La Commission entend, en audition ouverte à la presse, MM. Michel Sapin, ministre des Finances et des comptes publics, et Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du Budget, sur le programme de stabilité 2014-2017.
L'article 14 de la loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 prévoit que le Parlement débatte du projet de programme de stabilité et se prononce par un vote. Un débat, suivi d'un vote, se tiendra mardi prochain, le 29 avril. Le programme de stabilité sera ensuite transmis très rapidement à la Commission européenne.
Notre Commission a reçu ce matin M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, en tant que président du Haut Conseil des finances publiques, lequel a eu à donner un avis sur les prévisions macroéconomiques de ce programme de stabilité que vous lui avez transmis voilà quelques jours. M. Migaud nous a confirmé que, dans le cadre de l'examen du projet de loi de règlement du budget de l'année 2013, qui sera transmis fin mai, le Haut Conseil devra probablement constater un écart par rapport à la trajectoire fixée par la précédente loi de programmation pluriannuelle. Cet écart dépassant le seuil de 0,5 % du produit intérieur brut – PIB – au titre de l'exécution de 2013, le Haut Conseil demandera la mise en oeuvre de mesures correctrices.
Je veux commencer par saluer Mme Valérie Rabault, la nouvelle rapporteure générale, et par vous remercier de votre accueil au sein de cette Commission, que j'ai quittée voilà deux ans.
Ce matin, le Conseil des ministres a adopté le programme de stabilité, qui fixe la feuille de route pour la conduite de nos finances publiques pour les trois prochaines années et traduit, dans une trajectoire cohérente de croissance, de recettes et de dépenses, le pacte de responsabilité et de solidarité et les efforts d'économie détaillés la semaine dernière par le Premier ministre. Ce programme traduit, avec le programme national de réforme qui l'accompagne, la stratégie économique du Gouvernement, stratégie responsable qui vise à plus de croissance et d'emplois.
Il s'agit de rendre notre économie plus forte et, en même temps, d'assurer la capacité de la France à peser en Europe. Les deux sont liés, car une France affaiblie et isolée serait une France vulnérable, qui ne serait pas en situation de se faire entendre – y compris sur des sujets que l'Europe comme la France ont intérêt à faire avancer, comme celui de la valeur de l'euro.
Voilà pourquoi nous devons nous battre sur deux fronts en même temps et poursuivre notre travail de redressement économique tout en assumant pleinement nos engagements d'assainissement des comptes publics. Cette double stratégie a été unanimement comprise et saluée par des interlocuteurs auxquels j'ai expliqué, notamment la semaine dernière à Washington – et certes avec bien moins de détails que je ne le fais aujourd'hui devant vous – les logiques de ce pacte de responsabilité et de ce programme de stabilité. C'est la voie de la responsabilité et c'est celle qu'ont choisie le Président de la République et le Premier ministre.
Elle consiste d'abord à renforcer notre économie en gagnant en efficacité et en compétitivité, parce que c'est évidemment la meilleure contribution à la croissance et à l'emploi, et donc au pouvoir d'achat de tous, de manière durable et profonde, tout en faisant des efforts ciblés pour le pouvoir d'achat des plus modestes afin de répondre à l'urgence sociale. Elle consiste parallèlement, afin de crédibiliser l'ensemble, à poursuivre le redressement de nos comptes publics pour regagner des marges de manoeuvre et faire baisser la dette publique tout en en assurant le financement de nos priorités.
Cette double priorité s'explique d'abord par l'impératif de croissance. En 2013, le PIB français était quasi identique à celui de 2008 – environ 2 000 milliards d'euros. Pour la première fois depuis 1945, notre pays – comme du reste l'Europe – a en effet connu une croissance nulle pendant cinq ans, ce qui provoque des dégâts considérables tant pour le tissu économique et industriel que pour les finances publiques et la société, avec une considérable montée du chômage.
Nous sommes au moment crucial où la croissance manifeste une reprise timide, mais réelle. L'année 2013 s'est en effet achevée avec une croissance de 0,3 %, là où certains la prévoyaient quasi nulle, voire négative. Pour 2014, nous avions tablé sur une croissance de 0,9 %, tandis que le Fonds monétaire international – FMI – et la Commission européenne prévoient un chiffre de 1 %. Nous avons donc revu notre prévision en ce sens et retenu cette dernière hypothèse, que le Haut Conseil des finances publiques considère comme solide, réaliste et non susceptible d'être remise en cause par des tendances baissières. Les dernières informations dont nous disposons témoignent de l'amélioration en cours, avec des signes encourageants dans l'industrie par exemple. Mais 1 % de croissance, c'est insuffisant pour réparer le tissu productif, redresser nos finances publiques et lutter en profondeur contre le chômage de masse que nous connaissons. Il faut donc faire plus, et plus vite, pour permettre de retrouver plus d'emplois.
Pour gagner en croissance et en emplois, nous construisons sur ce qui a déjà été voté par le Parlement. Je pense à cet égard au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – CICE –, que les chefs d'entreprise, après l'avoir, dit-on, trouvé compliqué l'année dernière, commencent à apprécier maintenant qu'il commence à être versé – il devrait l'être à toutes les entreprises bénéficiaires d'ici au 15 mai prochain. Je pense aussi aux mesures de simplification qui ont commencé à être mises en oeuvre, comme celle relative aux obligations comptables des petites et moyennes entreprises – PME – et des très petites entreprises – TPE.
Mais nous avions besoin de manière cruciale d'une nouvelle étape, d'une accélération, de faire plus pour aller plus vite : c'est le pacte de responsabilité et de solidarité, qui devrait nous permettre de rehausser l'activité d'un demi-point à l'horizon 2017 et de générer ainsi près de 200 000 emplois supplémentaires, selon les calculs des organismes de prévision de notre ministère. Ce pacte intervient à un moment décisif pour notre économie, celui du basculement d'une croissance zéro vers une croissance plus forte, compatible avec les besoins de notre économie et de notre pays – plus de croissance, plus d'emplois, plus de confiance, plus d'espoir.
Cette stratégie de croissance résulte d'une analyse lucide de notre situation.
Nous souffrons d'un problème de compétitivité de l'économie française, beaucoup plus que d'un problème de demande intérieure – je sais que ces propos peuvent faire débat, mais je suis prêt à le dire clairement et précisément. L'aggravation du déficit courant français en est la parfaite illustration, qui reflète l'évolution maîtrisée des coûts salariaux unitaires chez nos concurrents directs. De ce point de vue, l'instauration d'un salaire minimum en Allemagne est une bonne chose pour notre économie.
Parallèlement, l'économie européenne – et la France en particulier – souffre du niveau trop élevé de l'euro. L'euro ne doit pas être notre excuse pour ne pas nous réformer. Rappelons-nous que nos premiers compétiteurs sont des pays qui partagent cette monnaie avec nous. Mais il est évident qu'un euro trop fort à un moment où l'économie est faible pèse sur la reprise de l'activité, pour nos partenaires comme pour nous. C'est bien ce qu'a relevé de manière tout à fait inédite M. Mario Draghi en indiquant qu'une action de la Banque centrale européenne – BCE – pourrait être nécessaire si l'appréciation de l'euro se poursuivait. Lorsqu'on connaît les subtilités du langage d'un banquier central, on peut mesurer la force de ces propos. La BCE est donc prête désormais à injecter des liquidités pour faire repartir le crédit et la croissance.
C'est une chance que nous devons saisir. Mais pour que chacun joue le jeu au niveau européen, encore faut-il que nous sachions tenir nous-mêmes nos engagements et, sur ce point, le constat est clair : c'est notre capacité à redresser nos finances publiques et à poursuivre les réformes en profondeur de l'économie et de la société françaises qui assoit notre crédibilité.
Un deuxième élément est la nécessité de poursuivre la réduction de nos déficits, qui résulte d'une analyse lucide de nos faiblesses.
L'endettement de la France représentait 60 % du PIB en 2002, puis 65 % en 2007, 90 % en 2012 et 93 % en 2013. C'est un niveau considérable. C'est aussi la conséquence de l'ensemble de ces années, que chacun pourra ainsi juger dans leur continuité. L'évolution du déficit public depuis 2012, bien qu'étant passé de 5,3 % du PIB en 2011 à 4,3 % en 2013, soit une diminution de 1 point, n'a pas encore permis de réduire la dette.
Nous avons fait un effort sans précédent en 2013, où nous avons tenu la norme de dépenses des précédents projets de lois de finances et avons même réussi à moins dépenser que prévu pour l'État et pour la santé. Il faut donc continuer de réduire les déficits d'ici à 2017 en visant, pour 2015, un objectif de déficit nominal de 3 %.
Pourquoi 3 % ? Cette question peut susciter des débats, qui ne datent d'ailleurs pas d'aujourd'hui. Il ne s'agit pas de fétichisme, et encore moins de soumission, mais chacun sait que, dans des conditions de croissance qui sont celles que nous souhaitons retrouver, c'est en repassant sous ce seuil que nous pourrons d'abord stabiliser la part de la dette publique dans la richesse nationale, puis la faire diminuer. C'est là un enjeu de crédibilité pour peser en Europe.
