Madame la ministre de la santé, l’alcoolisme touche 1,5 à 2 millions de personnes en France, induit 49 000 morts chaque année. Les centres d’addictologie prennent en charge 150 000 personnes, dont seulement la moitié sont concernées par l’addiction à l’alcool. Au total, moins de 10 % des malades bénéficient d’un traitement chaque année en France.
Dans ce contexte, on comprend pourquoi la question de la prise en charge de la dépendance à l’alcool constitue un enjeu de santé publique essentiel. Après qu’a été admise l’efficacité du Baclofène, qui est encore en expérimentation, dans le traitement de l’alcoolisme – médicament prescrit hors autorisation de mise sur le marché à des milliers de patients par des médecins généralistes –, une recommandation temporaire d’utilisation doit être délivrée prochainement.
Ce médicament, dont la prescription serait alors limitée aux seuls spécialistes, devrait en fait bénéficier d’une extension d’AMM, afin que le traitement en cours de milliers de patients ne soit pas suspendu.
D’autre part, le Nalméfène, médicament indiqué dans l’aide au sevrage alcoolique, ayant obtenu une AMM européenne, sera bientôt commercialisé en France. Sa prescription était initialement réservée aux addictologues. Ce produit pourrait maintenant être prescrit par le médecin généraliste, mais sans que son patient soit remboursé par l’assurance maladie. Seules les prescriptions des spécialistes pourraient donner droit à remboursement : la commission de transparence a donné pour argument que l’accompagnement psychosocial ne serait pas réalisable par les généralistes, qui pourtant l’assurent pour d’autres médicaments contre la dépendance alcoolique.
C’est pourquoi, madame la ministre, je vous demande de clarifier votre position. Comment pourriez-vous soustraire de la solidarité nationale le remboursement d’un traitement prescrit par un généraliste, pivot de la santé publique, alors que ce traitement présente un intérêt essentiel pour lutter contre l’alcoolisme ?
Lutter contre l’alcoolisme, c’est miser sur la prévention des violences intra-familiales, des violences routières, de cancers, de maladies neurologiques et digestives dont le coût humain et financier est considérable.