Le groupe de l'Union pour un Mouvement populaire est très favorable aux mesures de ce texte qui vont dans le bon sens. En effet, on ne peut que s'inquiéter de ce détournement du principe de libre circulation posé par le traité de Rome, notamment de la liberté pour les entreprises européennes de détacher des salariés dans un autre pays européen. Pour avoir consacré un rapport à la fraude sociale, je peux témoigner que cette faculté donne malheureusement lieu à des abus extrêmement nombreux. Nous veillerons cependant à ce que ce texte reste équilibré et qu'il ne durcisse pas excessivement la réglementation, au risque de ne pas être euro-compatible.
Par ailleurs, cette proposition de loi laisse certaines questions sans réponse. Ainsi, il ne traite pas de la question de l'affiliation du travailleur détaché à la sécurité sociale du pays d'origine, laissant entier le problème posé par le détachement de travailleurs venant de pays où le coût du travail ne supporte pas les mêmes charges sociales que dans notre pays. Le coût du travail en France étant plus élevé que dans la plupart des pays européens, ce texte ne constitue qu'une réponse partielle à l'absence de législation sociale européenne.
Par ailleurs, la liste noire prévue par l'article 6, si elle est intéressante comme arme de dissuasion, ne risque-t-elle pas de porter un coup mortel aux entreprises qui se trouveraient écartées durablement des marchés publics ?
De quels moyens disposera un donneur d'ordre pour contraindre un sous-traitant indélicat à mettre fin à une situation de travail irrégulier ?
Enfin, ce texte ne donne-t-il pas un pouvoir excessif aux syndicats, dont on connaît les tendances souvent antieuropéennes, en les autorisant à engager des actions judiciaires à la place des salariés lésés ?
Dans l'état actuel du texte, ces réserves conduisent notre groupe à exprimer une position d'abstention. J'espère, mes chers collègues, que vous ne céderez pas à la tentation de durcir excessivement ce texte, avec le risque de le rendre inapplicable.