Intervention de Frédéric van Roekeghem

Réunion du 17 avril 2014 à 9h30
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Frédéric van Roekeghem, directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés :

La CNSA a été créée il y a une dizaine d'années ; c'est donc une caisse relativement jeune. Elle intervient dans un domaine complexe du fait, à la fois des champs qu'il couvre – le handicap et les personnes âgées – et de la pluralité des acteurs impliqués, dont la CNAMTS fait partie. Si cette dernière entretient de nombreuses relations avec la CNSA, elle ne siège pas, de même que les autres régimes d'assurance maladie obligatoire, en tant que telle au conseil de la CNSA. Ce dernier, aux termes de l'article L. 14-10-3 du code de l'action sociale et des familles, est composé notamment de représentants des organisations syndicales nationales de salariés et de personnalités qualifiées, dont certaines peuvent par ailleurs siéger au conseil d'autres caisses.

La CNSA a été créée, dans un souci de bonne gestion de l'affectation des recettes, pour recevoir le produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie ainsi que, depuis 2013, la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (CASA). Même si ces contributions ont permis de renforcer les politiques en direction des personnes âgées et des personnes handicapées, il ne s'agit néanmoins que de recettes additionnelles : en 2013, sur les 21 milliards d'euros du budget de la CNSA, 17 milliards proviennent de crédits de l'assurance maladie affectés au médico-social et votés dans le cadre de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM).

En tant que principal contributeur au financement, nous assurons un certain nombre de missions, notamment des paiements aux établissements de soins et aux établissements médico-sociaux ; mais la gestion des crédits est prise en charge par la CNSA, et nous n'intervenons guère dans leur affectation. Néanmoins, à la demande du ministère de la santé et des affaires sociales, nous avons reconstitué un département spécialisé dans la remontée de dépenses en vue de mettre à disposition des statistiques exploitables. Dans ce cadre, nous avons notamment développé une application informatique permettant de faire le lien entre la consommation de soins hospitaliers ou de soins de ville et la résidence des personnes âgées en établissement. La CNSA a un projet identique pour les personnes handicapées.

Au titre de ses missions, la CNSA contribue au financement de l'accompagnement de la perte d'autonomie des personnes âgées et handicapées et répartit, selon les besoins des différents établissements, les crédits qui lui sont délégués. Depuis 2005, elle fixe également les dotations régionales limitatives et les répartit en dotations départementales. Pour ce faire, elle produit expertises techniques et propositions permettant d'établir des référentiels médicaux d'évaluation ; comme les autres administrations et institutions concernées, elle participe à l'édification d'indicateurs, d'outils, de recueils de données. Elle a de fait la responsabilité du suivi de l'ONDAM médico-social et de ses sous-enveloppes, qu'elle répartit entre les agences régionales de santé.

Il va de soi que nous intervenons sur le pilotage macroéconomique d'ensemble puisque, chaque année, la loi nous fait obligation de soumettre au gouvernement, dans la perspective du projet de loi de financement de la sécurité sociale, des propositions sur l'évolution de l'ONDAM. Un gros effort a été consenti sur l'ONDAM médico-social, qui a progressé de plus de 50 % sur les six dernières années, pour atteindre, en ce qui concerne la part financée par les crédits de l'assurance maladie, 17 milliards d'euros, répartis à peu près également entre les personnes âgées et les personnes handicapées. Cependant, les politiques de maîtrise des dépenses de l'assurance maladie ont conduit à une décélération importante du rythme d'augmentation de ces dépenses, qui progressent actuellement de 2,9 % pour les personnes âgées et de 3,1 % pour les établissements et services pour personnes handicapées, contre plus de 6 % au début des années 2000. La nécessité de maîtrise de nos déficits publics va renforcer l'exigence de bonne utilisation des ressources consacrées à ces établissements, tandis que se renforceront parallèlement les exigences de qualité desdits établissements, ce qui, compte tenu de leur nombre, nécessitera une organisation dédiée.

Ce sont les directeurs généraux d'ARS qui notifient et autorisent la tarification pour les établissements et services médico-sociaux. Les conseils généraux sont, quant à eux, aux termes des lois de décentralisation, les chefs de file de l'action sociale de proximité, qui représente parfois jusqu'à 50 % du budget du département et qui bénéficie essentiellement aux personnes âgées avec plus de 1,228 million de bénéficiaires de l'APA. Les conseils généraux interviennent par ailleurs sur les budgets et les contrats tripartites.

Nous avons donc affaire à une organisation financière assez complexe, qui implique de multiples acteurs – État, départements, CNSA, CNAMTS et ARS – et qui justifierait sans doute une réflexion globale sur l'efficacité du dispositif.

La loi a prévu la signature d'une convention d'objectifs et de gestion (COG) entre la CNSA et la CNAMTS, motivée notamment par le fait que la création de la CNSA a donné lieu à des transferts de compétences et de personnel entre les deux organismes. Il était primordial, par ailleurs, d'organiser au mieux l'exploitation et le partage des données dont l'une et l'autre caisse disposaient.

De son côté, la CNAMTS détient des données comptables, puisqu'elle paie les établissements à la demande des ARS, ainsi que des données relatives aux personnes, celles-ci étant anonymisées dans le cadre du système national d'information inter régimes de l'assurance maladie (SNIIRAM) étendu au Programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI). Je le disais, nous avons également développé une application nous offrant une meilleure connaissance de la situation des personnes âgées dépendantes en résidence. Dans le cadre de la convention, nous nous sommes donc engagés à échanger ces données afin d'améliorer la connaissance des publics âgés et handicapés, et donc le suivi et l'anticipation de la dépense. En effet, une partie des décisions de la CNSA se traduisant par des créations de places parfois différées dans le temps, il est essentiel d'en maîtriser le pilotage.

En ce qui concerne la gestion des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), la CNSA nous transmet des données relatives au PATHOS moyen pondéré, qui permet d'évaluer la lourdeur des cas pris en charge par l'établissement et de calculer le groupe iso-ressources moyen pondéré (GIR), dont nous tenons compte pour établir la tarification. De notre côté, nous transmettons à la CNSA les données issues des déclarations des résidents d'EHPAD, ce qui permet une analyse de la dépense globale, qu'elle soit médico-sociale ou sanitaire, en établissements de soins ou en ville.

Nous avons également prévu de faire évoluer nos systèmes d'information respectifs pour produire conjointement des indicateurs de gestion de risque applicables aux établissements concernés. Nous avons notamment entrepris, à la demande du gouvernement et de l'IGAS, une étude approfondie sur les coûts, qui n'intègre néanmoins ni les restes à charge au titre de l'hébergement ni les abondements effectués par les départements à travers le financement de l'APA. Le but est de mieux comprendre ce que coûte à chaque bénéficiaire, à la collectivité et, le cas échéant, aux organismes complémentaires, une prise en charge en établissement de soins, afin d'élaborer éventuellement des stratégies alternatives. D'ici dix à quinze ans, les premières générations nées après la guerre vont atteindre l'âge de quatre-vingts ans : c'est un défi majeur qu'il nous faut anticiper, en réfléchissant notamment à un développement de la prise en charge à domicile.

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