Intervention de Jean-René Marsac

Séance en hémicycle du 10 février 2014 à 16h00
Politique de développement et solidarité internationale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-René Marsac :

Nous tenons ici pour la première fois un débat de fond sur les objectifs, l’organisation et les modalités de mise en oeuvre de l’aide publique au développement. Le groupe socialiste, républicain et citoyen s’en réjouit et félicite le Gouvernement, et vous en particulier, monsieur le ministre, d’avoir pris cette initiative. C’est un texte fondateur qui sera suivi de phases d’évaluation impliquant non seulement les parlementaires membres des instances de concertation mais aussi notre assemblée tout entière, de manière régulière, tous les deux ans, sur la base d’un rapport gouvernemental. Il s’agit d’un progrès incontestable dans l’effort de transparence et de recherche d’efficacité.

Certes, il s’agit d’un texte plus d’orientation que de programmation, qui ne permet pas pour l’instant de définir un parcours de renforcement des moyens financiers. La situation financière et l’exercice budgétaire annuel rendent de fait l’exercice impossible. C’est la raison pour laquelle notre groupe a souhaité rappeler en commission, par des amendements, que les interventions françaises s’inscrivent toujours dans le cadre du consensus de Monterrey, adopté par les Nations unies en 2002, qui fixe l’objectif global de consacrer 0,7 % du produit national brut à l’aide publique au développement et d’en affecter 0,2 % aux pays les moins avancés.

De notre point de vue, d’autres travaux devront se poursuivre sur ce que vous appelez les financements innovants. Ce travail engagé à l’échelon français et européen est indispensable. Par ailleurs, la réduction des moyens budgétaires publics doit nous amener à rechercher toujours plus l’efficacité et les effets de leviers dans chacune de nos interventions, ce qui justifie l’affirmation de priorités transversales, sectorielles et géographiques.

Bien entendu, les aides d’urgence, les dons aux pays les plus pauvres qui ne peuvent plus emprunter, sont indispensables. À cet égard, nous avons fait part de nos interrogations sur la faiblesse des sommes disponibles pour les dons et sur la réaffectation des produits nets résultant des prêts octroyés par l’AFD. Chacun voit bien que la lutte contre les maladies de l’extrême pauvreté, la sous-nutrition et les épidémies doit rester au premier rang de nos interventions, multilatérales comme bilatérales. Le soutien renforcé aux ONG y concourt.

Mais il s’agit aussi de mieux répondre à la demande croissante des pays les plus pauvres, qui aspirent à sortir des politiques d’aide pour évoluer plus rapidement vers la création d’entreprises et des circuits économiques susceptibles de créer une dynamique locale. Nous pouvons aller plus loin dans le soutien aux initiatives économiques, à la création et au développement d’entreprises. Les collectivités territoriales, les acteurs de l’économie sociale et solidaire, les organismes consulaires entre autres sont mobilisables pour leur expertise, pour leur savoir-faire, pour le renforcement d’outils et d’apports en fonds propres par exemple dans des entreprises naissantes. Aussi ce texte est-il l’occasion de renforcer les passerelles entre politique de développement et économie solidaire, aspiration des pays pauvres à l’autonomie et volonté de parvenir à des échanges économiques justes.

L’éducation de base, la formation tout au long de la vie, la formation professionnelle des femmes comme des hommes doivent permettre l’innovation technique et technologique dans les pays pauvres. La présentation qui nous a été faite, avec vous, monsieur le ministre, de dizaines d’initiatives lors du sommet africain à Paris en décembre dernier illustre parfaitement ces capacités d’innovations multiples et cet esprit d’entreprise.

Nous avons aussi insisté dans nos débats en commission sur le nécessaire renforcement des capacités des États, et tout particulièrement sur l’importance de les aider à bâtir des systèmes fiscaux adaptés à leur situation et à leurs objectifs.

Clarté des objectifs et des priorités, transparence des actions conduites, cohérence des politiques publiques pour réduire les contradictions encore très présentes, évaluation partagée : tels sont les fils conducteurs de ce que nous produisons ensemble pour améliorer l’efficacité de nos interventions.

Nos travaux nous ont également permis de nous engager dans la voie de l’exigence et de la progressivité dans l’effort, en matière de responsabilité sociale et environnementale des acteurs publics et privés. Il s’agit, entre autres choses, de lutter contre l’opacité financière et les flux illicites de capitaux.

Il reste à mes yeux, et cela a été évoqué à plusieurs reprises, à travailler à un continuum plus explicite entre les aides d’urgence apportées à des crises de nature très diverse, puis les phases de reconstruction et de développement et enfin l’amorçage de partenariats économiques s’inscrivant dans des échanges justes et durables. Tout cela exige des coordinations accrues entre l’ensemble des acteurs pour définir des stratégies à moyen et à long terme et, sur les terrains d’intervention, des plateformes de pilotage renforcées, légitimées par tous.

Bien entendu, notre groupe soutient avec conviction ce texte, peut-être amendé ici ou là au fil de nos débats.

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