C'est vrai pour la zone euro, qui continue de trouver les moyens d'être plus solide, comme on le voit encore aujourd'hui lorsque la Grèce et le Portugal recourent aux marchés pour financer leurs besoins. C'est la bonne manière de résister aux crises, dont nous voyons le coût économique et social, comme c'est le cas depuis juin 2012 avec le projet d'Union bancaire qui est là aussi pour assurer la reprise en Europe.
C'est aussi un objectif essentiel pour garder des taux d'emprunt bas pour la France – cela vaut pour les entreprises, les ménages, les collectivités locales et l'État : un demi-point de taux d'intérêt en plus sur la dette française représenterait 10 milliards d'euros de charges supplémentaires pour le remboursement de la dette pour le seul État. Autant dire qu'une moindre crédibilité, même limitée, pourrait effacer en quelques semaines des années entières d'économies et d'efforts consentis par les Français. Une hausse des taux d'intérêt, ce serait moins d'investissement des entreprises et des ménages. Ce serait aussi un mauvais coup pour l'emploi. De tout cela, nous ne voulons pas. Derrière l'objectif de réduction des déficits, il y a donc aussi un objectif en termes d'emplois.
C'est au nom de ce même objectif d'emploi et de croissance que nous proposons de ne pas augmenter les impôts au cours des années 2015, 2016 et 2017. Les mesures économiques qui vous sont présentées sont, pour les trois ans à venir, intégralement gagées par un effort sans précédent d'économies budgétaires : 50 milliards d'euros par rapport à la tendance, ce n'est pas une dépense qui baisse, mais c'est un réel effort – une dépense qui augmente quasiment comme l'inflation lors des trois prochaines années et non plus entre 1 % et 2 % au-dessus comme nous l'avons connu depuis plusieurs années ; une dépense de l'État qui augmentera un peu moins que l'inflation, ce qui nécessitera des efforts de chacun. Au total, nous ramènerons les prélèvements obligatoires à 45,3 % en 2017 en ayant retrouvé le chemin d'une dette publique compatible avec la préservation de notre modèle social.
C'est la première fois qu'un mouvement d'une telle ampleur est engagé. Là où, depuis trente ans, on n'a cessé de céder à la facilité consistant à financer les mesures nouvelles par des hausses d'impôts, nous proposons, quant à nous, des économies et des redéploiements. Nous proposons un effort réaliste, réparti équitablement entre l'ensemble des administrations publiques et en cohérence avec les priorités d'avenir que nous voulons mettre en oeuvre. Sont ainsi évidemment préservées toutes les dépenses d'avenir, qu'il s'agisse de la formation des jeunes ou des investissements de recherche et d'innovation.
Cela suppose évidemment des réformes en profondeur, car on n'atteint pas le niveau de 50 milliards d'économies par une simple politique de rabot et d'échenillage. Derrière chacune des économies de dépenses qui vous sont présentées, il y a des réformes dans la façon dont les services publics sont rendus aux Français.
Cela vaut pour l'État – des redéploiements importants sont en cours et le nombre d'agences de l'État sera réduit.
Cela vaut pour les collectivités territoriales, dont nous ramenons la progression de la dépense au rythme de l'inflation avec la réforme territoriale annoncée par le Premier ministre – et je pense, dès cette année, à la suppression de la clause générale de compétence ou à la rationalisation des syndicats intercommunaux.
Cela vaut bien sûr aussi pour l'assurance maladie où, dans le cadre de la stratégie nationale de santé, 10 milliards d'euros d'économies seront réalisés en réorganisant par exemple les parcours de soins – travail qui a commencé et a déjà produit beaucoup d'effets positifs – ou en généralisant davantage le recours aux génériques ou à la chirurgie ambulatoire. Et cela, bien entendu, sans jamais réduire la prise en charge des soins, ni leur qualité.
Il y a évidemment une exigence dans les décisions annoncées : c'est la préservation de notre modèle social et républicain ; c'est la justice ; c'est la protection du pouvoir d'achat des Français, notamment des plus modestes.
Contrairement à la plupart de nos partenaires européens, nous avons écarté les baisses de prestations. L'effort sera partagé ; le niveau des pensions et des prestations sera maintenu. Certes, beaucoup de Français ne bénéficieront pas cette année d'une revalorisation. Nul ne peut sous-estimer qu'une telle décision peut provoquer des difficultés. De cet effort, nous exonérerons les plus modestes, car les minimas sociaux continueront d'être revalorisés.
De même, les fonctionnaires, qui ont déjà fait beaucoup d'efforts, contribueront encore à l'effort, mais les avancements seront préservés. Grâce à ces avancements et au glissement vieillesse technicité – GVT –, le pouvoir d'achat des personnels en place, maintenu ces dernières années en dépit du gel, pourra aussi évoluer.
Voilà le plan d'économies sur trois ans que le Premier ministre a présenté et qui sous-tend le programme de stabilité qui vous est soumis.
Nous savons qu'il s'agit d'une stratégie exigeante, qui demande du courage de la part de tous, mais elle est à la mesure des enjeux. Elle doit nous rassembler, au-delà des débats légitimes dans une démocratie et dans un Parlement comme les nôtres, car elle vise à préparer un avenir au pays. Elle ne sacrifie pas les générations futures par l'accumulation des dettes ; elle redonne du dynamisme à notre économie et replace la France au coeur de l'Europe. Chacun a conscience, ici et à l'extérieur, de ce moment décisif. Si nous agissons comme nous le proposons, c'est une reprise réelle qui pourra être perçue par la France – une reprise au niveau de nos capacités, car la France est pleine de ressources, d'intelligence, de capacités d'innovation et d'investissement. Une reprise aussi au niveau de nos besoins pour combattre l'endettement de notre pays et pour lutter en profondeur contre le chômage par la création d'emplois dans le secteur privé.
Je me réjouis, moi aussi, de l'élection de Mme Valérie Rabault, première femme à occuper le poste de rapporteur général de la commission des Finances – un poste dont le président Gilles Carrez et moi-même connaissons la difficulté. Mme Rabault a déjà démontré de grandes qualités de travail et je garde en mémoire, comme sans doute bon nombre d'entre vous, la clarté et le caractère pédagogique de la présentation de son avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Tout cela est de bon augure pour un travail en commun. J'ai pour ma part plaisir à me retrouver devant votre Commission, dont je connais les exigences – lesquelles, je le sais aussi, peuvent être déçues, notamment en termes d'organisation, de calendrier et de communication.
C'est d'ailleurs le cas aujourd'hui, car la nomination d'un nouveau gouvernement, le calendrier qui nous est imposé, avec des délais incontournables compte tenu de nos partenaires européens et des procédures applicables, ainsi que l'urgence économique de certaines décisions nous ont empêchés d'être parfaits à cet égard. J'espère que nous aurons pour les prochains textes, notamment pour la loi de finances rectificative qui se profile pour la fin juin ou le début juillet, des calendriers plus respectueux des temps de débat et d'organisation.
Je voudrais apporter quelques précisions à l'intervention très complète de Michel Sapin, et d'abord s'agissant du plan d'économies de 50 milliards d'euros annoncé par le Premier ministre. Cette volonté de mobiliser les économies en dépenses après avoir privilégié les hausses de prélèvements obligatoires en début de législature n'est pas nouvelle, car la loi de programmation des finances publiques adoptée au début de cette législature contenait cette évolution : la répartition comportait au début plus de recettes et moins d'économies, et devait être suivie d'une inversion de la tendance – c'est du reste aujourd'hui plus qu'une inversion car, comme vient de le dire le ministre des Finances, il n'y aura pas d'augmentation d'impôts.
La loi de finances pour 2014 prévoyait déjà la réalisation de 15 milliards d'euros d'économies. Pour les années 2015 à 2017, la trajectoire de finances publiques détaillée dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2014 anticipait ce montant d'économies de 50 milliards d'euros.
Nous nous inscrivons donc dans la continuité de la stratégie budgétaire suivie depuis 2012 et, dans ce domaine, nous savons que seule une action résolue menée dans une perspective de moyen terme peut donner des résultats durables.
Je souligne immédiatement – car je sais, monsieur le président Carrez, que nous aurons ce débat – que le montant d'économies ainsi présenté correspond à un écart avec la progression tendancielle de la dépense publique. Mais j'anticipe également certains commentaires en soulignant que ce montant d'économies permettra, à l'horizon 2017, une baisse marquée du poids de la dépense publique dans le PIB, supérieure à 3 points, ramenant la part de la dépense publique dans le PIB à 53,5 % après un sommet de 57,1 % atteint en 2013.
Les économies que nous proposons permettront un ralentissement sans précédent du rythme de la dépense, quasiment égal à une stabilisation en volume, soit une progression limitée à l'inflation : la prévision de croissance annuelle en volume de la dépense s'établit à 0,1 % sur la période 2015-2017.
Ce programme est équitable. Toutes les administrations contribueront à l'effort en tenant compte de leur poids dans la dépense publique, mais aussi, dans chaque secteur, de la dynamique des dépenses et de la réalité des économies possibles.
