi sur l'enseignement supérieur et la recherche ont fait apparaître de nouveaux enjeux. Que faire, par exemple, de ces 140 000 « décrocheurs » qui quittent chaque année le système sans formation ? Rappelons qu'en 2013 – d'après le bilan publié le 8 janvier dernier –, plus de 180 000 jeunes ayant décroché ont été contactés par les réseaux « formation-qualification-emploi » – FOQUALE –, et que 20 000 d'entre eux sont de retour en formation initiale diplômante.

Mais les circonstances restent difficiles pour l'apprentissage. À cet égard, les injonctions de la précédente ministre de la formation professionnelle et de l'apprentissage et les suppressions de filières décidées dans l'enseignement professionnel n'ont pas facilité l'action de l'institution éducative ni favorisé, chez les jeunes, l'envie de se former. Dans ce domaine également a été appliquée une politique du chiffre : en imposant l'objectif de 800 000 apprentis en 2015, en ouvrant l'apprentissage dès quatorze ans dans le travail saisonnier et intérimaire, on s'est éloigné du premier principe énoncé dans ce projet de loi : mettre la personne au coeur du dispositif et adopter la concertation pour méthode.

De plus, comme l'a souligné Yves Durand dans un rapport de 2011, les régions ont dû non seulement financer les équipements des lycées techniques et professionnels – qui plus est à perte, en raison des fermetures de classes –, mais aussi reprendre en formation professionnelle les enseignements qui n'étaient plus assurés en formation initiale. Or les régions préfèrent étudier les besoins réels du terrain.

Il s'agit donc, avec ce projet de loi, de rétablir une justice et une ambition.

Cette réforme globale prend en charge tous les champs de la formation. Elle vise à favoriser l'emploi pour toutes les générations, mais surtout pour les plus jeunes qui, partout en Europe, sont frappés deux fois plus que les autres par le chômage. C'est d'ailleurs ce qui avait amené la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso, à vouloir porter, en cinq ans, de 7 à 17 % la proportion d'alternants dans l'enseignement supérieur.

L'article 8 permettra aux CFA de travailler au plus près des besoins des jeunes. Ils sont appelés à travailler en pleine cohérence avec les entreprises, à favoriser la poursuite d'études, à accompagner les postulants dans leur recherche d'une entreprise d'accueil. L'apprentissage ne doit en effet être ni une voie de garage – nous proposerons un amendement précisant que son objectif est bien la progression sociale –, ni une possibilité d'orientation réservée à ceux qui auraient des relations dans le monde de l'entreprise.

Par ailleurs, le passage dans les CFA doit être l'occasion pour les jeunes apprentis de découvrir le volet européen de leur domaine d'études, ce que cherche à faciliter la nouvelle forme de mobilité européenne organisée dans le cadre du programme Erasmus Plus. Nous proposerons également un amendement sur ce sujet.

Le projet de loi crée enfin un service public régional de la formation professionnelle, afin que l'ensemble des compétences dans ce domaine s'exerce dans un cadre rénové. Il s'agit de rendre effectif l'accès de tous à un premier niveau de qualification, de faciliter l'insertion et les transitions professionnelles, d'adapter les qualifications proposées aux caractéristiques du tissu économique de chaque territoire et de mettre en place des programmes dédiés aux personnes en grande difficulté. Il s'agit de donc préparer l'avenir en s'appuyant sur tous les outils permettant d'évoluer dans l'emploi. Tout apprenant doit pouvoir être formé dans sa région, encadré par l'État et prêt pour les mobilités en Europe.

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