Intervention de Général Pierre de Villiers

Réunion du 26 février 2014 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général Pierre de Villiers, chef d'état-major des armées (CEMA :

Merci de votre invitation. C'est pour moi un honneur et un plaisir de m'exprimer devant vous, moins de deux semaines après ma prise de fonctions.

Je me réjouis de l'intérêt sans cesse renouvelé de votre commission pour les questions de défense, comme en témoigne la qualité des débats sur la loi de programmation militaire (LPM). En outre, j'attache une grande importance à ces échanges avec la représentation nationale, en particulier avec vous, madame la présidente, et votre équipe, avec laquelle nous avons le plaisir de travailler.

Au lendemain du vote de la prolongation de l'opération Sangaris en République centrafricaine, je ne suis pas venu vous parler d'opérations. Mais je tiens à saluer devant vous la mémoire du caporal Damien Dolet du RICM de Poitiers, décédé à Bouar dimanche dernier dans l'exercice de sa mission.

Pour résumer mon état d'esprit aujourd'hui, j'emploierai trois mots : fierté, lucidité et détermination.

Fierté, d'abord.

Fierté de commander les hommes et les femmes de nos armées, des armées engagées en opération, de celles qui gagnent et qui protègent, de celles qui jouent un rôle moteur dans nos alliances et au sein de l'Union européenne.

À l'heure où je vous parle, 9 000 militaires français sont engagés dans 26 opérations extérieures, dans des missions variées, exigeantes et difficiles. Je pense à Serval et à Sangaris, pour ne citer que deux d'entre elles. La première prendra une nouvelle dimension avec la régionalisation de notre stratégie et de notre dispositif au Sahel. La seconde, qui est une mission sans ennemi déclaré autre que la violence quelle qu'elle soit, au sein des populations, est sans doute la plus complexe qu'un soldat puisse réaliser. Je pars d'ailleurs dès ce soir au Mali, avant de me rendre en Centrafrique.

Dans le même temps, et en permanence, nos armées surveillent et protègent le territoire national, ses espaces aérien et maritime et leurs approches. En permanence, elles recueillent du renseignement, surveillent des zones d'intérêt stratégique, se préparent aux engagements futurs. C'est dans ce cadre, par exemple, que le groupe aéronaval – auquel j'ai rendu visite peu avant son retour à Toulon – s'est déployé dans l'océan Indien pour l'exercice Bois Belleau durant trois semaines en intégration totale avec les Américains.

La posture de dissuasion est tenue, sans faille, par les forces aériennes stratégiques (FAS) et la force océanique stratégique (FOST). J'étais à Taverny le 18 février lors d'un exercice nucléaire « Poker » ; j'ai pu constater l'excellence des FAS, du centre de commandement jusqu'aux équipages des Mirage et des Rafale.

Fierté donc de commander des hommes et des femmes dévoués et professionnels, animés par la passion de leur métier et celle de servir.

Fierté personnelle, fierté partagée, que j'ai mesurée en visitant nos blessés à Percy le jour même de ma prise de fonctions. Leur courage et leur dignité sont édifiants. Les soutenir est un devoir moral, c'est notre premier devoir.

Lucidité, ensuite.

Pour avoir conduit la réforme, ces quatre dernières années, en qualité de major général des armées, je connais la situation et les tensions qui pèsent sur nos armées. Dans tous les domaines – personnel, matériel, infrastructure, fonctionnement, activité, soutien –, il existe des fragilités, qui sont autant de points de vigilance. Vous les connaissez, je n'insiste donc pas. Je parle de vigilance, mais en excluant tout catastrophisme, car je suis optimiste de nature.

Ces dernières semaines, de nombreuses personnes m'ont adressé leurs félicitations, mais la plupart ont ajouté : « Bon courage, ça ne va pas être facile ! », avec un air de commisération... Je reste donc lucide. Mais aussi déterminé.

Garantir au pays les armées dont il a besoin est en effet un véritable défi dans le contexte budgétaire que nous connaissons et compte tenu des fragilités évoquées. Ce défi ne peut être relevé qu'avec une ferme volonté de réussir. Pour ma part, je m'y engage, et ma détermination est à la mesure de l'enjeu.

Vous m'avez demandé de vous présenter aujourd'hui la réforme des armées. Or, depuis la professionnalisation des forces armées, lancée en 1996, les réformes s'enchaînent, voire se superposent. Le Livre blanc de 2008 et la réforme générale des politiques publiques (RGPP) ont imposé aux armées un ensemble de réformes d'une ampleur considérable. À titre d'exemple, l'armée de terre a perdu, depuis 2001, 43 % de ses effectifs.

