Intervention de Patrick Bloche

Séance en hémicycle du 4 février 2014 à 15h00
Harmonisation des taux de tva applicables à la presse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Bloche, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation :

Vous avez raison de le souligner, cher Patrice Martin-Lalande : ce que l’on aurait donné aux uns, les autres l’auraient perdu !

Vous vous êtes demandé si nous n’aurions pas pu continuer à appliquer un taux de TVA à 20 %, pour rester dans le cadre communautaire, puis que l’État reverse sous forme d’aides à la presse le différentiel de TVA perçu entre 2,1 % et 20 %. C’est un autre choix qui a été fait et que vous approuvez, quitte à prendre effectivement le risque d’un contentieux communautaire que nous avons déjà ouvert, avec Mme la ministre, sur le livre numérique. Nous devons prendre la mesure de ce que nous faisons aujourd’hui puisqu’en fixant un taux super-réduit de TVA de 2,1 % à la presse en ligne dans une logique d’harmonisation et d’égalité fiscale, nous risquons d’ouvrir un contentieux communautaire et de nous retrouver in fine devant la Cour de justice de l’Union européenne avec les conséquences que cela peut entraîner sur les finances publiques si nous devons verser des pénalités. L’unanimité à laquelle nous assistons sur la présente proposition de loi devrait interpeller la Commission européenne, en tout cas la conduire à modifier de manière conséquente la directive communautaire sur la TVA, et vous savez combien le couple franco-allemand pouvait être moteur sur ce sujet.

Thierry Braillard et Rudy Salles ont cité quelques sites en ligne qui ont décidé volontairement, au nom de l’égalité fiscale, d’appliquer le taux de TVA de 2,1 %. L’administration fiscale a réagi en les soumettant à des contrôles puis à des redressements fiscaux. Comme ce problème a été soulevé en commission, j’ai voulu travailler sur ce sujet avant la séance publique d’aujourd’hui, avec cette idée que nous pourrions peut-être collectivement, profitant de cette belle unanimité, remettre les compteurs à zéro. J’ai fait quelques recherches et je veux informer notre Assemblée qu’il n’existe pas de précédent où la loi fiscale aurait été modifiée rétroactivement dans le but d’éteindre des contrôles en cours. Tout indique, par ailleurs, que le Conseil constitutionnel ferait jouer sa jurisprudence traditionnelle sur ce qu’il appelle la recherche d’un intérêt général suffisant pour justifier une telle rétroactivité. En l’espèce, avouons-le, chers collègues, un intérêt général serait difficile à démontrer dès lors que la loi s’appuie jusqu’à présent sur des dispositions communautaires parfaitement explicites, sans aucune ambiguïté. C’est la raison pour laquelle je n’ai pas déposé d’amendement entre l’examen du texte en commission et sa discussion en séance publique. Restons-en là en ayant à l’esprit ce que collectivement nous apportons à la presse en ligne à travers notre discussion et le vote d’aujourd’hui, surtout que nous sommes dans un cadre où l’instruction fiscale fait courir le délai depuis le 1er février et que l’enjeu c’est que le Sénat ait l’opportunité ou la très bonne idée de voter ce texte conforme avant la fin de ce mois afin que le 1er mars, c’est-à-dire au moment où l’on verse la TVA, les choses soient calées.

Les sites de presse en ligne prédéfinis par la loi – il faut que ces sites aient un lien direct avec des contenus éditoriaux et une mission d’information – seront les principaux bénéficiaires du dispositif, ainsi que les titres imprimés qui ont leur développement en ligne et qui jusqu’à présent étaient dans une sorte de contorsion commerciale pour appliquer deux taux de TVA, et ce de façon un peu approximative.

Merci à Virginie Duby-Muller pour son indulgence. Les délais ont été très courts. L’intérêt général que nous portons quelque part collectivement à ce sujet nous a permis d’avoir une procédure parlementaire très accélérée.

Merci aussi à Michel Pouzol dont je rappelle qu’il est rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur la protection du secret des sources des journalistes.

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