Au-delà de cette différence d'une dizaine d'années, les Américains s'appuient sur une conception différente de la nôtre en termes de normes de sûreté pour le prolongement, puisque ce n'est pas un processus d'amélioration, mais de conformité aux standards initiaux qui est privilégié.
Les cuves des réacteurs sont irradiées pendant le fonctionnement des centrales, ce qui peut fragiliser les aciers. Il y aura lieu de se pencher sérieusement sur cette question si nous décidons d'aller au-delà de quarante ans. Toutes les cuves du parc nucléaire français ne se trouvent pas dans le même état. Celle de Tricastin 1 présente des défauts – rendus publics –, et nous avons fixé, à l'issue de la troisième visite décennale de ce réacteur, un rendez-vous intermédiaire au bout de cinq ans.
Les enceintes doivent également faire face au vieillissement : ainsi, la centrale de Belleville a rencontré des problèmes de qualité de béton pour l'enceinte de confinement, qui devront être de plus en plus surveillés au fur et à mesure que les années passeront.
Dans une lettre publique du 28 juin dernier, nous avons dressé la liste de nos préoccupations : y figuraient la sûreté des piscines de stockage du combustible – sur laquelle l'accident de Fukushima a attiré notre attention –, la capacité à refroidir l'enceinte en cas d'accident grave – qui doit être renforcée pour les dispositifs de deuxième génération – et le récupérateur de coeur fondu, qui existe pour l'EPR, mais pas dans l'actuelle génération de réacteurs.
Ce sont ces raisons qui nous conduisent à affirmer que la poursuite du fonctionnement n'est pas acquise à ce jour.
Nous avons prévu deux séminaires de discussion avec l'exploitant d'ici à la fin de ce semestre, ces rencontres n'étant que le début du processus d'examen des propositions d'EDF. Après l'avis technique de l'IRSN, les groupes permanents d'experts se réuniront pour formuler une opinion technique ; nous ouvrirons ces groupes à la société civile et aux experts étrangers. Nous pourrons ainsi émettre un premier avis en 2015, et l'avis final – portant sur l'ensemble des aspects ou sur ceux partagés sur les différents réacteurs – pourrait être rendu en 2018 ou en 2019. Enfin, nous nous prononcerons sur chaque réacteur en tenant compte des spécificités de chaque site.