Intervention de Didier Migaud

Séance en hémicycle du 11 février 2014 à 15h00
Dépôt du rapport annuel de la cour des comptes

Didier Migaud, premier président de la cour des comptes :

Au total, compte tenu des nombreuses incertitudes et des risques significatifs que la Cour a relevés, l’atteinte de l’objectif de déficit public en 2014, de 3,6 %, n’est pas assurée à ce stade.

Le troisième message est que, compte tenu du retard pris, l’effort sur la dépense devra être poursuivi et amplifié sur les trois prochaines années pour respecter l’engagement du Gouvernement, approuvé par le Parlement, d’assurer le retour à l’équilibre structurel des comptes publics en 2016.

L’écart par rapport à la trajectoire fixée dans la loi de programmation des finances publiques, votée fin 2012, va croissant. Il devrait être d’au moins un point et demi de PIB pour le déficit effectif en 2014. Tout retard supplémentaire dans la consolidation des comptes se traduirait par une divergence sensible par rapport à nos voisins européens, ainsi que par une nouvelle dette importante, et porterait une atteinte grave à la crédibilité financière de la France.

Le quatrième et dernier message sur les finances publiques est qu’il faut changer de méthode pour obtenir les économies programmées. Plutôt que de ponctionner tous les services, il faut engager les réformes de fond permettant la modernisation des administrations publiques, pour qu’elles puissent atteindre avec une plus grande efficacité les objectifs fixés par les pouvoirs publics.

Le Gouvernement envisage actuellement de réaliser chaque année, jusqu’en 2017, un effort concentré sur les seules économies en dépenses. Cet effort devrait représenter 17 milliards d’euros par an, soit un niveau supérieur à celui de 2014. Sa réalisation est possible, compte tenu des marges existantes. Cela suppose d’engager des réformes de fond dans les différentes administrations publiques.

La Cour et les chambres régionales identifient de nombreuses pistes de réforme, qui touchent une grande diversité de politiques publiques et d’acteurs. Additionnés, ces constats montrent que des réformes structurelles, si elles sont engagées, peuvent permettre des économies importantes.

Chaque acteur public, quel que soit son rôle, son statut, même s’il dispose de budgets limités, doit s’interroger en permanence sur la performance de son action : quels sont ses objectifs ? Les atteint-il et, si oui, est-ce à un coût raisonnable ? Pendant des années, ces questions n’ont pas assez été posées dans nos administrations. Lorsque l’on se donne la peine de les mesurer, les résultats atteints par les politiques publiques ne sont souvent pas à la hauteur des moyens consacrés. II faut rompre, selon nous, avec l’indifférence devant les résultats insuffisants de nombreuses politiques publiques ou leurs coûts excessifs faute de l’organisation la plus optimale. La Cour invite les décideurs publics, dont vous êtes, ainsi que les gestionnaires publics à un changement de culture pour s’intéresser davantage aux résultats obtenus, insuffisamment mesurés, qu’aux moyens déployés, souvent mis en avant comme si l’utilité des dépenses allait toujours de soi.

Les informations riches livrées au Parlement au moment du débat sur la loi de règlement constituent une occasion privilégiée pour que celui-ci exerce sa mission de contrôle du Gouvernement et examine si des marges de manoeuvre peuvent être trouvées. Le Parlement doit pouvoir consacrer davantage de temps à débattre de la loi de règlement pour tirer les conséquences des résultats très inégaux des politiques publiques, et prendre ainsi toute sa place dans l’engagement des réformes de fond qui sont nécessaires.

Pour vous assister dans ce travail, je l’ai dit, la Cour vous livre régulièrement de nombreux rapports, présentant ses propositions sur des sujets de votre choix ou des sujets choisis par la Cour. Je ne peux que souhaiter que le Parlement se saisisse davantage encore de ces travaux et des recommandations qu’ils mettent sur la table, sachant que le dernier mot revient toujours aux représentants du suffrage universel que vous êtes.

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