L'État et ses agences prendront toute leur part dans cet effort, avec un montant total d'économies de 18 milliards d'euros entre 2015 et 2017, soit 36 % des efforts proposés, pour un poids dans la dépense publique de l'ordre de 40 %.
Quelques précisions sur la procédure qui sera suivie pour déterminer ces économies. Conformément à la procédure budgétaire rénovée et anticipée qui a été mise en place début 2014, des premiers échanges entre ministres et entre services ont eu lieu depuis le mois de février pour expertiser les économies structurelles, parallèlement aux travaux du Conseil stratégique de la dépense publique réuni sous l'autorité du Président de la République. Comme il l'a annoncé, le Premier ministre devrait faire parvenir à l'ensemble des ministres, au début du mois de mai, une lettre de cadrage. Des discussions se tiendront sur cette base dans le cadre plus classique des conférences budgétaires, pour aboutir à la fin du mois de juin aux lettres plafonds qui détermineront le volume de crédits accordé à chaque ministère pour la période 2015-2017.
Comme il est d'usage, ces plafonds par mission, pour chaque année du triennal, seront portés à votre connaissance lors du débat d'orientation des finances publiques. Ils feront l'objet d'un article de la future loi de programmation des finances publiques et le montant des crédits pour 2015 sera bien entendu fixé par la loi de finances pour 2015 que vous examinerez à l'automne.
Les dépenses des ministères diminueront en valeur. Comme Michel Sapin vient de l'indiquer, les économies que nous proposerons sur le budget de l'État seront fondées sur des réformes de structure : optimisation des fonctions support – immobilier, achats et informatique notamment –, rationalisation de l'organisation des agences, recentrage des interventions. Les opérateurs prendront également leur part à l'effort après la forte croissance de leurs dépenses constatée entre 2007 et 2012. Les effectifs de l'État resteront stables, la poursuite des créations d'emplois dans l'éducation nationale, la sécurité et la justice étant compensée par une poursuite des efforts dans les autres ministères.
La réalisation d'économies poursuit bien entendu un objectif budgétaire, mais elle est également un levier puissant de modernisation de l'action publique. Inversement, sans réformes, il serait impossible de respecter notre trajectoire budgétaire.
C'est le cas pour l'État, comme je viens de l'évoquer, mais aussi pour le secteur public local et l'assurance maladie.
La diminution des dotations aux collectivités territoriales par rapport à l'évolution tendancielle, de 11 milliards d'euros sur trois ans, sera ainsi accompagnée de réformes importantes évoquées par le Premier ministre dans son discours de politique générale.
La baisse des dotations devrait conduire la dépense locale à croître à un rythme proche de l'inflation jusqu'en 2017. Nous demandons donc aux collectivités locales un effort réel de stabilisation en volume de leurs dépenses, mais néanmoins inférieur à celui auquel l'État sera soumis avec la baisse en valeur des dépenses des ministères. L'effort ainsi porté par les collectivités est proportionnel également à leur poids dans la dépense, le secteur local représentant un peu plus d'un cinquième de celle-ci.
S'agissant de l'assurance maladie, les économies s'inscriront dans le cadre de la stratégie nationale de santé, qui a déjà porté ses fruits au cours des derniers mois. Par exemple, nous soutiendrons le développement de la chirurgie ambulatoire, dont le taux de recours reste très variable selon les établissements. Nous rationaliserons la consommation de médicaments. Vous examinerez les propositions du Gouvernement dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, qui fixera le taux de progression de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie – ONDAM –, soit 2 % par an en moyenne de 2015 à 2017, contre une croissance moyenne de l'ordre de 3 % par an depuis 2008.
Le niveau de protection des assurés sera préservé : il n'y aura pas de nouvelles franchises, pas de déremboursements de soins, pas de report de l'âge légal de départ à la retraite, pas de remise en cause du dispositif de départ anticipé en retraite pour les carrières longues.
Tout en poursuivant l'assainissement budgétaire, nous accentuons nos efforts en faveur de la croissance et de l'emploi : c'est le pacte de responsabilité et de solidarité exposé par Michel Sapin.
Je compléterai cette présentation par une indication sur la montée en charge du pacte et le détail des mesures envisagées pour favoriser les créations d'emplois.
Le pacte de solidarité sera immédiatement mis en oeuvre. Dès 2014, une mesure d'allégement de l'impôt sur le revenu en faveur des ménages modestes et moyens vous sera proposée dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de cet été, pour un montant de 500 millions d'euros.
Dès 2015, un allégement de cotisations salariales au bénéfice des salariés dont la rémunération est comprise entre 1 et 1,3 SMIC sera mis en oeuvre, ce qui représentera un gain de 500 euros par an pour un salarié au SMIC – ces salariés sont particulièrement nombreux dans les plus petites de nos entreprises.
Le pacte de responsabilité montera en charge progressivement, avec une priorité à la mise en oeuvre des mesures les plus créatrices d'emplois.
S'agissant de l'allégement du coût du travail, aucune cotisation ne sera plus versée aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales – URSSAF – par un employeur pour un salarié au SMIC – niveau de salaire pour lequel l'impact sur l'emploi est le plus important : c'est la raison pour laquelle cet allégement sera mis en oeuvre dès 2015.
Par ailleurs, un allégement de 1,8 point des cotisations famille est prévu pour les salaires compris entre 1,6 et 3,5 SMIC. Cette mesure complétera l'effort entrepris avec le CICE en faveur des entreprises exportatrices et, plus particulièrement, des entreprises industrielles.
La distinction de l'allégement de cotisations entre entreprises de plus de 20 salariés et de moins de 20 salariés sera supprimée. Il s'agit donc là non seulement d'un effort supplémentaire concentré sur les salariés peu qualifiés, et donc très favorable à l'emploi, mais également d'une mesure de simplification.
L'effort en faveur du coût du travail sera augmenté de 1 milliard d'euros du fait d'un allégement de 3 points des cotisations famille en faveur des travailleurs indépendants dont les revenus sont inférieurs à 3,5 SMIC.
Concernant la fiscalité des entreprises, un effort particulier sera réalisé pour soutenir l'investissement en France.
La contribution sociale de solidarité sur les sociétés – C3S – disparaîtra progressivement, pour être complètement supprimée en 2017 : c'est là une évolution qui profitera particulièrement aux entreprises industrielles. Cette mesure prendra la forme, dans sa première phase, d'un abattement sur les contributions pour toutes les entreprises. Elle permettra d'alléger prioritairement les contributions des plus petites entreprises, voire de faire progressivement disparaître la C3S pour les entreprises par une montée en charge de ce principe d'abattement.
Enfin, comme l'a annoncé le Premier ministre, un mouvement de baisse du taux de l'impôt sur les sociétés – IS – sera amorcé à partir de 2017.
Nous avons entamé l'assainissement budgétaire dans un contexte macro-économique difficile et nous avons obtenu des résultats : le déficit nominal a diminué de près de 1 point entre 2011 et 2013 et le déficit structurel a diminué de plus de 2 points, pour atteindre 2,9 % du PIB en 2013, soit son niveau le plus bas depuis 2001. Il est essentiel de le rappeler, car les Français doivent être persuadés que les efforts qu'ils ont consentis payent et que la situation de nos finances publiques est en amélioration.
Le contexte macro-économique difficile est un aléa qui conditionne la réalisation de la trajectoire des finances publiques que nous prévoyons dans le programme de stabilité.
Si l'économie évolue comme nous l'anticipons – le Haut Conseil des finances publiques n'a pas contredit ces hypothèses –, le déficit public nominal devrait être de l'ordre de 3 % en 2015 et la dette publique serait alors stabilisée, avant – nous l'espérons – d'entamer sa nécessaire décrue.
Avec cette trajectoire, le Gouvernement propose donc de poursuivre et d'amplifier la politique économique et budgétaire menée depuis le début de la législature. Dans le projet de loi de finances rectificative, certaines mesures d'économies pourraient être anticipées dès le budget 2014, pour un volume de l'ordre de 4 milliards d'euros. Toutes les économies réalisées en 2014 seront récurrentes en 2015, 2016 et 2017, et permettront d'assurer la soutenabilité et la bonne exécution du programme que je vous ai proposé. Je souhaite donc que votre Commission, avant l'Assemblée nationale la semaine prochaine, soutienne ces orientations.
Nous travaillons dans des conditions difficiles, car nous venons de découvrir ce programme de stabilité. Il n'est donc pas facile d'en examiner les détails aujourd'hui, mais nous aurons le temps d'en approfondir les différents aspects avant le débat de mardi prochain. Je suppose, messieurs les ministres, que vos services, votre cabinet et vous-mêmes serez à notre disposition pour nous apporter les éclaircissements nécessaires.
Ma première question portera sur notre programme de travaux pour les prochains mois. En effet, le programme de stabilité est le premier document financier qui prenne en compte les résultats de 2013. Or, à l'automne 2012, lorsque nous avons discuté ensemble la loi de programmation pluriannuelle, le Gouvernement avait prévu pour 2013 un déficit public de 3 %. En mars-avril 2013, à l'occasion d'ailleurs de la discussion du programme de stabilité, ce chiffre a été corrigé à la hausse et porté à 3,7 % ; puis il a été à nouveau relevé à 4,1 % à l'automne 2013, lors de la préparation de la loi de finances pour 2014. Ce dernier chiffre a été confirmé lors de l'examen de la loi de finances rectificative à la fin de 2013. En établissant des comptes définitifs, l'INSEE a ensuite fait état, le mois dernier, d'un solde de 4,3 %.