Aujourd'hui, le Livre blanc de 2013 et la LPM 2014-2019 imposent d'autres réformes. L'effet successif, voire cumulatif, les rend particulièrement sensibles, même si elles n'ont pas l'ampleur des précédentes. C'est de cette nouvelle étape que je vais vous parler maintenant. Permettez-moi de partager avec vous trois convictions fortes.

La première est que ces réformes – que l'on peut considérer comme une nouvelle étape de la réforme des armées – sont incontournables. Leur réussite conditionne le succès futur de nos armes, compte tenu des contraintes très importantes qui pèsent sur nos capacités.

Ma deuxième conviction, vu l'écheveau des réformes en cours ou à venir, est la nécessité de rétablir une cohérence. Autrement dit, il faut aux hommes et aux femmes servant dans nos armées un projet fédérateur, un projet d'ensemble qui décline les grandes orientations politiques en actions concrètes et qui les replace dans une même perspective.

Ma troisième conviction est qu'il faut un état d'esprit adapté à la situation et aux défis à relever. Nous devrons être innovants et déterminés : la transformation est un état de fait, c'est aussi un état d'esprit.

Ces trois convictions constituent le plan de mon intervention devant vous.

Premier point, donc : la nécessité de cette nouvelle étape de la réforme. Elle découle de deux éléments de contexte.

Le premier est un nouveau Livre blanc, dans lequel le Président de la République, chef des armées, a fait le choix de conserver un niveau d'ambition élevé se déclinant au travers de trois grandes missions : la protection des Français et du territoire national, la dissuasion nucléaire, l'intervention extérieure.

Le Président de la République a également fait le choix de maintenir un modèle d'armées complet, afin de nous permettre d'assurer ces missions, et cohérent avec les scénarios prévisibles d'engagement – tout en conservant une autonomie d'appréciation et d'action, dans tous les domaines. Il a par ailleurs décidé d'accroître l'effort dans des secteurs d'avenir, qui permettent de mieux peser en coalition : renseignement, spatial, cyber, drones, frappes à distance et forces spéciales.

Enfin, le besoin de disposer de soldats bien équipés, bien entraînés, maîtrisant l'emploi de la force, a été réaffirmé. La préparation opérationnelle et donc l'entretien programmé des matériels constituent une priorité de notre ministre de la Défense.

En somme, il s'agit de maintenir le cap dans certains domaines et de faire mieux dans d'autres.

Le deuxième élément de contexte est la situation de nos finances publiques.

La réduction des déficits publics et la résorption de la dette contribuent à notre autonomie stratégique et à la souveraineté nationale, fondements de notre politique de défense. Vous connaissez la problématique, je n'insiste donc pas. L'affirmation d'une telle ambition pour nos armées est un défi.

Nos contrats opérationnels sont exigeants, mais ajustés à nos opérations les plus prévisibles. Le format des armées se réduit ; la modernisation des capacités se poursuit, à un rythme moindre. En dépit de leur caractère douloureux, les réductions de format, de personnel et d'équipements, ainsi que les étalements des livraisons de matériel, sont la seule voie pour entretenir un outil de défense conforme aux grands objectifs du Livre blanc. Cela implique une remise en cause profonde de notre manière de penser et d'agir.

Vous l'avez compris : ces éléments de contexte nous amènent à une nouvelle étape de la réforme au sein du ministère et donc des armées.

Dans une logique d'efficience, 31 chantiers de transformation ont été lancés au niveau du ministère, et ce dans tous les domaines : ressources humaines (RH), finances, soutien, service de santé ou communication notamment.

Partout, autant que cela est possible, la recherche d'une meilleure efficience impose de diminuer les effectifs et donc de revoir le partage des tâches. Le commandement des armées est naturellement affecté, à l'échelon interarmées, mais aussi au niveau de chaque armée, direction ou service interarmées.

Je donnerai d'ailleurs l'exemple dans ce domaine. L'état-major des armées se concentrera en effet sur les responsabilités du CEMA à travers la planification et la conduite des opérations, la programmation militaire et la réalisation des capacités, le soutien interarmées, sans oublier la dimension internationale, transverse, en particulier dans l'appui aux opérations, le soutien aux capacités, les relations militaires bilatérales.

Nous nous dirigeons donc vers un état-major des armées dont les effectifs diminuent de 30 %, avec un format resserré de 600 personnes au lieu de 930, sachant que chacun des états-majors d'armée descendra à un niveau compris entre 150 et 200 personnes. Tout cela pour commander les trois armées et les soutiens interarmées, soit un effectif total de 230 000 personnes environ en 2015 !

