Intervention de Jacques Krabal

Séance en hémicycle du 12 février 2014 à 15h00
Artisanat commerce et très petites entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, depuis juin 2012, nous avons débattu à plusieurs reprises des problématiques de la revitalisation des centres-villes et quelques propositions de loi ont été déposées. Concurrencés par le commerce en ligne et les grands ensembles commerciaux de périphérie, des milliers de commerçants de centres-villes ou de bourgs ruraux souffrent.

Les mois et les années passant, en dépit des politiques et des initiatives locales intéressantes, les élus semblaient condamner à l’impuissance pour agir efficacement sur les causes structurelles et enrayer le phénomène.

Dans le projet de loi qui est soumis à notre examen aujourd’hui, nous avons des mesures législatives audacieuses qui auront des effets directs sur la racine des difficultés : renouveau du droit des baux commerciaux, extension du droit de préemption des communes et EPCI, mise en place d’un droit de préférence pour le locataire commerçant, simplification et modernisation de l’aménagement commercial, réforme du FISAC recentré sur l’outil commercial, – moi aussi, madame la ministre, je pourrais vous remercier pour les boulangers qui ont reçu ces aides. Chacune de ces dispositions va apporter une réponse à des difficultés qui nuisaient au commerce de centre-ville.

Nous ne relèverons cependant ce défi qu’à la condition de créer une dynamique globale – qui va bien au-delà du commerce – pour les commerces de centre-ville.

À ce propos, je suis convaincu que nous devons aller plus loin dans la dimension urbanistique.

En ce qui concerne l’aménagement du foncier bâti, nous avons le devoir de trouver des solutions pour améliorer les moyens de rénovation. Combien de commerces situés dans des vieux immeubles sont abandonnés parce qu’ils sont mal adaptés, parce qu’ils ne répondent plus aux normes ou qu’ils ne permettent plus aux commerçants d’exercer correctement leur activité ? Les maires doivent pouvoir bénéficier d’outils plus efficaces pour promouvoir les belles façades, les belles rues, pour disposer d’outils éventuellement coercitifs afin de lutter contre les toitures qui s’écroulent ou de faire en sorte, par exemple, que les commerces laissés à l’abandon soient soumis à des obligations plus strictes. Un amendement important a été déposé à ce sujet. Discuté en commission des affaires économiques, il a suscité un débat ouvert entre tous les élus quelles que soient leurs appartenances partisanes.

Un tel aménagement soulève un débat juridique sur le droit de propriété – il est vraiment difficile de contraindre un propriétaire à entretenir un local commercial abandonné. Comme le président de la commission des affaires économiques, je souhaite que nous puissions aboutir à une solution à la fois efficace et juridiquement sûre au cours de nos débats en séance.

Il en va de même pour les situations ou les propriétaires d’immeubles privilégient le logement au détriment du commerce. Bien souvent, à la faveur d’une optimisation fiscale, ils transforment leur immeuble en SCI et ne sont plus du tout incités à promouvoir le commerce en rez-de-chaussée. De nouveau, nous devons réfléchir à des mesures incitatives, et, si besoin, coercitives, pour favoriser le commerce en pied des immeubles. Des dispositifs fiscaux ont déjà fait leurs preuves, par exemple dans le domaine de l’agriculture. Certes, cela relève d’une loi de finances, mais je profite de ce débat pour lancer des idées auxquelles je crois et qui me viennent de mon expérience de maire d’une ville moyenne. N’oublions jamais que le centre-ville, surtout dans les petites villes comme Château-Thierry, c’est le coeur de notre vivre ensemble, c’est à la fois l’agora et la place du village commercial.

Le projet de loi dont nous allons débattre contient aussi des mesures importantes pour l’artisanat, secteur essentiel pour l’emploi et le développement économique de nos territoires ruraux. Pour avoir vu le logo affiché à l’arrière des camionnettes des commerçants, nous connaissons tous le slogan : « l’artisanat, première entreprise de France ».

Si nos artisans et les représentants de la CAPEB, de la FFB nous interpellent sur la frilosité des banques, notre collègue en a parlé tout à l’heure, ou encore la lutte contre le recours aux travailleurs détachés, ils espèrent beaucoup du prochain texte pour atténuer la concurrence déloyale qu’ils subissent. Ils attendent aussi la mise en oeuvre des baisses de charge annoncées dans le cadre du pacte de responsabilité. Dans certains territoires, des entreprises artisanales ont des carnets de commandes bien remplis. Avec ces petits patrons, nous savons que la baisse des charges favorisera la création d’emplois non délocalisables.

Au-delà de ces deux points importants, madame la ministre, je tiens à vous exprimer tout mon soutien. Votre projet de loi intègre toute une série de propositions attendues et adaptées comme par exemple la clarification de la qualité d’artisan. Pour les consommateurs, pour les artisans eux-mêmes, la multiplication des notions – artisan, artisan qualifié, maître-artisan – ne correspondait plus à rien, et vous n’avez cessé de le répéter. S’il existe des artisans qualifiés, ceux qui ne sont qu’artisan ne sont donc pas qualifiés. Vous avez choisi de réserver la qualité d’artisans aux titulaires d’une qualification professionnelle correspondant au métier qu’ils exercent. C’est beaucoup plus lisible ainsi.

Je suis également très satisfait du renforcement des contrôles des qualifications et des assurances obligatoires. Que ce soit pour la protection du consommateur ou pour la crédibilité de tous nos artisans, c’est un progrès significatif attendu depuis longtemps.

Le projet de loi, madame la ministre, exprime la reconnaissance du politique, la reconnaissance que nous devons aux artisans, aux commerçants et aux petites entreprises. Oui, nous devons tout faire pour aider ces entreprises, tout faire pour promouvoir l’esprit d’entreprise, et cela commence par les petites entreprises.

Pardonnez-moi si je reviens à Jean de La Fontaine, mais sa fable Le Petit Poisson et le Pêcheur ne suggère-t-elle pas que ces petites entreprises deviendront grandes elles aussi ? Je sais, en tout cas, que c’est votre volonté.

Permettez-moi donc, pour conclure, madame la ministre, de vous adresser de nouveau mes compliments et ceux du groupe RRDP pour l’ensemble de ce texte. J’espère que nos discussions et l’examen des amendements nous permettront de l’améliorer sur les points qui restent en débat, pour parvenir à un texte fécond et, je le souhaite, consensuel. Pour l’ensemble des 7 millions de salariés et des 3,4 millions d’entreprises qui attendent, comme moi, son application, pour eux, mais aussi pour la France, nous espérons son application rapide.

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