Nous allons donc constater, aux termes de la loi organique de 2012, un écart supérieur à 0,5 point de PIB, ce qui implique des mesures correctrices, lesquelles peuvent donner lieu à plusieurs documents et à plusieurs débats. Tout d'abord, nous devrions procéder, fin mai, à l'examen d'une loi de règlement pour 2013. Or, le Premier ministre a annoncé pour la fin juin l'examen d'une loi de finances rectificative. Par ailleurs, la loi de programmation pluriannuelle de 2012 étant caduque, elle devra être corrigée : la nouvelle loi de programmation pluriannuelle, conforme au programme de stabilité, sera-t-elle élaborée aux mois de juin et juillet, en même temps que la loi de finances rectificative, ou à l'automne, lors de la présentation des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 ? Plus précisément encore, les mesures de correction qui doivent être prévues sont-elles programmées dans le cadre du collectif, qui est la plus prochaine loi de finances, ou renvoyées aux lois de finances et de financement pour 2015 ?
Ma deuxième question, essentielle, porte sur votre hypothèse d'évolution de la dépense publique en tendance. De fait, les économies proposées à hauteur de 50 milliards d'euros sur les trois années 2015, 2016 et 2017 sont en réalité calculées par rapport à une tendance. Il est plus clair à cet égard de raisonner en valeur absolue qu'en inflation : la dépense publique globale a augmenté, en 2013, de 23,5 milliards d'euros par rapport à 2012 – il s'agit là non pas de prévision, mais d'exécution. Prenez-vous pour hypothèse de tendanciel, toutes dépenses publiques confondues, une augmentation annuelle de 20, 25 ou 30 milliards d'euros ? Le chiffre retenu fera en effet une grande différence : l'économie de 50 milliards d'euros se comprend en effet au regard d'une augmentation tendancielle de 60 milliards d'euros, ce qui signifie que la dépense publique augmentera de 10 milliards d'euros en valeur courante entre 2015 et 2017.
Enfin, vous avez évoqué, monsieur le secrétaire d'État, un ensemble de mesures de baisse de prélèvements, dont il faut d'ailleurs se réjouir, prises essentiellement en faveur des entreprises. L'augmentation du CICE – 10 milliards d'euros –, la suppression des cotisations famille pour les salaires du niveau du SMIC puis, d'ici à 2017, jusqu'à 3,5 SMIC, la suppression d'ici à 2017 de la C3S, qui représente à elle seule 5,5 milliards d'euros, la disparition de la surtaxe à l'IS, à quoi s'ajoutent les 5 milliards de baisse d'impôts pour les ménages les plus modestes par le biais notamment de l'allégement de cotisations sociales salariales, tout cela donne un ensemble net d'impôts de l'ordre de 25 milliards d'euros, voire un peu plus. Or, comme vous l'indiquez à la page 4 du programme de stabilité, à propos de ce programme de baisse d'impôts que vient d'annoncer le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, « parallèlement, la France confirme son engagement de tenir le déficit à 3 % du PIB et concrétise l'effort d'économies de 50 milliards d'euros auquel elle s'est engagée ». Cela signifie que ces 50 milliards d'euros d'économies, qui serviront certes à assurer la trajectoire et le financement du CICE à hauteur de 20 milliards d'euros, ne peuvent pas avoir pour contrepartie les nouvelles annonces de baisses d'impôts destinées aux entreprises et aux ménages les plus modestes. D'où ma question : comment seront financés ces 20 à 30 milliards d'euros de baisses d'impôts supplémentaires d'ici à 2017 ?
Messieurs les ministres, vous avez rappelé que la Commission européenne allait examiner ce programme, mais il est de mon devoir de rappeler, à quelques semaines des élections au Parlement européen, que la Commission européenne n'est pas seule à décider et que vos propositions doivent également être examinées à l'aune du ressenti de nos concitoyens. Le FMI répète quant à lui depuis deux ans que la politique d'austérité menée par la Commission européenne n'est pas forcément une bonne chose. La France n'a-t-elle pas de nos jours, plus encore qu'auparavant, un rôle à jouer pour proposer à l'Union européenne un nouveau modèle de société reposant sur une plus grande solidarité et manifestant la volonté de faire des choses différentes ?
En outre, la crise ukrainienne révèle la fragilité de l'approvisionnement en énergie de l'Union européenne : peut-être est-il temps de nous interroger sur l'énergie et sur le plan climat-énergie à l'échelle européenne. En tant qu'écologiste, je me permets de le rappeler, même si ce n'est pas tout à fait là le débat du jour.
Compte tenu des inquiétudes de nos concitoyens, dans la conjoncture actuelle, vos scénarios macro-économiques ne sont-ils pas trop généraux encore ? En particulier, les effets d'entraînement de la politique de l'offre seront-ils vraiment au rendez-vous ? Nombreux sont ceux de nos concitoyens qui comprennent mal que ce pacte de responsabilité et de solidarité ne cible pas uniquement les PME et PMI, et que les multinationales puissent être tout aussi avantagées.
Quant à la ventilation des économies de 50 milliards entre l'État, les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale, elle pourrait être encore précisée. Ainsi, les régions devraient gérer directement une bonne partie de la manne fournie par les fonds européens. Pourriez-vous nous apporter une clarification à ce propos ?
Ne pourrait-on, par ailleurs, s'inspirer des exemples européens positifs – comme, de celui de l'Allemagne dans le domaine de la politique du médicament, où d'importantes économies d'échelle ont été réalisées en délivrant les doses de médicaments à l'unité ?
Comment, enfin, pouvons-nous dire que nous serons au service de ceux qui ont les revenus les plus modestes alors que certains évoquent une possible remise en cause du SMIC et que la pauvreté augmente dans certains États – je pense à l'Allemagne ?
À la page 20 du document présentant le programme de stabilité, il est indiqué que le contentieux relatif aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières – OPCVM – nous coûtera l'an prochain 1,8 milliard d'euros, soit à peu près le montant correspondant au gel projeté, jusqu'à octobre 2015, d'un certain nombre de prestations. En mai dernier, la Cour des comptes signalait que les conséquences financières de ce contentieux avaient été aggravées par le relèvement, fin 2011, du taux de la retenue à la source sur les dividendes de source française versés à des OPCVM non résidents. Il est très regrettable que de tels contentieux pèsent aujourd'hui sur le budget de l'État.
Par ailleurs, on lit page 41 que l'assistance à l'Irlande se traduit pour la France par un montant de 1,2 milliard d'euros supplémentaire de dette en 2014, alors même que ce pays est sorti du programme d'aide de l'Union européenne. Pourquoi l'impact de cette aide sur la dette française est-il passé de 2,6 à 3,8 milliards d'euros entre 2013 et 2014 ?
En troisième lieu, comment la montée en charge du programme de responsabilité, soit un montant de 46 milliards d'euros, se décompose-t-elle entre 2015, 2016 et 2017 ?
Enfin, le modèle économétrique de simulation et d'analyse générale de l'économie – MESANGE –, qui doit permettre de mesurer les impacts du pacte de responsabilité en termes de création de richesse et d'emplois, a-t-il aussi été employé pour évaluer les gels prévus et des ajustements peuvent-ils être envisagés ?
Ma question portera sur les mesures de justice sociale prévues dans ce programme de stabilité. Je tiens auparavant à saluer la clarté et la fermeté des propos tenus par MM. les ministres, ainsi que la cohérence et le courage de la stratégie proposée.
Dans la situation économique, sociale et politique actuelle, la première chose qu'attendent les Français de leurs responsables est la vérité sur la situation du pays. Nous partageons à la fois le diagnostic de ce programme de stabilité et la priorité essentielle qu'il donne à la croissance et à l'emploi, sachant qu'il n'y aura pas de retour de la croissance sans redressement des finances publiques, ni de redressement des finances publiques sans retour de la croissance.
Ce programme présente un double enjeu. Le premier est de responsabilité et de crédibilité. Madame la présidente Auroi, une réorientation de l'Europe est nécessaire et la France doit y contribuer. Pour peser, notre pays doit être crédible et mettre de l'ordre dans ses affaires. Nos partenaires européens ont, pour beaucoup, fait des efforts, parfois excessifs, qui ont entraîné des conséquences en termes de croissance. Nous devons faire ces efforts, qui nous permettront, après les élections européennes et avec les membres de la Commission européenne, de faire les avancées nécessaires sur l'euro et sur la stratégie de croissance et d'investissement que doit conduire l'Europe.
Le problème de crédibilité se pose aussi à l'échelle nationale, compte tenu des résultats des dernières élections. Chacun doit y réfléchir, à droite comme à gauche. Nos concitoyens attendent des résultats et estiment que, pour cela, il faut donner la priorité à la maîtrise de la dépense. Ils ne supportent plus ces augmentations de prélèvements obligatoires, qui sont continues depuis trente ans et se sont accélérées à partir de 2011. Cette situation exige des réformes de structure.
