Monsieur le président, madame et monsieur les ministres, chers collègues, il est vrai que nous abordons aujourd’hui un pan douloureux de l’histoire réunionnaise. L’affaire Bumidom ou, comme on l’entend plus couramment, l’affaire des enfants de la Creuse est une histoire trop longtemps restée taboue, un sujet que l’UMP, je le regrette, voudrait encore aujourd’hui enterrer de peur d’affronter certaines réalités. Malgré plusieurs retours sur cette période de notre histoire, cinquante ans après, les blessures sont toujours aussi vives et la plaie ouverte, car les initiatives prises par les victimes afin que leur souffrance soit reconnue n’ont jamais abouti.
Il faut avoir le courage de reconnaître que la politique migratoire décidée à l’époque à l’initiative de Michel Debré a, pour ces enfants, échoué à atteindre son objectif. Ils étaient 1 630 mineurs qui n’avaient rien demandé ; ils n’ont pas eu leur mot à dire sur cette immigration forcée. Ce fut un désastre humain, affectif et professionnel, si l’on daigne entendre aujourd’hui leurs témoignages. Il est vrai que certains d’entre eux ont eu la chance d’être confiés à un entourage bienveillant, mais d’autres ont connu des conditions difficiles : ils ont perdu leurs repères familiaux et culturels, vivant un véritable déracinement. Nous parlons ici de détresse, de souffrance, de vies volées en éclats.
Après notre interpellation écrite au Président de la République en juin 2013 et le travail d’élaboration de cette proposition de résolution, nous souhaitons désormais que ce drame humain soit entendu et diffusé. Nous voulons que l’État regarde en face cette part sombre d’une histoire passée sous silence. Les justifications tenant à la résolution des problèmes démographiques des DOM-TOM et de certaines régions rurales de l’hexagone ne peuvent suffire à expliquer le déracinement de ces enfants et la souffrance de leurs parents, dont certains sont aujourd’hui décédés.
Depuis plus de cinquante ans, nous attendons des réponses. L’heure est venue de rendre justice à ces enfants devenus adultes. Cette proposition de résolution, dont je me félicite, concrétise un nouvel espoir pour la reconnaissance de la responsabilité morale de l’État et pour la réhabilitation de milliers de parents abusés. Enfin, ce texte est la première étape dans la reconstruction d’une vie. C’est la raison pour laquelle j’appelle les parlementaires du groupe SRC à voter cette résolution sans réserve.