Intervention de Colette Capdevielle

Séance en hémicycle du 30 octobre 2012 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaColette Capdevielle :

L'accès au droit pour tous est un droit fondamental, dont le respect doit être assuré par l'État au même titre que l'accès à la santé et à l'éducation. Véritable ambition politique, il constitue en outre une garantie fondamentale dans une société démocratique.

Vous augmentez par ailleurs le budget de l'aide juridictionnelle : c'est fondamental, car les plus fragiles ont le droit d'être non seulement défendus dans des délais raisonnables, mais également assistés et conseillés par des professionnels qualifiés, formés et correctement rémunérés pour la mission de service public qu'ils exercent au profit des plus défavorisés.

Seulement 26 % de la population est éligible à l'aide juridictionnelle. Il est donc nécessaire d'engager une réforme de fond de ce système, en s'inspirant notamment du rapport Bouchet et du projet de loi présenté par Mme Marylise Lebranchu, alors garde des sceaux, en 2002.

Il convient d'élargir le champ d'éligibilité, d'assouplir les conditions d'admission et de repenser les barèmes, notamment pour certains contentieux qui peuvent s'avérer particulièrement onéreux pour les justiciables, en matière de responsabilité médicale ou de construction par exemple.

Nous devons également simplifier, renforcer la demande de qualité de la prestation des professionnels, affirmer le principe de la rémunération en remplacement de l'indemnisation, et enfin diversifier les sources de financement, par exemple avec une taxation sur les actes juridiques et sur certaines transactions, ou encore une participation des collectivités territoriales, des caisses d'allocations familiales, des comités d'entreprise ou des assurances.

Le recours à la médiation et aux modes de règlement pacifié des litiges doit être privilégié, car il permet de conduire à une solution plus rapide, plus responsable et bien moins onéreuse.

Vous nous indiquerez par ailleurs si vous envisagez de supprimer le timbre fiscal de 35 euros, et même 150 euros par partie devant les cours d'appel. Ce véritable « droit de péage » est un frein à l'accès à la justice.

J'apprécie également votre souci de faire en sorte que la couverture judiciaire du territoire soit assurée grâce aux nouvelles technologies, grâce aux maisons du droit – il faut les renforcer, car elles rapprochent les personnes les plus éloignées de la justice –, grâce enfin à une coordination des professionnels plus efficace.

Évoquons aussi la question des délais, qui peut constituer un obstacle à l'accès au droit. Le recours de plus en plus fréquent à la comparution immédiate en matière pénale, privilégié par vos prédécesseurs, ne protège pas les victimes, contrairement à ce que l'on peut penser : soit on oublie de les convoquer, soit elles n'ont pas le temps matériel d'organiser leur représentation en justice. Elles ne retirent finalement aucun bénéfice du raccourcissement des délais.

A contrario, les délais d'appel, notamment devant les chambres sociales, se comptent malheureusement souvent en années, dissuadant ainsi certains salariés d'exercer leurs droits et d'agir en justice.

Partant du principe que la résolution d'un problème juridique est un facteur de réinsertion, ou à tout le moins de traitement de la difficulté sociale, nous devrons montrer que l'accès au droit figure au premier plan des priorités en matière de politique judiciaire.

Cela suppose notamment la recherche de cohérence et de synergies entre toutes les structures existantes, l'objectif étant de parvenir à la construction d'un réseau simple, professionnel, efficace et cohérent sur l'ensemble du territoire.

Enfin, je ne peux terminer sans évoquer « l'action de groupe » qui fait encore défaut dans notre droit, alors qu'elle est plébiscitée par les associations de consommateurs et de défense de l'environnement.

Le chantier est immense, certes. Mais notre volonté, notre détermination à faire avancer le droit, le droit pour tous est notre moteur ; nous veillerons à le faire tourner à pleine puissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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