L'autre enjeu est d'efficacité et ce que vous proposez est une ligne de crête qui doit être impérativement tenue. Le président du Haut Conseil des finances publiques, que nous venons d'entendre, a exprimé un avis très utile et très pédagogique, indiquant que les hypothèses macro-économiques sur lesquelles est bâti ce programme de stabilité sont réalistes et crédibles, même si elles sont optimistes pour l'avenir – mais aucun gouvernement ne parierait sur l'échec de sa politique. Cet avis montre bien les risques que présentent des programmes d'ajustements trop brutaux, car le Haut Conseil s'interroge sur les effets de la consolidation budgétaire. Le président Didier Migaud nous a cependant indiqué aussi que l'absence de consolidation budgétaire aurait peut-être des effets plus négatifs encore.
Trois aspects doivent donc être impérativement maintenus. Le premier est cette consolidation budgétaire à hauteur de 50 milliards d'euros. Il ne peut y avoir de scénario alternatif qui n'intégrerait pas cet objectif et l'on ne pourra réaliser ces économies qu'en réalisant des réformes de structure – nous aurons l'occasion d'en parler dès le débat sur le prochain projet de loi de finances initiale, mais il est clair que la politique du coup de rasoir trouvera très rapidement ses limites.
Le deuxième aspect est celui de la compétitivité des entreprises. Je m'associe de ce point de vue aux questions posées par la rapporteure générale sur le calendrier exact. Des politiques de demi-mesures ne seraient pas les plus efficaces et un effort rapide est attendu en la matière.
Le troisième aspect important est celui de la justice sociale. Nos concitoyens ont beaucoup souffert des mesures d'augmentation des prélèvements obligatoires prises ces dernières années, en particulier par vos prédécesseurs sous le précédent quinquennat. En effet, l'impôt fait mal non pas quand il est voté, mais quand il est payé. Or, il a fallu payer en 2013 les deux années de gel du barème, le gel de la prime pour l'emploi et la remise en cause de la demi-part des personnes isolées – autant de mesures prises par la droite et dont le rapport sur la fiscalité des ménages que je rendrai au Premier ministre avec M. François Auvigne montre bien que ce sont souvent les ménages modestes qui en sont les premières victimes.
Des mesures d'accompagnement du programme de stabilité doivent être prises pour les ménages les plus modestes et je voudrais avoir confirmation que nous pourrons travailler dans les prochaines semaines sur la mesure qui devra prendre effet dès le mois de septembre, afin de pouvoir gommer ces effets de façon transitoire, dans l'attente d'une réforme du bas de barème. Une autre mesure devrait viser les retraités les plus modestes.
Enfin, alors qu'un effort important est demandé depuis plusieurs années aux fonctionnaires, votre programme prévoit le gel de la valeur du point d'indice jusqu'en 2017. Pouvez-vous confirmer que cette mesure n'est pas exclusive des discussions catégorielles en cours ou à venir, notamment pour les catégories C de la fonction publique, et que des enveloppes sont bien prévues dans le programme pour financer ces mesures ?
Je suggère par ailleurs de prévoir une clause de revoyure d'ici à 2017, car si les résultats attendus sont au rendez-vous, il serait bon que les fonctionnaires, auxquels on a demandé beaucoup d'efforts, profitent d'un retour plus rapide de la situation à la normale.
Peut-être le Gouvernement pourrait-il répondre devant nous à l'avis du Haut Conseil des finances publiques, à son analyse assez critique des hypothèses formulées pour 2015 et, surtout, pour 2016 et 2017. Comment, en particulier, le Gouvernement justifie-t-il et analyse-t-il l'idée d'un rattrapage de croissance considérable sur 2016 et 2017 ?
En deuxième lieu, M. le secrétaire d'État a déclaré que ce qui nous a été présenté aujourd'hui avait été anticipé lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2014 : débattons-nous d'éléments nouveaux ou tout avait-il déjà été anticipé ? Vous ne pouvez pas à la fois annoncer aux Français que vous les écoutez et que les choses changent après les élections municipales, et affirmer que tout était écrit dès l'automne 2013 : il faut choisir !
En troisième lieu, alors que le Président de la République et le Premier ministre avaient clairement eu l'intention, après les élections municipales, de détendre le calendrier de l'assainissement des finances publiques, le Gouvernement se présente aujourd'hui devant nous avec une trajectoire de stabilité plus classique. Au-delà de ce que nous apprend la lecture des journaux, le Gouvernement peut-il nous dire ce qui s'est passé, tant en son sein que lors de ses discussions avec Bruxelles ?
En quatrième lieu, de quels chiffres parlons-nous ? De fait, nous ne disposons pas du tableau principal indiquant combien il faut dégager pour financer le pacte de stabilité et quelles sont les contreparties. À quel montant s'élèvent les annonces et les promesses du Gouvernement en matière d'allégements de charges, et qu'y a-t-il en face ? Si les 50 milliards d'euros sont bien la somme nécessaire au respect du pacte de stabilité, où sont les financements des mesures annoncées dans le pacte de responsabilité ? Nous pensons qu'il manque près de 30 milliards d'euros.
Par ailleurs, alors que le Premier ministre a annoncé une baisse de prélèvements qui correspond, en additionnant l'ensemble des mesures, à plus de 1 % du PIB, vous annoncez quant à vous une baisse de 0,6 %, ce qui signifie que certains impôts vont augmenter. Peut-être le Gouvernement, après avoir mis en avant ceux qui vont baisser, pourrait-il nous indiquer avec la même clarté quels sont ceux qui vont augmenter.
Enfin, la démission de M. Michel Rocard et de M. Alain Juppé de leur rôle de supervision du programme d'investissements d'avenir est un acte politique majeur. Tous deux soulignent le risque que les investissements d'avenir soient appelés à la rescousse pour compenser des arbitrages budgétaires perdus par tel ou tel ministère.
Messieurs les ministres, j'ai beaucoup de mal à comprendre votre stratégie. Tout d'abord, je ne vois pas la réalité des 50 milliards d'euros d'économies que vous annoncez. En effet, vous raisonnez toujours par rapport à des tendanciels qui remontent à des années pour faire croire que vous faites des économies, mais une bonne part de ces 50 milliards ne sont pas des économies. J'en citerai trois exemples.
En premier lieu, vous annoncez 10 milliards d'économies sur l'assurance maladie. L'an dernier, vous raisonniez sur la moyenne des dix dernières années, soit 4,2 %. Or, ce n'est pas sur les dix dernières années qu'il faut calculer ; c'est sur la moyenne triennale. Un gain de 0,6 point sur les 180 milliards de l'ONDAM représente un bon milliard d'euros et les économies s'élèveront donc à 3 milliards d'euros, et non pas à 10 milliards. J'ai déjà formulé cette observation, mais n'ai obtenu aucune réponse.
Autre exemple : vous annoncez une économie de 18 milliards d'euros sur l'État et ses agences, mais la stabilisation du point d'indice, qui est la première mesure annoncée, n'est pas un tendanciel : ce sera la quatrième année que le point d'indice n'est pas réévalué et il ne s'agit donc pas d'une économie – ce n'en serait une que si vous proposiez de baisser la valeur du point d'indice. Je n'aurai du reste pas la cruauté de vous rappeler les déclarations que vous aviez faites, l'un et l'autre, lorsque nous avions gelé cette valeur en 2011 et 2012 : à tout pécheur miséricorde.
Les collectivités locales sont le seul domaine où les 11 milliards d'euros d'économie annoncés sont réels, car il s'agit bien d'une baisse. Celle-ci portera, selon vos déclarations, sur la seule dotation globale de fonctionnement – DGF –, car la réorganisation territoriale évoquée dans le tableau de la page 5 n'interviendra qu'en 2017 pour les régions et en 2021 pour les départements. Je souligne que cette baisse de 11 milliards d'euros sur 52 milliards représente une baisse d'un peu plus de 20 % en moyenne en trois ans.
En matière de protection sociale, vous annoncez une économie de 11 milliards d'euros par une non-revalorisation exceptionnelle des prestations, hors minima sociaux, pour un an. Or, j'ai cru comprendre que c'était pour deux à trois ans que vous procédiez à cette non-revalorisation – sous peine de ne pas atteindre ces 11 milliards d'euros d'économies. Il serait donc très intéressant que vous indiquiez analytiquement, comme vous l'a demandé souvent la Cour des comptes, où sont les économies – en distinguant les économies réelles des économies virtuelles.
Quant aux dépenses, je les ai présentées sous forme de tableau, en indiquant pour chaque année les déclarations du Premier ministre : pour 2015, 2016 et 2017, on observe une baisse brute de 34,3 milliards d'euros, soit une baisse nette de 30 milliards d'euros. Comment pouvez-vous prétendre réduire le déficit public avec 30 milliards de baisse d'impôts sur ces trois années ?
