Intervention de Françoise Dubois

Séance en hémicycle du 15 avril 2014 à 15h00
Interdiction de la mise en culture du maïs génétiquement modifié mon 810 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Dubois :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, le principe de précaution est inscrit dans l’article 5 de la Charte de l’environnement de 2005, et il a valeur constitutionnelle. Bien qu’autoriser ou refuser la mise sur le marché d’OGM soit une compétence qui revient formellement à la Commission européenne, la France a le droit de faire jouer sa clause de sauvegarde et il n’est pas interdit d’avoir, à Bruxelles comme à Paris, une position stable et cohérente sur ce sujet. J’insiste sur le fait que la validité de la clause de sauvegarde au regard du droit européen est une question indépendante de celle de son adoption en droit interne.

Après l’issue déplorable qu’a connue la proposition de loi de notre collègue sénateur Alain Fauconnier, le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt a pris un arrêté interdisant le MON 810 au nom du principe de précaution. C’était la responsabilité du Gouvernement d’agir en ce sens avant que la période des semis n’arrive. Et nous nous sommes félicités de cette décision. Elle a aussi été un soulagement pour une très grande majorité des Français, qui ne veulent pas d’OGM dans leur assiette et qui s’opposent à ce que l’on prenne le risque d’une dissémination incontrôlable d’OGM sur les parcelles et les cultures voisines d’un champ de maïs transgénique.

À présent, il appartient au législateur de prendre le relais afin de sécuriser la décision de la France de poursuivre son moratoire sur le MON 810. La loi se substituera au décret. La logique et l’ordonnancement juridique se trouvent donc respectés. Il n’y a pas à rougir de cela, à moins de vouloir, comme la droite au Sénat, se cacher derrière son petit doigt en invoquant la sacro-sainte autorisation formelle émanant de la Commission. Il faut se battre avec ses armes et c’est ce que la majorité présidentielle fait actuellement en assumant ses convictions, en respectant l’avenir de nos enfants, en faisant tout simplement preuve de prudence. Nous sommes loin d’un état d’esprit politicien visant à faire trébucher, le temps d’une demi-journée, une position politique claire que la gauche comme la droite ont défendue, à la tête du pays, et qui correspond à la volonté du peuple.

L’épiphénomène médiatique qui consistait à faire adopter une exception d’irrecevabilité n’avait pas de sens s’agissant d’un tel sujet, qui engage plusieurs générations. Il a beau être clivant, il est trop grave : ce sont la sécurité alimentaire, la santé publique et la protection de l’environnement qui sont en jeu.

Les positions prises en commission comme dans cet hémicycle contribuent à soutenir la démarche de la France auprès de nos partenaires européens, laquelle consiste à leur proposer un nouveau cadre communautaire d’autorisation des mises en culture d’OGM. Cela peut paraître accessoire mais cela n’a rien d’anodin. Nous rappelons ainsi qu’une partie de la représentation nationale ne tolère pas qu’une minorité d’États s’arroge, dans les faits, le droit d’autoriser des mises sur le marché d’organismes génétiquement modifiés, au mépris de la position prise par le Parlement européen.

Au-delà des considérations liées aux enjeux européens, qu’ils soient politiques ou juridiques, mais aussi de la position claire du Gouvernement sur le moratoire du MON 810, je voudrais rappeler combien il est important d’inscrire notre proposition de loi dans la dynamique initiée par le Gouvernement pour favoriser le développement de l’apiculture et la lutte contre le déclin des pollinisateurs. Le Président de la République avait d’ailleurs établi ce lien lors de la conférence environnementale de 2012, en évoquant la prévention des risques environnementaux et économiques pour l’apiculture. C’est un enjeu connexe de l’interdiction du MON 810.

Nous savons que les abeilles sont indispensables à la vie de 80 % des plantes cultivées. Nous savons aussi qu’en une seule journée, une abeille butine des centaines de fleurs, sur un rayon de plusieurs kilomètres. Le déclin des pollinisateurs met en danger l’ensemble de la vie végétale pour laquelle les abeilles sont essentielles. Dans ces conditions, il est impératif d’avoir une filière apicole dynamique. C’est l’ambition du Gouvernement d’en assurer l’avenir.

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