Nous serons alors installés à Balard et la réforme du commandement des armées sera terminée. Elle laissera aux trois armées le plus de marge de manoeuvre possible dans l'exercice de leurs responsabilités organiques. C'est une nécessité fonctionnelle, mais aussi « culturelle » : la culture d'armée est une réalité ; j'y crois profondément !

L'autre raison qui nous impose de poursuivre la réforme est la primauté de l'opérationnel.

Nous touchons ici à la finalité de la réforme. L'histoire ancienne tout comme le retour d'expérience récent montrent en effet que la cohérence globale entre les forces combattantes et les moyens concourants est une condition essentielle du succès opérationnel.

Ma responsabilité de CEMA est non seulement d'identifier les capacités nécessaires aux armées, mais aussi de garantir cette cohérence globale dans ses différents volets : ressources humaines, équipements, organisation, soutiens, préparation, concepts et doctrines. En cela, je suis responsable des travaux de planification des capacités militaires, de l'élaboration de la programmation militaire et de son actualisation.

C'est donc bien pour garantir le respect des contrats opérationnels fixés par le Livre blanc et remplir nos missions que nous devons poursuivre notre transformation. En conséquence, l'effort de déflation du personnel sera porté en priorité sur l'environnement et le soutien des forces.

J'en viens à ma deuxième conviction : une réforme de cette ampleur nécessite un projet fédérateur. Ce projet, nous l'avons : c'est un projet commun aux armées, directions et services interarmées, que j'ai baptisé CAP 2020.

Il découle du cadre fixé par le Livre blanc et la LPM. Il définit pour chaque armée, direction ou service, le chemin de sa transformation, en répondant à un objectif clair : disposer dans la durée d'un outil militaire complet et cohérent, apte à garantir nos intérêts de défense dans le cadre de l'ambition stratégique de la France.

La feuille de route est l'ordre aux armées, directions et services, que j'ai signé le 15 février dernier, au moment de ma prise de fonctions. Cet ordre est conçu selon trois lignes d'opération.

La première concerne l'optimisation des moyens au profit des capacités opérationnelles. Elle implique plusieurs éléments : la déclinaison des contrats opérationnels du Livre blanc en termes de disponibilité et de préparation des forces ; la définition de priorités dans les activités et la préparation opérationnelle, en lien avec les opérations en cours ; le maintien de notre niveau de qualification opérationnelle, en insistant sur la complémentarité interarmées ; l'adaptation et la modernisation de nos capacités, pour être prêts à faire face aux engagements futurs ; la réforme des dispositifs des forces prépositionnées et de présence, en réorganisant les points d'appui et en diminuant nos effectifs.

La deuxième ligne d'opération consiste à améliorer notre modèle de ressources humaines. C'est le volet majeur de la réforme : 23 500 postes devront être supprimés d'ici à 2019, en plus des 10 000 restants de la réforme précédente, soit environ 34 000 postes à cette échéance. Il s'agit de conduire ces déflations avec le plus de souplesse possible pour assurer la continuité de nos missions.

La maîtrise de la masse salariale nous impose par ailleurs de prendre en compte le contingentement des effectifs, le dépyramidage, la gestion des hauts potentiels, la promotion au mérite, la simplification du dispositif indemnitaire des militaires et, par conséquent, les parcours que nous offrons au personnel des armées.

L'objectif est d'obtenir une meilleure corrélation entre les grades, les emplois, les responsabilités et les rémunérations, ce qui implique de mieux gérer les flux d'entrée et de sortie du personnel.

De ce fait, notre modèle RH évoluera – il devra le faire le plus rapidement possible. Nous avons commencé depuis quelques mois les travaux en ce sens avec les armées.

In fine, nous aurons une pyramide des grades plus aiguë avec une population plus jeune. Dans cette optique, la rénovation de notre dispositif de reconversion sera centrale pour redynamiser la gestion du personnel. Tout cela sera évidemment conduit en étroite cohérence avec la baisse des effectifs dans les états-majors et le chantier de la formation.

Par ailleurs, l'adaptation de la gestion du personnel implique de pouvoir compter sur un système de paiement des rémunérations fiable et sécurisé. Après tant de péripéties, aux conséquences sociales et humaines souvent dramatiques pour les militaires et leurs familles, y compris pour les militaires en opérations, je me réjouis de la mise en place d'un « plan B » Louvois, annoncé par le ministre. Je me réjouis également que ce plan soit conduit sous la forme d'un programme d'armement, avec la rigueur que cela impose en termes de responsabilités et de procédures. Néanmoins, le retour à une situation totalement normalisée nous amènera à souffrir encore pendant deux ans.