J'en viens au tableau qui figure à la page 6 du document que vous avez fait distribuer : vous devriez vous inquiéter de l'écart croissant entre le déficit structurel et le déficit réel, qui continue à augmenter en 2015, où il atteint 1,8 point, pour ne se réduire qu'en 2016 et 2017 grâce aux hypothèses de croissance que vous avez choisies – hypothèses « optimistes » selon le Haut Conseil des finances publiques, et très optimistes, voire irréalistes selon moi. Vous n'êtes du reste pas les seuls à calculer ainsi, car tous les gouvernements précédents ont fait de même : selon vous, le retour en deux ans à une croissance de 2,25 % résoudra les problèmes – mais ce ne sera pas le cas.
Pour ce qui est tout d'abord de ramener le déficit à 3 %, sans doute la situation est-elle plus sérieuse qu'on ne le dit, car la dette supplémentaire est encore, avec un déficit de 4,3 %, de 75 milliards d'euros en 2013. L'équilibre de la dette ne se situe donc pas à 3 % de déficit, mais sans doute encore bien en-deçà : nous ne sommes pas près de stabiliser la dette. Or, rembourser la dette est une absolue nécessité.
Il faut par ailleurs éviter trop de brutalité. La baisse des dépenses publiques est certainement incontournable, mais on ne peut pas tout lui faire porter et nous devons, pour l'adoucir, accompagner la trajectoire d'extinction de la dette publique d'une trajectoire d'extinction de la fraude, de l'évasion fiscale et de l'optimisation fiscale agressive. Cette action ne relève pas de la seule compétence de la France et elle doit bien évidemment être traitée au niveau européen – mais elle doit l'être, si nous ne voulons pas que la réduction de la dépense publique soit trop violente.
Les aides proposées aux entreprises pour l'emploi doivent être assorties de conditions : cet argent ne doit pas aller nourrir les dividendes, bonus et avantages sur les salaires élevés.
En outre, on évoque la création de 190 000 emplois supplémentaires, mais il faudrait aussi s'interroger sur les pertes d'emplois, directs et indirects, liées à la diminution de la dépense publique.
Enfin, la gauche est pratiquement unanime pour demander la préservation des petites retraites, ce qui va sans doute au-delà des minima sociaux. La classe moyenne basse a déjà fait les frais du gel du barème de l'impôt, de la suppression de la demi-part dite « des veuves » et de la suppression de l'exonération des heures supplémentaires : n'y ajoutons pas une baisse de ses retraites !
Je commencerai par répondre aux questions portant sur l'Europe, et notamment à celle de M. Mariton sur notre dialogue avec les autorités européennes. Ce n'est pas la Commission européenne qui nous oblige à prendre les mesures qui vous sont soumises : la mission de celle-ci consiste en effet à établir des diagnostics, à les analyser et, éventuellement, à formuler des propositions. L'organe qui prend les décisions est celui auquel je participe en tant que ministre aux côtés de mes homologues des autres pays – et notamment de ceux qui, au cours de ces dernières années, ont été soumis à des programmes d'ajustement extrêmement rigoureux et douloureux ayant parfois abouti à une alternance politique. Or, si ces pays ne sont pas nécessairement exigeants vis-à-vis des autres États membres, ils sont néanmoins attentifs à leurs efforts. Ils savent en effet que si un grand pays comme le nôtre ne respecte pas ses engagements, ils seront les premiers à en subir les conséquences négatives tant ils demeurent fragiles, en dépit de leurs propres efforts. Ce n'est pas par esprit de solidarité ou d'altruisme que je m'exprime ainsi : car si les petits pays repartent dans une spirale difficile, aucun grand pays ne sera à l'abri. Ainsi avons-nous très directement subi en 2011-2012 les conséquences de la déstabilisation de la zone euro et de ces pays fragiles. C'est pourquoi si nous raisonnons en fonction des intérêts de la France, ceux-ci sont indissociables de ceux du socle européen, sur lequel nous construisons notre croissance.
C'est exactement en ces termes que j'ai discuté avec mes interlocuteurs, monsieur Mariton ! Il est bien normal que vous accordiez de l'attention aux pseudo-romans racontés ici ou là par des quidams qui se croient toujours – à tort – mieux informés que les autres. Reste que je me trouvais, moi, au coeur de la discussion. Et les affirmations que j'ai pu lire dans un journal, selon lesquelles c'est à la suite d'une certaine rencontre que j'aurais proposé au Gouvernement de respecter la règle des 3 % de déficit, sont complètement fausses ! D'ailleurs, quiconque observe l'ordre chronologique de mes déclarations et de mes prises de contact s'apercevra qu'à aucun moment je n'ai demandé à qui que ce soit je ne sais quel délai supplémentaire... Voilà qui ne serait pas à la hauteur de l'idée que je me fais de la France et de sa grandeur ! Nous y avions certes habitué nos partenaires, tant en 2002 qu'en 2007, et cela est même advenu au cours de ces dernières années puisque, sans que nous l'ayons sollicité, un délai nous a été accordé par la Commission européenne, compte tenu de la spécificité de la situation et conformément aux textes régissant notre vie commune.
J'ai donc expliqué la logique du pacte de responsabilité et de solidarité à l'ensemble de nos partenaires : au FMI, qui a parfois une vision plus équilibrée de la situation européenne que celle que l'on peut entendre dans certains cercles européens, à la Commission européenne et, surtout, à mes homologues des autres États membres. Je leur ai expliqué en quoi ce pacte constituait la contribution française à la hausse de la croissance en Europe. Or, tous m'ont répondu que nous étions sur la bonne voie et que nous avions retenu la bonne manière de procéder – en particulier lorsque nous cherchions à faire en sorte que nos entreprises regagnent en compétitivité et qu'elles aient des marges suffisantes pour investir et embaucher.
Sous l'autorité des déclarations du Président de la République et du Premier ministre, j'ai affirmé qu'il était nécessaire d'adapter le rythme d'application de ces mesures – ce dont certains ont déduit que cela revenait à le ralentir. Les courbes illustrent d'ailleurs que le rythme que nous avons retenu pour réduire nos déficits n'est pas exactement le même que celui annoncé au cours des deux dernières années. Nous l'avons en effet adapté au financement du pacte de responsabilité et à ses conséquences positives sur la croissance française. C'est ainsi que la France pourra conserver une voix forte en Europe et adopter une position différente de celle de la Banque centrale européenne sur l'euro. Si je n'établis aucune relation de cause à effet entre notre explication du pacte de responsabilité et les déclarations de M. Draghi sur la nécessité de mettre fin à la surévaluation de l'euro, nous avons cependant contribué à les rendre possibles. De même, c'est parce que nous tenons nos engagements et que nous sommes forts en Europe que nous pouvons pousser à la mise en place de l'Union bancaire – et ce, malgré nos divergences d'intérêt avec notre partenaire allemand. C'est aussi parce que la France pèse et qu'elle est respectée et respectable que nous pouvons faire en sorte que la taxe sur les transactions financières devienne réalité dès maintenant et obtenir la réalisation d'investissements au niveau européen. On dit d'ailleurs souvent à juste titre que si les dettes sont étatiques, les capacités d'investissement se situent quant à elles au niveau européen. Mais pour peser en ce sens, encore faut-il que la France soit respectée.
S'agissant de l'avis rendu par le Haut Conseil des finances publiques, vous êtes les premiers à en avoir reçu l'explication orale du Premier président de la Cour des comptes, ainsi que la loi le prévoit. Or, si l'on peut toujours interpréter les mots dans différents sens, je n'ai pas souvenir qu'il y ait jamais eu d'avis accordant autant de crédibilité aux hypothèses gouvernementales : pour 2014, « aucune tendance baissière n'est à craindre », ce qui signifie que le 1 % de croissance sur lequel nous tablons est indiscutable. Pour 2015, l'hypothèse de 1,7 % de croissance – encore discutable l'an dernier et aujourd'hui qualifiée par beaucoup de trop optimiste – est considérée comme « pouvant être atteinte ». Quant à 2016-2017, puisque c'est afin d'améliorer notre taux de croissance que nous vous proposons de telles mesures, nous n'allons tout de même pas vous annoncer qu'il y aura alors moins de croissance, malgré un effort de cette nature. J'ignore en effet quel gouvernement irait annoncer l'échec de la politique qu'il est en train de mener ! Le pacte de responsabilité constituant notre contribution à la croissance française, ses effets bénéfiques se retrouvent dans ces chiffres, non contestés par le Haut Conseil qui les a qualifiés d'optimistes – ce que je considère plutôt comme un compliment – et non de « trop optimistes » ou d'« irréalistes ».
