Intervention de Sylvia Pinel

Séance en hémicycle du 17 février 2014 à 16h00
Redonner des perspectives à l'économie réelle et à l'emploi industriel — Article 5

Sylvia Pinel, ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme :

Le Gouvernement comprend parfaitement les motivations qui ont amené à l’introduction d’une notion de transfert indirect de la propriété d’une action. Vous avez souhaité, en première lecture, éviter des pratiques de contournement volontaire de la règle des droits de vote doubles, en prévoyant que toute cession indirecte de titres ferait perdre à l’actionnaire direct ses droits de vote doubles. Si vos motivations sont bonnes, la solution proposée n’est pas appropriée. C’est pourquoi le Gouvernement a soutenu, lors de l’examen du texte au Sénat, un amendement visant à revenir sur cette mesure.

Le Gouvernement pense en effet que ce dispositif est source de complexité et de risque juridique, et qu’il causera in fine plus de difficultés pour les groupes français qu’il ne permettra d’en résoudre. Les cas de contournement que vous visez demeurent très rares. Le droit actuel peut d’ores et déjà fournir des réponses à ces problèmes.

Prévoir la perte des droits de vote doubles en cas de transfert indirect du contrôle sur les titres implique des conséquences beaucoup plus larges que le problème que vous entendez résoudre. Tout d’abord, cette mesure suscite des difficultés opérationnelles significatives et augmente le risque d’erreur lors des assemblées générales. Il est en effet très difficile pour une société de vérifier la qualité des actionnaires indirects et de l’évolution de la structure de détention de leurs actions. Ces erreurs viennent ensuite mettre en péril la validité des délibérations des assemblées générales et donc le bon fonctionnement même de ces sociétés.

J’ai bien noté que vous avez déposé deux amendements visant à répondre à ces préoccupations, mais vous le faites au prix d’une très grande lourdeur et d’obligations d’information très contraignantes.

Ce dispositif paraît d’autant plus lourd et disproportionné qu’il s’appliquera d’abord à des investisseurs qui n’ont rien à se reprocher et qui ne cherchent pas à contourner la loi française. Le dispositif qui figure dans le texte pose un autre problème auquel vos amendements ne répondent pas : il va provoquer des effets indésirables dans beaucoup de groupes qui se sont structurés en faisant appel à des holdings intermédiaires. Ces montages sont fréquents en particulier dans les groupes ayant un contrôle familial. Toute évolution de ces structures intermédiaires – et la vie des entreprises peut le requérir – va entraîner des effets en chaîne de perte de droit de vote double, alors même que ces derniers ont pu être utilisés précisément pour sécuriser ces montages. Il est très délicat d’expliquer ce problème sans un exemple concret, mais le Gouvernement est persuadé que cela peut entraîner, à plus ou moins court terme, des difficultés dans plusieurs grands groupes français. À nouveau, vos amendements ne répondent pas à ces difficultés. C’est pourquoi je défends, au nom du Gouvernement, cet amendement de suppression de l’alinéa 7.

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