Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 29 janvier 2014 à 16h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, présidente :

Nous sommes particulièrement heureux de vous recevoir à nouveau au sein de notre commission des affaires européennes, où vous étiez déjà venue le 4 juin 2013, pour la première audition de la législature. Nous vous remercions de votre disponibilité pour venir devant nous, dans une actualité chargée, et sur un sujet majeur et difficile, la lutte contre le changement climatique, pour lequel je tiens à saluer votre engagement personnel, que nous apprécions tous.

L'audition d'aujourd'hui se situe à un moment clé, quelques jours après la présentation par la Commission européenne des propositions constituant le nouveau paquet énergie climat, en perspective de 2030. La Commission européenne a en effet appelé l'Union européenne à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 %, par rapport à 1990, d'ici 2030, ce qui est a priori une étape positive pour tous ceux qui sont attachés à faire progresser la lutte contre le changement climatique.

Le GIEC souligne que l'humanité va dans le mur si elle continue à ne rien faire. Cet objectif est cependant jugé encore faible par certains scientifiques et des ONG environnementales ; ils jugent indispensable une réduction d'au moins 55 %, par rapport à 1990, des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030, si l'Union européenne veut tenir son engagement d'une baisse de 85 à 90 % pour 2050.

Vous avez, certes, proposé un compromis, par nature imparfait. Mais c'est un pas important. Cependant, l'objectif de 27 % pour la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique de l'Union européenne est très en-dessous du potentiel considérable de ce secteur, estimé à au moins 45 % du mix énergétique à l'horizon 2030.

En outre, on ne peut que regretter l'absence d'objectif contraignant sur l'efficacité énergétique, puisque seul un objectif indicatif de 25 % pour les économies d'énergies est à finaliser à l'automne. Or, la première énergie, c'est celle que l'on n'a pas dépensé. L'habitat en particulier peut faire la différence en matière d'efficacité énergétique. Pouvez-vous nous éclairer sur les obstacles qui entravent l'action européenne en la matière ?

L'objectif de 27 % pour les renouvelables pour 2030, tel qu'il est proposé, représente également une mise en cause de l'architecture existante de la directive renouvelable, qui a des objectifs contraignants au niveau européen et des États membres. En ce domaine, est-il possible de travailler en direction de la création d'emplois, de la sécurité énergétique et de la réduction des coûts d'importation pour les énergies fossiles ?

La Commission laisse par ailleurs aux États la faculté de décider s'ils veulent explorer leurs réserves de gaz de schiste. Compte tenu des risques de cette technologie, n'aurait-il pas été préférable d'être plus incitatif dans ce domaine ?

La réforme à long terme du marché européen du carbone est également nécessaire. La proposition qui est faite de renforcer le marché des quotas d'émissions (ETS), principal instrument de la politique climatique de l'Union européenne, avec la constitution en 2021 d'un mécanisme de réserve permanent représentant 12 % des certificats en circulation à cette période, répond-elle à ces objectifs ?

Certes, l'Union européenne - qui je le rappelle émet environ 11 % des GES dans le monde - sera la première à indiquer ses objectifs de réduction d'émissions après 2020. Mais est-ce suffisant ?

Tous les autres pollueurs - dont les deux plus grands sont la Chine et les États-Unis - doivent le faire d'ici la conférence de Paris en 2015, date à laquelle la communauté internationale s'est donné comme objectif de sceller l'accord le plus ambitieux jamais conclu pour lutter contre le réchauffement.

À cet égard, peut-on espérer obtenir un accord mondial juridiquement contraignant ? Quels sont selon vous les points prioritaires de la négociation en cours ?

Les négociations, en interne, du paquet climat-énergie à l'horizon 2030 s'annoncent elles aussi difficiles. La composition du bouquet énergétique étant une compétence nationale, le Conseil européen des 20 et 21 mars prochain devra se prononcer à l'unanimité : que peut-on dire à ce stade de la façon dont se présentent les négociations au sein du Conseil à ce propos ?

La lutte contre le réchauffement climatique passe à mon sens par une révolution fiscale, qui doit suivre deux axes : l'optimisation de la taxation de l'énergie pour favoriser l'émergence des énergies renouvelables et l'efficacité énergétique, et la fiscalisation du contenu carbone de l'ensemble des pays consommés pour lutter contre le dumping climatique. Une proposition de directive tendant à modifier la directive en vigueur de 2003 est en discussion, depuis trois ans, et n'a toujours pas été adoptée. Certains États membres s'y opposent en effet, ce qui conduit à se demander comment il sera possible d'atteindre l'unanimité.

Enfin, qu'en est-il de la taxation carbone aux frontières de l'Union européenne ? La prochaine Commission européenne reprendra-t-elle ce dossier ?

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