Intervention de Jean-Louis Touraine

Réunion du 17 octobre 2012 à 17h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine, député :

Je me félicite des efforts de l'Agence pour augmenter les dons d'organes et de tissus et trouver des techniques qui permettent de progresser dans ce domaine. Cependant, les dons entre vivants ne représentent que 10 % de la transplantation rénale. Certes, la loi de bioéthique de 2011 a ouvert de nouvelles perspectives mais l'on n'a toujours pas atteint les objectifs assignés entre les entrées de patients sur la liste d'attente et les patients transplantés. Ainsi, chaque année, de nouveaux patients sont inscrits sur cette liste avec la perspective, soit de mourir en attente, soit d'attendre longtemps. La première complication de la greffe étant la non-greffe, il y a davantage de patients qui meurent inscrits sur la liste d'attente que de complications de traitement liées à la greffe. J'observe qu'un tiers des possibilités de don après décès se heurte à un refus oral exprimé par la famille, ce qui dépasse largement le nombre de personnes qui se sont inscrites sur le registre des refus de dons d'organes. Si l'on parvenait à réduire ces refus, on éviterait la pénurie d'organes et la participation de patients français en attente de greffes, à des trafics d'organes à l'étranger pour l'achat de greffons dans des conditions douteuses. Aussi est-il très important de réduire ces refus. Maintenant que les possibilités techniques de greffes ont été développées et qu'il reste au législateur à élargir encore les possibilités de dons, quel type de coopération suggérez-vous pour avancer et préparer une évolution progressive de la législation ? Quelle interaction, entre l'OPECST et l'ABM pour préparer une évolution suggérez-vous ? Faut-il organiser des auditions communes sur cette question ?

Sur la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines (CSEh), comme mes collègues, je regrette que la loi bioéthique de 2011 réduise encore cette recherche. Doit-on laisser perdurer ce système d'interdiction avec dérogation ou bien comme l'ont préconisé la plupart des organismes consultés mettre en place un système d'autorisation encadrée de ces recherches ? On laisserait à l'ABM la responsabilité d'évaluer la pertinence scientifique des protocoles de recherches et de donner les autorisations car, dans ce domaine, ce qui n'est pas scientifique est contraire à l'éthique, et ces recherches doivent s'inscrire dans un cadre scientifique rigoureux. Face aux difficultés rencontrées au quotidien, depuis trente ans par les chercheurs de cette discipline, comment voyez-vous l'avenir ? Tous ceux qui comme moi se sont engagés dans ces recherches ne peuvent pas travailler sereinement ; certains y ont renoncé, d'autres se sont expatriés. Au moment des applications, cela aura des conséquences, la France accusera indubitablement un retard dans cette discipline par rapport à d'autres pays. La recherche sur les CSEh reste indispensable car elles ont des propriétés dont les autres cellules souches ne disposent pas, l'étude des cellules souches pluripotentes induites (IPS) découvertes par le prix Nobel de médecine ne peut se substituer à celle des cellules souches embryonnaires humaines, car les IPS ont des propriétés différentes. L'ABM serait-elle prête à évaluer un nombre plus grand de protocoles de ces recherches considérées comme interdites si l'on faisait disparaître l'autocensure des chercheurs dans cette discipline?

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