Intervention de Charles de Courson

Réunion du 23 avril 2014 à 12h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Messieurs les ministres, j'ai beaucoup de mal à comprendre votre stratégie. Tout d'abord, je ne vois pas la réalité des 50 milliards d'euros d'économies que vous annoncez. En effet, vous raisonnez toujours par rapport à des tendanciels qui remontent à des années pour faire croire que vous faites des économies, mais une bonne part de ces 50 milliards ne sont pas des économies. J'en citerai trois exemples.

En premier lieu, vous annoncez 10 milliards d'économies sur l'assurance maladie. L'an dernier, vous raisonniez sur la moyenne des dix dernières années, soit 4,2 %. Or, ce n'est pas sur les dix dernières années qu'il faut calculer ; c'est sur la moyenne triennale. Un gain de 0,6 point sur les 180 milliards de l'ONDAM représente un bon milliard d'euros et les économies s'élèveront donc à 3 milliards d'euros, et non pas à 10 milliards. J'ai déjà formulé cette observation, mais n'ai obtenu aucune réponse.

Autre exemple : vous annoncez une économie de 18 milliards d'euros sur l'État et ses agences, mais la stabilisation du point d'indice, qui est la première mesure annoncée, n'est pas un tendanciel : ce sera la quatrième année que le point d'indice n'est pas réévalué et il ne s'agit donc pas d'une économie – ce n'en serait une que si vous proposiez de baisser la valeur du point d'indice. Je n'aurai du reste pas la cruauté de vous rappeler les déclarations que vous aviez faites, l'un et l'autre, lorsque nous avions gelé cette valeur en 2011 et 2012 : à tout pécheur miséricorde.

Les collectivités locales sont le seul domaine où les 11 milliards d'euros d'économie annoncés sont réels, car il s'agit bien d'une baisse. Celle-ci portera, selon vos déclarations, sur la seule dotation globale de fonctionnement – DGF –, car la réorganisation territoriale évoquée dans le tableau de la page 5 n'interviendra qu'en 2017 pour les régions et en 2021 pour les départements. Je souligne que cette baisse de 11 milliards d'euros sur 52 milliards représente une baisse d'un peu plus de 20 % en moyenne en trois ans.

En matière de protection sociale, vous annoncez une économie de 11 milliards d'euros par une non-revalorisation exceptionnelle des prestations, hors minima sociaux, pour un an. Or, j'ai cru comprendre que c'était pour deux à trois ans que vous procédiez à cette non-revalorisation – sous peine de ne pas atteindre ces 11 milliards d'euros d'économies. Il serait donc très intéressant que vous indiquiez analytiquement, comme vous l'a demandé souvent la Cour des comptes, où sont les économies – en distinguant les économies réelles des économies virtuelles.

Quant aux dépenses, je les ai présentées sous forme de tableau, en indiquant pour chaque année les déclarations du Premier ministre : pour 2015, 2016 et 2017, on observe une baisse brute de 34,3 milliards d'euros, soit une baisse nette de 30 milliards d'euros. Comment pouvez-vous prétendre réduire le déficit public avec 30 milliards de baisse d'impôts sur ces trois années ?

J'en viens au tableau qui figure à la page 6 du document que vous avez fait distribuer : vous devriez vous inquiéter de l'écart croissant entre le déficit structurel et le déficit réel, qui continue à augmenter en 2015, où il atteint 1,8 point, pour ne se réduire qu'en 2016 et 2017 grâce aux hypothèses de croissance que vous avez choisies – hypothèses « optimistes » selon le Haut Conseil des finances publiques, et très optimistes, voire irréalistes selon moi. Vous n'êtes du reste pas les seuls à calculer ainsi, car tous les gouvernements précédents ont fait de même : selon vous, le retour en deux ans à une croissance de 2,25 % résoudra les problèmes – mais ce ne sera pas le cas.

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