Ma question porte sur l'accessibilité de la justice, laquelle a été doublement mise à mal dans la période récente, d'une part par la réforme de la carte judiciaire – j'aurai l'occasion d'en reparler – et, d'autre part, par la taxe sur les procès, pudiquement appelée « contribution à l'aide juridictionnelle ».
Cette taxe est scandaleuse ; elle introduit une rupture avec trente-cinq années de gratuité des actes de justice devant les juridictions civile et administrative, instaurée sur l'initiative du garde des sceaux de l'époque, Alain Peyrefitte, avec la loi du 30 décembre 1977. De surcroît, elle pose de nombreux problèmes.
Il y a d'abord un problème de principe, puisque, comme les peines planchers, elle interdit toute modulation par le juge, y compris lorsque l'on est dans les situations les plus absurdes et les plus kafkaïennes.
Elle pose ensuite des problèmes de conventionnalité, au regard de la CEDH, qui a déjà eu l'occasion de déclarer inconventionnels des dispositifs comparables en Turquie ou en Roumanie, pour des droits de timbre de vingt et un euros ou des frais de procédure de dix-huit euros.
Elle pose en outre d'évidents problèmes d'équité. Enfin, elle crée des situations aberrantes, notamment dans le contentieux prud'homal, où des salariés qui ont été licenciés et se retrouvent donc, par définition, privés de revenus, peuvent être amenés, pour introduire leur instance, à acquitter cette taxe.
Pour toutes ces raisons, qui conduisent au final à une sélection et à une régulation des flux par l'argent – on a déjà connu cette situation devant la justice administrative –, nous sommes hostiles à cette taxe.