Eu égard aux effets du pacte sur les PME-PMI et les grandes entreprises d'une part, et sur l'emploi d'autre part, le modèle MESANGE servant depuis de nombreuses années à déterminer les conséquences de baisses de cotisations ou de charges sur les créations d'emplois, ce sont des chiffres nets de création d'emplois que nous vous avons fournis. Il est vrai, en effet, qu'une baisse de cotisations sociales peut avoir des effets positifs, mais son financement peut aussi exercer un effet négatif sur la croissance et l'emploi. Dès lors que nous assurons ce financement non par une augmentation de l'emprunt ou des impôts, mais par une diminution de la dépense publique, la mesure a un effet récessif. Notre objectif est cependant que l'effet bénéfique du pacte de responsabilité sur la croissance soit largement supérieur à l'effet récessif du financement de certaines dépenses. Les 50 milliards d'euros d'économies budgétaires correspondent certes à un effort réel et difficile – d'aucuns citant d'ailleurs différentes catégories de Français susceptibles de trouver à redire à ce plan – mais néanmoins parfaitement à notre portée dans la mesure où nous l'effectuerons dans des conditions raisonnables. Il ne s'agit pas là d'un plan d'austérité, qui consisterait en une diminution de la dépense en valeur et en volume ; c'est un plan qui permettra d'éviter des hausses de dépenses qui nous pénaliseraient, compte tenu de notre niveau d'endettement et du taux de croissance actuel.
Concernant l'impact de ces mesures sur les entreprises, en 2015, la totalité des baisses de cotisations et d'impôts qui vous sont proposées profitera aux très petites entreprises, aux PME-PMI et aux entreprises de taille intermédiaire – ETI. Tout d'abord, parce que la mesure en faveur des indépendants bénéficiera par définition aux plus petites entreprises. Ensuite, parce que les baisses de cotisations ne porteront en 2015 que sur les salaires inférieurs à 1,6 SMIC, dont la proportion est beaucoup plus importante dans les PME que dans les grandes entreprises. Les modèles économiques, tels que MESANGE, montrent d'ailleurs que c'est de cette façon que l'on parviendra à créer des emplois le plus rapidement, dans un premier temps. Ce qui n'empêche qu'à partir de 2016-2017, les baisses de cotisations viseront à une amélioration de notre compétitivité – objectif que je n'oppose pas à celui de l'emploi puisque les entreprises, une fois redevenues compétitives, seront en mesure de recréer des emplois. Enfin, en 2015, la première phase de suppression de la C3S s'opérera par un abattement, de telle sorte que ce sont d'abord les plus petites des entreprises assujetties qui en seront exonérées. Par conséquent, l'effort fourni en 2015 profitera intégralement aux TPE, aux PME-PMI et aux ETI – ce que nous reprochent parfois les grandes entreprises.
S'agissant du pouvoir d'achat et de la justice sociale, la baisse de 2,5 milliards d'euros des cotisations salariales pour les salaires compris entre 1 et 1,3 SMIC bénéficiera aux foyers les plus modestes. De même, nous prévoyons, dès 2014, une mesure d'un coût de 500 millions d'euros, permettant d'éviter que certaines catégories de Français non imposables ne le deviennent alors même que leurs revenus n'ont pas augmenté. Ce sont au total 3 milliards d'euros qui seront ainsi consacrés aux foyers les plus modestes en 2015. Il y a donc un équilibre entre les baisses de prélèvements obligatoires pour les entreprises et le soutien au pouvoir d'achat des ménages.
Je conclurai mes réponses par deux remarques. D'une part, nul ne nie le fait qu'une consolidation budgétaire produise des effets de ralentissement sur l'activité économique. Reste à savoir de quelle manière elle est financée. Si elle l'était par une hausse d'impôts ou du niveau d'emprunt, elle aurait des effets négatifs. Or, notre objectif consiste au contraire à faire en sorte que cette consolidation, nécessaire mais mesurée, permette d'accroître notre taux de croissance en rendant aux entreprises des marges suffisantes pour investir et embaucher.
D'autre part, que devront faire les entreprises en contrepartie de ces baisses d'impôts et de cotisations ainsi que du CICE qui entre actuellement en application et qui atteindra sa pleine maturité en 2015 ? Pour avoir exercé récemment au ministère du Travail et de l'emploi, j'attache beaucoup d'importance à ce point. Nous devons effectivement fixer avec les entreprises des « rendez-vous de chantier » et exiger d'elles des contreparties en termes de création d'emplois et de qualité de l'emploi. Ce pacte s'étalant sur trois ans, c'est par étapes que nous procéderons. Un accord portant sur la mise en application du pacte de responsabilité a d'ailleurs été signé entre les partenaires sociaux afin de veiller à ce que tant les entreprises que les organisations syndicales respectent leurs engagements, de même que le Gouvernement a pris les siens. C'est ainsi que nous pourrons faire en sorte que les objectifs attendus de ce pacte – hausse de la croissance et de l'emploi – deviennent réalité.
S'agissant du calendrier, monsieur le président Carrez, nous tiendrons la semaine prochaine un débat suivi d'un vote sur la trajectoire de nos finances publiques. Puis, au début du mois de juin, la Commission européenne publiera une proposition de recommandation sur notre programme de stabilité. Comme par le passé, la commission des Affaires européennes pourra alors prendre l'initiative de déposer une proposition de résolution. Enfin, au début du mois de juillet, dans le cadre du débat d'orientation des finances publiques, nous débattrons à nouveau de notre trajectoire. Quant au dépôt immédiat d'un projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, il est juridiquement impossible puisque l'article 2 de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques impose que cette loi de programmation contienne les plafonds de crédits budgétaires du triennal de l'État. Or, ces plafonds ne seront fixés qu'au moment de l'envoi des lettres-plafonds, soit à la fin du mois de juin. Nous ne pourrons donc déposer un tel projet de loi avant l'automne, sans quoi il risquerait d'être censuré par le Conseil constitutionnel.
En ce qui concerne les chiffres, la croissance spontanée de la dépense publique sur la période 2015-2017 sera de l'ordre de 1,5 % par an en volume – taux auquel il faut ajouter l'inflation. Cette évolution pourra également subir d'autres variations, tenant notamment au prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne. C'est sur le fondement de ce taux de croissance en volume qu'a été construit le document qui vous a été distribué. Quant au poids de la dépense publique, il passera de 56,7 % du PIB en 2014 à 53,5 % en 2017, soit une baisse de plus d'un point de PIB par an.
Mme la rapporteure générale a raison de nous interroger sur le contentieux relatif à la fiscalité des OPCVM : nous avons effectivement été transparents sur cette question tout en ayant réduit notre prévision de dépense à 1,8 milliard d'euros dans la mesure où le tribunal administratif de Montreuil, qui centralise ces contentieux, ne peut les traiter au rythme où ils sont déposés. Le fait qu'ils aboutissent dans des délais plus longs que prévu initialement nous permet ainsi de retarder d'autant la dépense correspondante.
Quant au coût brut du pacte de responsabilité, il devrait être compris entre 5 et 6 milliards d'euros en 2015, entre 14 et 15 milliards en 2016 et entre 21 et 22 milliards en 2017 – les éventuelles recettes supplémentaires d'impôt sur les sociétés et sur le revenu consécutives aux allégements de charges que nous proposons n'étant par ailleurs pas prises en compte dans ces chiffres. Comme cela a déjà été précisé, le pacte de solidarité coûtera 500 millions d'euros en 2014, près de 3 milliards en 2015 et environ 5 milliards en 2017. Il s'agit là d'ordres de grandeur à ne pas prendre au pied de la lettre, l'entrée en vigueur de ces dispositifs pouvant être décalée, voire inversée. Le principe est le suivant : toutes les mesures en faveur de l'emploi, et en particulier celles portant sur les bas salaires, doivent entrer en application le plus rapidement possible afin d'être effectives dès 2015.
Comme l'a judicieusement souligné M. Lefebvre, un travail important a déjà été accompli en faveur de la revalorisation du traitement des agents de catégorie C, entrée en vigueur en février dernier. Cela mérite d'être souligné, par contraste avec le gel du point d'indice des fonctionnaires, envisagé jusqu'au retour à meilleure fortune. Actuellement prévu sur trois ans, ce gel pourrait éventuellement faire l'objet d'un réexamen en fonction des résultats constatés.
Contrairement à ce qu'a affirmé M. de Courson, ce n'est pas un gel sur trois ans des prestations et allocations que nous prévoyons dans le projet qui vous est soumis, mais bien un gel de leur revalorisation jusqu'en octobre 2015.
Quant à l'avis du Haut Conseil des finances publiques, il peut être lu de différentes façons. Nous avons certes retenu des objectifs et des chiffres volontaristes pour les années 2016-2017, mais ils ne sont pas complètement irréalistes : alors que la croissance initialement prévue était de 2 %, nous avons proposé un taux de 2,25 %, ce qui a paru cohérent à nos partenaires, compte tenu de la mise en oeuvre du pacte de responsabilité. Qui plus est, nous n'avons pas uniquement retenu des hypothèses optimistes ; nous avons également été prudents : nous avons notamment tablé sur un taux d'intérêt de plus de 4 % pour les obligations assimilables du Trésor – OAT – à dix ans en fin de période. De manière plus globale, les hypothèses posées en termes de taux d'intérêt sont loin d'être optimistes. De même, nous avons retenu l'hypothèse d'un taux de change de 1,36 dollar pour 1 euro. Or, on peut penser que les taux d'intérêt vont prochainement baisser dans la zone euro, compte tenu des récentes déclarations du président de la Banque centrale européenne.
