Intervention de Jeanine Dubié

Réunion du 10 avril 2014 à 11h00
Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanine Dubié, rapporteure :

Nous avançons plusieurs mesures pour améliorer et moderniser la gestion de l'ATA, dont bénéficient aujourd'hui 42 000 demandeurs d'asile pour un montant d'environ 180 millions en 2013. Nous avons constaté en effet que l'allocation de cette aide donne lieu à un certain nombre de dysfonctionnements, notamment à un taux d'indus évalué à 18 %, ce qui représente une trentaine de millions d'euros. Ces indus trouvent essentiellement leur origine dans un défaut de transmission d'informations entre les services responsables et Pôle emploi, chargé de verser cette prestation. C'est pourquoi nous proposons que la gestion de l'ATA soit confiée à l'OFII, en lui transférant depuis Pôle emploi les moyens en personnel nécessaires pour l'accomplissement de cette mission.

Nous proposons également d'instituer, au niveau régional et à titre expérimental, le versement de l'allocation au demandeur via une carte de retrait et de paiement utilisable dans certains commerces et grandes enseignes alimentaires.

Nous préconisons en outre qu'une réflexion soit engagée sur la familialisation de l'ATA, aujourd'hui versée aux seuls adultes, pour tenir compte de l'accroissement du nombre de demandes d'asile provenant de familles.

Lorsqu'un autre État membre a accepté la réadmission du demandeur d'asile sur son territoire dans le cadre de la procédure « Dublin », il nous semblerait légitime d'interrompre le versement de l'ATA si ce demandeur se soustrayait à la mesure de réadmission.

Afin d'éviter des demandes d'opportunité, nous préconisons d'instaurer un délai, courant dès l'entrée sur le territoire, au-delà duquel l'allocation temporaire d'attente ne pourrait plus être demandée.

Nous proposons enfin de supprimer le bénéfice de l'ATA à partir de la deuxième demande de réexamen, conformément à l'article 20 de la directive « Accueil », afin d'éviter que l'accès à l'allocation ne constitue un élément d'attractivité suscitant des demandes de réexamen abusives.

Le pilotage de l'hébergement et de l'accompagnement des demandeurs d'asile nécessite de disposer d'une application unique rassemblant toutes les informations utiles au suivi des demandeurs d'asile – état de la procédure, situation au regard du séjour, droits sociaux ouverts, hébergement, ATA –, à l'exception des informations protégées par la confidentialité de la procédure d'examen de la demande d'asile.

Il nous semble qu'il faut mieux utiliser les potentialités des procédures accélérées, également dites « prioritaires ».

La procédure dite « prioritaire » en vigueur permet aux services des préfectures de refuser l'accès à la procédure d'asile de certains demandeurs, soit qu'ils relèvent de la compétence d'un autre État membre de l'Union européenne, soit qu'ils constituent une menace grave pour l'ordre public, soit en cas de fraude délibérée, ou d'imposer à l'OFPRA de statuer dans un délai maximal de quinze jours, dans le cas de ressortissants d'un pays figurant dans la liste des pays d'origine sûrs, c'est-à-dire garantissant le respect des droits de l'homme.

Cette liste, qui regroupe actuellement dix-huit États, est une liste nationale, établie par le conseil d'administration de l'OFPRA. Sans être opposés à ce dispositif, nous souhaitons qu'il soit suffisamment souple pour tenir compte des évolutions géopolitiques et que l'établissement de la liste soit confié au directeur général de l'OFPRA plutôt qu'à son conseil d'administration.

Le recours devant la CNDA d'un demandeur d'asile relevant d'une procédure prioritaire n'est actuellement pas suspensif : cela signifie que l'intéressé peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement pendant la période d'examen de son affaire par cette juridiction. Cette possibilité a valu à la France un avertissement de la Cour européenne des droits de l'homme dans un arrêt du 2 février 2012. Voilà pourquoi nous préconisons de mettre fin à cette situation en généralisant le caractère suspensif des recours formés devant la CNDA.

Enfin, nous souhaitons pérenniser les procédures qui permettent à l'OFPRA et à la CNDA d'accélérer l'instruction de demandes d'asile manifestement infondées, ce qui n'exclut pas d'en créer d'autres, à condition de laisser à ces instances – et non aux préfectures – la responsabilité exclusive d'aiguiller les dossiers entre toutes ces procédures, en fonction de leurs caractéristiques propres.

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