Le dernier axe d'effort s'agissant des ressources humaines est l'amélioration de la condition du personnel, juste compensation des contraintes statutaires imposées aux militaires du fait de la finalité opérationnelle de leurs actions. En la matière, nous travaillons actuellement, au sein du ministère, à la réalisation d'un plan qui comprendra notamment la simplification du dispositif indemnitaire – il existe aujourd'hui 174 primes – et améliorera la prise en compte des notions de mérite et de responsabilité.

Il y a donc fort à faire dans le domaine des ressources humaines. Ce travail en profondeur nécessitera de faire évoluer les mentalités et demandera du temps. Il s'agit d'un sujet essentiel, sensible, qui doit être traité dans le respect de notre finalité opérationnelle, des spécificités des armées et du statut général des militaires.

La troisième et dernière ligne d'opération vise à adapter notre organisation.

Comme je l'ai évoqué, une armée qui adapte son organisation sous contrainte doit avoir une administration plus agile, plus resserrée : elle doit réduire les effectifs des états-majors mais aussi des organismes centraux. Elle doit également densifier ses emprises territoriales, pour dépenser mieux et moins. Nous devons chercher en permanence la mise en adéquation du contrat opérationnel, des ressources humaines, des équipements, des ressources financières et du stationnement. D'autres restructurations territoriales sont inéluctables. Il s'agit d'un sujet complexe et très délicat, aux impacts multiples – vous êtes bien placés pour le savoir –, mais sur lequel nous devons avancer. Il faut un maximum de visibilité pour cadencer la « manoeuvre RH » et donner le plus de perspectives au personnel. En la matière, nous ferons des propositions au ministre dans les mois qui viennent – après des études fonctionnelles détaillées, afin d'éviter des abattements aveugles.

Une armée qui adapte son organisation sous contrainte est enfin une armée qui accroît la performance de ses soutiens. Depuis une dizaine d'années, la chaîne des soutiens connaît une véritable révolution avec l'interarmisation des fonctions, la création des bases de défense et la mise en place d'un pilotage centralisé au niveau de l'état-major des armées. Compte tenu des inévitables défauts de jeunesse et des contraintes nouvelles, cette chaîne s'adaptera encore.

Le principe d'une administration générale et de soutiens communs sous une autorité unique, le Service du commissariat des armées, et le renforcement du pouvoir des commandants de base de défense constituent deux axes importants dans ce domaine. La responsabilité de commandant de base de défense sera confiée le plus souvent possible aux officiers assumant déjà des responsabilités locales, comme un commandant d'école, à Draguignan. C'est ce que nous appelons, dans notre jargon, le « double casquettage » : le dialogue est facilité entre le soutenant et le soutenu quand c'est le même homme ! De la même façon, nous renforcerons les « marquants d'armée », c'est-à-dire le lien d'une base de défense avec une armée, comme c'est déjà le cas à Toulon ou à Brest pour la marine, à Mourmelon pour l'armée de terre et à Evreux pour l'armée de l'air.

J'en viens à ma troisième et dernière conviction : l'état d'esprit dans lequel nous engageons cette adaptation.

C'est à nous, ici à Paris, au sommet des armées, de susciter l'adhésion et la confiance en cette nouvelle période qui s'ouvre, avec vérité et simplicité. En tant que chef d'état-major des armées, ma priorité sera de rassembler, de fédérer les énergies dans une dynamique d'innovation et d'imagination. Il s'agit, pour les armées comme pour tout le ministère, d'agir « ensemble, autrement, au mieux ».

Ensemble, car ce sont les femmes et les hommes des armées qui sont au coeur des adaptations à venir. Il leur est beaucoup demandé : un engagement opérationnel sans faille et de nouveaux efforts au quotidien. Il est clair que l'adhésion de tous est la condition du succès. Comme vous le savez, la préparation d'un livre blanc et d'une LPM peut créer quelques dissensions entre les armées.

Cette adhésion doit se matérialiser à tous les niveaux, et d'abord entre les armées. Je veux constituer une vraie équipe de commandement avec les trois chefs d'état-major : le général d'armée Bertrand Ract-Madoux, l'amiral Bernard Rogel et le général d'armée aérienne Denis Mercier. Cette adhésion doit ensuite se manifester au niveau du ministère, par une bonne coordination des réflexions entre les grands responsables. Le C4, comité de cohérence pour la conduite du changement, qui réunit le secrétaire général pour l'administration (SGA), le directeur général de l'armement (DGA) et le major général des armées, en est un exemple.

