Je vous remercie pour votre accueil. Je pense qu'il est en effet extrêmement important que nous débattions dès à présent des défis de la lutte contre le changement climatique à l'horizon 2030, en s'extrayant le l'accaparement des enjeux du quotidien. Compte-tenu de la longue parenthèse qu'ouvriront les élections européennes de mai prochain, avant la mise en place de la nouvelle Commission en novembre, nous devons sans tarder fixer les grands axes de la position européenne, sauf à prendre le risque considérable d'arriver désunis à la Conférence de Paris de 2015.
Les grandes propositions que nous avons mises sur la table sont connues.
D'abord, il faut parvenir à une réduction de 40 % des gaz à effet de serre qui soit à la fois obligatoire, au niveau de l'Union comme de chaque État membre, et strictement intérieur. Obligatoire, car c'est la seule manière de parvenir à des résultats tangibles, à la hauteur des menaces. Mais je pense qu'il faut aller plus loin encore. Vous le savez, les engagements pris par l'Union dans le cadre des objectifs de l'Europe 2020 laissent une place aux mesures de compensation, c'est-à-dire aux investissements de réduction des GES financés par les acteurs européens en dehors de l'Union. Ces compensions représentent aujourd'hui un quart des 24 % de baisse auxquelles nous sommes parvenus. Or, ma conviction est que nous devons rassembler toutes nos forces pour préparer l'économie européenne à la lutte contre changement climatique, et par conséquent consentir tous nos efforts sur notre territoire, en excluant cette possibilité de compensation.
Ensuite, je crois nécessaire de se fixer comme ambition 27 % d'énergie renouvelables. Toutefois ici, les obstacles juridiques – les traités disposent que les Etats membres demeurent compétent pour définir leur policy-mix énergétique – et politiques – nous nous heurtons ici à de très solides réserves, je pense par exemple à des pays comme la Pologne dans laquelle le charbon garde une place prépondérantes – militent pour une approche plus flexible, où l'objectif serait atteint au niveau de l'Union sans fixer des seuils obligatoires par pays. Trouver les voies pour y parvenir ne sera pas simple, et cela justifie que l'on avance là ici encore sans tarder.
S'agissant enfin du troisième pôle de la lutte contre le changement climatique, l'efficacité énergétique, nous sommes suspendus au résultat de l'évaluation menée d'ici cet été, avec l'intention ensuite d'agir très vite en formulant des propositions très concrètes.
Ces objectifs supposent que l'on parvienne aussi à réformer le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (ETS). Nos propositions vont à cet égard dans deux grandes directions. D'abord, il nous paraît nécessaire de mieux organiser les réserves afin d'éviter d'être contraint à intervenir dans les marchés comme cela est advenu dans le passé. Pour réduire le risque d'effondrement du prix du permis d'émission, nous suggérons ainsi la constitution d'une « réserve de stabilité du marché », qui permettrait d'intégrer au préalable un mécanisme d'ajustement en cas de fortes fluctuations de l'activité économique.
Au total, le paquet énergie climat dessiné par la Commission est audacieux. Je pense que c'est absolument nécessaire.
D'abord, parce que si, par souci d'éviter les déceptions politiques, nous arrivons sans ambition à la Conférence de Paris, alors la perspective d'obtenir un accord à la hauteur des défis sera bien faible.
Ensuite, parce qu'il est indispensable que l'Union soit unie à Paris en 2015. Or, pour y parvenir, nous n'avons pas de temps à perdre en particulier avant le sommet des chefs d'État et de gouvernement organisé par l'ONU en septembre prochain et compte tenu de l'interruption liée aux élections européennes. Le prochain Conseil des ministres de l'Environnement et de l'Énergie sera important, mais la vraie épreuve de vérité, c'est le Conseil européen des 20 et 21 mars.
Enfin, parce que l'Europe se doit d'être exemplaire. Je suis très inquiète que la Chine et l'Inde aient rejoint le bloc de pays apparus cet automne autour de la Bolivie, du Venezuela et de Cuba notamment, qui refusent de se soumettre à tout effort qui ne soit pas financé par les pays développés. Une telle attitude est très dangereuse pour la planète, et doit être combattu par notre capacité à prendre et à respecter des engagements forts.