Intervention de Chaynesse Khirouni

Réunion du 12 février 2014 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChaynesse Khirouni, rapporteure :

La loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche a étendu la gratification à l'ensemble des stagiaires du secteur public. Dans le cadre des auditions que j'ai menées, plusieurs acteurs m'ont fait part de difficultés à cet égard. Le ministère des affaires sociales et de la santé est mobilisé pour trouver des solutions, notamment sur la mise en place de lignes de crédit. Nous pourrons interroger à nouveau la ministre sur ce point lors de l'examen du texte en séance publique. Il n'est pas question pour moi de revenir sur les avancées de la loi du 22 juillet 2013 : nous souhaitons améliorer les conditions d'accueil de tous les stagiaires.

Je souhaite rassurer nos collègues de l'opposition : nous avons veillé à préserver un équilibre. Nous avons posé un cadre qui définit les conditions d'accueil des stagiaires et renforce le rôle des établissements en matière d'appui et d'accompagnement, afin de favoriser les stages de qualité. Mais ces dispositions ne nuiront pas au développement des stages. D'ailleurs, les changements de réglementation antérieurs, notamment l'instauration de la gratification, n'ont pas tari l'offre de stages. Je vous rappelle les chiffres que j'ai cités : en 2012, le nombre de stages en milieu professionnel était évalué à 1,6 million par an, contre 600 000 en 2006. Aujourd'hui, nous proposons une clarification de la législation, car certaines dispositions n'ont pas été mises en oeuvre et d'autres ne sont pas allées assez loin.

Je connais les réalités du terrain, monsieur Hetzel. D'une part, j'ai une expérience professionnelle de direction des ressources humaines, de formation, d'accueil de stagiaires et de management d'équipe ; j'ai une réelle connaissance des problématiques de terrain. D'autre part, j'ai conduit de nombreuses auditions, notamment avec des étudiants, des jeunes, des représentants des établissements d'enseignement et, bien sûr, des représentants des employeurs. Un certain consensus a émergé de ces auditions. Les dispositions de cette proposition de loi en sont inspirées : j'ai pris en compte les interventions des uns et des autres, certains souhaitant évidemment aller plus loin, d'autres étant plus prudents. Encore une fois, nous avons trouvé un équilibre.

S'agissant de la limitation du nombre de stagiaires rapporté à l'effectif global de l'organisme d'accueil, un consensus s'est fait autour d'un seuil de l'ordre de 10 %. Ce chiffre fait sens pour les grandes entreprises. J'ai préconisé de définir des seuils différenciés en fonction de la taille des entreprises, afin de ne pas tarir l'offre et de permettre aux petites entreprises de continuer à recruter des stagiaires. La ministre évoquera cette question la semaine prochaine en séance publique.

Quant aux abus, on évalue aujourd'hui à environ 100 000 le nombre de stages qui devraient être en réalité des emplois pérennes. Or notre première préoccupation, c'est l'emploi des jeunes : le taux de chômage des moins de vingt-cinq ans s'établit à près de 25 %, et l'accès différé à un premier emploi après une succession de stages précarise ce public. Au-delà de nos clivages politiques, nous pouvons nous retrouver sur la nécessité de favoriser les stages de qualité et d'accélérer l'insertion professionnelle des jeunes à l'issue de leur formation. De manière classique, les entreprises font du nombre d'années d'expérience professionnelle un des premiers critères d'embauche. Les qualités et les compétences des jeunes, leur capacité à innover et à créer de la richesse ne sont pas suffisamment reconnues. Il convient de changer cette manière de voir.

Concernant le registre unique du personnel, nous avons besoin d'une annexe spécifique qui permette d'identifier les stagiaires présents dans l'entreprise et de les distinguer des salariés. D'une part, pour éviter toute confusion entre ces deux populations ; d'autre part, pour faciliter les contrôles, qui peuvent porter, par exemple, sur le respect des seuils, sur la durée de présence des stagiaires ou sur l'effectivité du tutorat.

Enfin, les stagiaires ont, bien évidemment, des devoirs : les conventions de stage définissent les droits et les devoirs de l'établissement d'enseignement, de l'organisme d'accueil et du stagiaire. Celui-ci doit, en particulier, se conformer au règlement intérieur de l'entreprise.

Je salue le travail de M. Cordery sur l'emploi des jeunes et la réglementation des stages en Europe. Les avancées que nous proposons avec le présent texte sont observées avec beaucoup d'intérêt dans les autres États membres et pourraient même inspirer les instances européennes.

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