Nous devons également faire autrement. Je l'ai déjà dit, mais j'y insiste : nous ne pourrons réaliser le nouveau modèle d'armée qu'en revoyant nos organisations et nos modes de fonctionnement. Nous sommes déjà en ordre de marche pour ces travaux, sachant que le modèle de 1996 est arrivé au bout de ses possibilités.

Nous avons eu quelquefois la mauvaise habitude de créer une mission à chaque tâche nouvelle et, ainsi, de générer des « mammouths » administratifs peu lisibles et peu réactifs. Nous n'en avons plus ni les moyens, ni le temps. Nous devons donc encore simplifier les démarches administratives, de façon volontariste, en prenant en compte les initiatives locales : les vraies solutions aux problèmes locaux ne se trouvent pas à Paris. Une démarche spécifique est en cours au sein du ministère et des armées : 66 mesures de simplification ont été validées ; certaines sont déjà engagées, d'autres sont à l'étude. À titre d'exemple, une plateforme d'échange pour la simplification sera mise en oeuvre, début mars, sur le réseau interne défense, afin de recueillir les propositions du terrain et en informer l'ensemble du personnel.

Faire autrement, c'est aussi se tourner vers l'extérieur, vers l'international – autant d'opportunités à explorer avec pragmatisme. C'est le cas, par exemple, du concept CJEF - Combined joint expeditionary force -, que nous développons avec nos amis britanniques, ou de l'emploi de la brigade franco-allemande (BFA) au Mali avec nos voisins allemands. Il va de soi que réalisme rime avec pragmatisme. Ne rêvons pas : les coopérations multinationales ne résoudront pas tous nos problèmes : en période de tension budgétaire, beaucoup de nos partenaires sont tentés par le repli. Et pourtant, dans l'intérêt de tous et de chacun, je ne vois pas d'autre solution que d'avancer ensemble : à des échelles différentes, nous sommes tous logés à la même enseigne !

Enfin, il s'agit de faire au mieux.

Nous ne ferons pas mieux avec moins, nous continuerons à faire au mieux ! Cela ne veut pas dire manquer d'ambition, mais signifie être lucide et honnête vis-à-vis de nous-mêmes et de nos personnels militaires et civils : il faut dire la vérité.

Faire au mieux, c'est définir plus clairement nos priorités et remettre cent fois l'ouvrage sur le métier, afin de les réorienter aussi vite et aussi souvent que nécessaire. Je pense au maintien en condition opérationnelle des équipements, déterminant pour nos capacités et qui, parallèlement à un effort budgétaire sensible porté par la LPM, fait l'objet de plans d'action spécifiques.

Nous devrons donc anticiper davantage, afin de limiter les conséquences des risques et des fragilités, parmi lesquels : le vieillissement assumé de certains équipements, conséquence des décalages de livraison de ceux qui doivent les remplacer ; la « soutenabilité » de notre équilibre en matière de ressources humaines ; des difficultés quotidiennes dans l'exercice de notre métier touchant aux conditions de vie dans nos bases, régiments et ports, notamment en ce qui concerne l'infrastructure ; le risque de décrochage du personnel vis-à-vis de la réforme, alors même que son adhésion est une condition essentielle de sa réussite.

En conclusion, le Livre blanc et la LPM expriment un engagement politique fort devant la Nation, lequel doit nous accompagner vers le nouveau modèle d'armée : le modèle 2025.

Je suis pleinement conscient des enjeux de ces réformes et convaincu de la nécessité de les poursuivre. Vous pouvez compter sur ma totale loyauté pour conduire, à travers notre projet, cette nouvelle étape de la transformation.

Au cours des quatre dernières années, j'ai pu mesurer, en tant que major général des armées, les limites de l'élasticité de notre système. Je connais également parfaitement les difficultés et les défis d'aujourd'hui. C'est la pérennité d'un outil de défense complet et cohérent qui est en jeu.

La LPM vient d'être promulguée. Sa mise en oeuvre représente un effort important pour les armées, dont le costume est déjà taillé au plus juste. Toute encoche sur les ressources prévues entamerait inévitablement la cohérence du modèle et compromettrait le succès de la réforme, au détriment de la finalité opérationnelle.

L'exécution conforme de la LPM est donc primordiale. Elle l'est pour l'efficacité de nos armées, mais aussi pour le moral du personnel, qui y voit une juste reconnaissance de son engagement pour la Nation.

J'en appelle à votre soutien : il sera déterminant.

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