Les raisons pour lesquelles le groupe écologiste d'un côté, les groupes UMP et UDI de l'autre, souhaitent la suppression de l'article ne sont pas les mêmes.
L'article traite d'abord de l'organisation de l'inspection du travail, ensuite des sanctions.
S'agissant de l'organisation, s'il est un principe sur lequel le Gouvernement ne peut pas revenir, quand bien même il le voudrait, c'est bien celui de l'indépendance des inspecteurs du travail, qui procède de la convention n° 81 de l'OIT. Le Conseil constitutionnel consacre également cette indépendance comme un principe fondamental du droit du travail, tout en précisant que sa mise en oeuvre relève du pouvoir réglementaire. De fait, l'organisation actuelle de l'inspection du travail est fixée dans la partie réglementaire du code du travail.
Dans ce cadre, le Gouvernement a décidé de fusionner le corps des inspecteurs du travail et celui des contrôleurs du travail. Jusqu'à présent, une section classique d'inspection était composée d'un inspecteur, de deux contrôleurs et d'une secrétaire. L'idée du ministère du travail est qu'il serait plus efficace de travailler de façon groupée – sans pour autant remettre en cause la notion de section –, les contrôleurs effectuant les mêmes tâches et exerçant les mêmes prérogatives que les inspecteurs. Il est prévu de placer ces nouvelles « unités de contrôle » sous la responsabilité d'un « RUC » (responsable d'unité de contrôle), ironiquement rebaptisé « DUC » (directeur d'unité de contrôle) par les inspecteurs du travail. Ce responsable n'a pas d'autorité hiérarchique : il a une fonction de coordination et d'animation et peut lui-même exercer des responsabilités directes sur une section.
Un autre projet ne figure pas dans le texte qui nous est soumis : la création, au niveau régional, d'équipes spécialisées dans la lutte contre les filières de travail clandestin.
En revanche, le texte prévoit explicitement la création d'une structure nationale restreinte ayant compétence sur des sujets concernant l'ensemble du territoire et sur des sujets internationaux, comme le détachement des salariés en Europe.
En quoi ces dispositions porteraient-elles atteinte à l'indépendance des inspecteurs du travail ? Ceux-ci restent compétents dans leur section, à cette différence près qu'ils n'exercent plus d'autorité hiérarchique sur deux contrôleurs.
Je défends cette réforme, car une politique de contrôle efficace exige une bonne organisation et un travail en commun, alors qu'actuellement chacun travaille en solitaire. En matière judiciaire, il existe des pôles de compétence – le pôle financier ou celui de la santé, par exemple – dans lesquels les juges sont spécialisés, ce qui ne porte pas atteinte à leur indépendance.
Vous dites que tous les syndicats seraient opposés à cette réforme, mais l'UNSA et la CFDT ont affiché leur soutien à ces mesures. Dans les réunions du comité technique ministériel, beaucoup ont voté blanc ou se sont abstenus, ce qui n'est pas la même chose que de voter contre – ce n'est pas l'UDI, qui a déposé une proposition de loi visant à reconnaître le vote blanc aux élections, qui me contredira !
Un inspecteur du travail dispose actuellement de la faculté de saisir le procureur de la République ; en moyenne, un inspecteur établit trois procès-verbaux par an. Ces procès-verbaux sont transmis au procureur de la République, mais il n'y a pas de poursuite en l'absence d'un grave accident du travail. Ces classements sans suite déconsidèrent les procès-verbaux, alors que nous souhaitons que des suites puissent être données en cas d'infraction afin que les choses changent. De ce point de vue, une sanction administrative constitue un bon instrument. Madame Fraysse, aucune dépénalisation n'est instaurée, puisque la seule évolution consiste en la création d'un outil supplémentaire.
Qui doit sanctionner ? L'inspecteur ou le contrôleur dresse le procès-verbal et le transmet aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), chargées de la sanction. Tous les syndicats des inspecteurs du travail sont favorables aux sanctions administratives et à la transaction pénale. Les représentants des employeurs ont exprimé quant à eux des positions beaucoup plus réservées sur ces mesures.
Celui qui constate l'infraction et celui qui la sanctionne ne doivent pas être les mêmes. Le texte établit cette distinction et organise les droits de la défense.
Les critiques de cette réforme me paraissent donc illégitimes. Pourquoi se trouve-t-elle dans ce projet de loi ? De telles dispositions appartiennent à la catégorie des diverses mesures d'ordre social (DMOS), et il est opportun de les insérer dans ce texte consacré à la formation professionnelle, à la démocratie sociale et donc à l'inspection du travail.