Nous sommes nombreux à partager l'analyse de M. Alauzet sur la fraude fiscale : en 2013, nous avons inscrit 1 milliard d'euros de recettes supplémentaires au titre de la lutte contre la fraude. Et 1,8 milliard ont été inscrits à ce titre en 2014. J'espère que nous atteindrons ce chiffre, mais de même que lorsque l'on fait régime ce sont les premiers kilos qui sont les plus faciles à perdre, en matière de lutte contre la fraude ce sont les premières centaines de millions qui sont les plus faciles à récupérer. N'y voyez pas là une forme de démission de notre part à ce sujet, car mon prédécesseur à ce poste a déjà pris ou fait adopter soixante mesures législatives et réglementaires supplémentaires en ce sens depuis l'été 2012. La procédure de mise en conformité des contribuables possédant des comptes à l'étranger a d'ailleurs emporté un certain succès et nous tiendrons l'engagement, pris par le ministre Bernard Cazeneuve, de vous tenir informés en toute transparence des résultats de ces opérations. Enfin, nous avons exigé de nouveaux efforts des services de Bercy, puisque nous y avons fait installer des services d'exploration de données afin de lutter en priorité contre la fraude à la TVA – objectif dont M. Galut a souligné la nécessité.
S'agissant des questions européennes, j'approuve la position du Gouvernement quant au respect de notre trajectoire budgétaire, car il en va de notre crédibilité. Non seulement la France ne respecte pas le pacte de stabilité depuis 2004, mais il nous serait difficile d'expliquer que nous ne tenons pas nos engagements alors que les pays du Sud ont opéré un ajustement brutal, et sans doute excessif, sans bénéficier des taux d'intérêt de la France.
La politique monétaire, et les questions connexes de l'inflation et du taux de change, sont un enjeu essentiel, d'ailleurs mentionné par le Haut Conseil des finances publiques, et fortement lié à la question des excédents de l'Allemagne. Le rééquilibrage de la demande intérieure allemande constitue d'ailleurs une évolution positive, nécessaire au soutien de la demande de la zone euro. Avez-vous dit à vos homologues allemands que, pour que les pays en déficit soient en mesure de résorber celui-ci, il conviendrait que les pays excédentaires relâchent et soutiennent leur demande intérieure ?
Je vous donne acte, monsieur le ministre, de votre volonté de stabiliser la dépense publique en volume dans les années à venir, mais le taux de croissance en volume de la dépense publique en 2012 n'est pas mentionné dans vos tableaux : pourriez-vous me confirmer que celle-ci a considérablement augmenté parallèlement aux hausses d'impôts réalisées la même année ?
Hervé Mariton vous a demandé quels impôts allaient augmenter, n'ayant pu trouver une telle information dans le document présentant votre programme de stabilité. Puisque vous souhaitez diminuer de 11 milliards d'euros les dotations de l'État aux collectivités territoriales, prévoyez-vous d'accorder à celles-ci une marge supplémentaire d'autonomie fiscale, c'est-à-dire de leur permettre d'augmenter la fiscalité locale pour compenser ces pertes de dotation ?
Comment comptez-vous financer la baisse de 500 millions d'euros de l'impôt sur le revenu pour les ménages les plus modestes à laquelle devrait procéder le collectif budgétaire ?
Enfin, quelles mesures de politique familiale envisagez-vous de prendre : une diminution du congé parental, la fin de l'aide à la garde d'enfants ou de la prime de naissance ?
Bien que tous vos chiffres n'aient pas été définitivement arrêtés, il nous eût été utile de disposer d'un tableau récapitulant les mesures du pacte de compétitivité et du pacte de solidarité sur les années 2015 à 2017. Il est en effet difficile de recouper les informations disponibles et de distinguer ce qui relève d'un effort d'offre de ce qui constitue un soutien à la demande.
Il est par ailleurs indispensable d'exiger des contreparties à l'effort majeur que l'on demande à la nation, en sanctionnant les comportements déloyaux des entreprises qui pratiquent la fraude, l'optimisation ou l'évasion fiscales. Or, si Bercy fournit de réels efforts en ce sens, nous restons bien moins outillés sur le plan légal que nos pays voisins. Je plaide donc en faveur de l'adoption d'une nouvelle législation en la matière, dans un délai proche de celui de l'application des pactes de stabilité, de responsabilité et de solidarité.
Enfin, sur le plan de la méthode, comment comptez-vous associer le Parlement aux réformes de structure découlant du programme d'économies que vous avez annoncé ? Ainsi, si je n'ai aucune raison de douter que nous parviendrons à réaliser les 18 milliards d'euros d'économies prévues sur le budget de l'État, une économie d'un tel volume n'est plus seulement d'ordre incrémental, mais implique une transformation de l'État, une réflexion sur ses missions et son organisation, et la nécessité absolue de renforcer la dimension interministérielle de ses fonctions support – et notamment de l'informatique d'État, qui accuse un grand retard. Certains parlementaires disposent de compétences telles qu'il serait utile de les associer le plus en amont possible à la réflexion de l'exécutif en la matière.
Je comprends, monsieur le ministre, que vous exigiez un effort de la part des collectivités locales, mais pas que vous leur réclamiez à toutes le même effort en pourcentage ! Les plus fragiles d'entre elles, en particulier celles situées en zone rurale ou dans des territoires fragiles, ayant déjà consenti de nombreux efforts de fonctionnement, elles n'ont aujourd'hui plus le moyen d'en fournir davantage. C'est pourquoi je doute que la baisse de la DGF doive être appliquée de la même façon à l'ensemble des collectivités en fonction de leur population. Une telle mesure serait injuste ; elle remettrait en cause l'investissement public et, par conséquent, la survie de nos entreprises locales. Alors que celles-ci nous demandent déjà quels seront nos investissements en 2014-2015, voire en 2016, nous sommes obligés de leur répondre que nous allons réduire la voilure – ce qui aura pour elles des conséquences catastrophiques. Je vous demande donc de réfléchir à une réforme plus juste, conformément aux annonces du Président de la République.
Si je soutiens le plan d'économies de 50 milliards d'euros présenté par le Gouvernement, je m'interroge quant à sa déclinaison. Il importe en effet de protéger le pouvoir d'achat des Français les plus faibles – et notamment celui des retraités, des fonctionnaires, et des bénéficiaires des prestations sociales. Monsieur le ministre, vous avez à juste titre qualifié ce plan de « nouvelle étape » et avez parlé d'« accélération » de la lutte contre la fraude. Or, si celle-ci nous a rapporté 1 milliard d'euros l'an dernier et 1,8 milliard de plus cette année, reste que selon la Cour des comptes et la Commission européenne, la fraude fiscale et sociale représente au total 100 milliards d'euros. C'est pourquoi, si M. Bernard Cazeneuve a posé les fondations permettant d'aller de l'avant, une accélération demeure nécessaire dans certains domaines : l'escroquerie – et non la fraude – à la TVA représente ainsi 10 milliards d'euros par an. Pour avoir rencontré M. Bruno Bézard, le directeur général des finances publiques, je ne peux que saluer la volonté et le travail des services de Bercy – que j'ai d'ailleurs visités à cette occasion. On ne parviendra cependant pas à progresser sans une prise de conscience politique de la situation et une accélération de notre action. De même, alors que nous nous apprêtons – à juste titre – à baisser le coût du travail pour nos entreprises, l'optimisation fiscale permet à de grands groupes de ne payer que 8 % d'impôts quand nos PME en acquittent 33 %. Si les amendements que nous avons présentés naguère sur le sujet doivent être retravaillés dans les semaines qui viennent, cet enjeu doit devenir une des priorités du Gouvernement et des parlementaires, parallèlement au pacte de responsabilité.
De quelle manière comptez-vous imposer aux collectivités territoriales les 11 milliards d'euros d'économies prévues sur trois ans par le programme de stabilité ? Celles-ci s'inquiètent en effet aujourd'hui de ce plan, compte tenu des programmes pluriannuels d'investissement qu'elles ont définis. Prévoyant pour 2014 une économie de 1,5 milliard d'euros au titre de la DGF, vous arguez qu'il sera possible d'y parvenir en faisant fusionner certaines communes ou en leur faisant mutualiser leurs moyens – alors que de tels procédés ne permettront de réaliser des économies qu'à moyen et long termes. À court terme, les communes seront directement atteintes. Dès lors, selon quels critères et quelle méthode comptez-vous redéfinir la répartition de la DGF entre les régions, les départements et les communes, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015 ?
Les politiques de désinflation compétitive pourraient bien ne nous mener qu'à une compétition sur la désinflation en Europe. Quant à la politique monétaire de la Banque centrale européenne, elle nous conduit droit dans le mur, en dépit des efforts accomplis. Il y a donc un combat politique important à mener en ce domaine.
S'agissant des allégements prévus, il est fait mention, à la page 10 du document politique qui nous a été distribué, d'allégements de « charges » et non de « cotisations ». Or, les mots ont un sens : la notion de cotisations renvoie à l'idée d'une contrepartie, c'est-à-dire d'une forme de solidarité, héritée du Conseil national de la Résistance. Quant aux 6 000 formes d'aides publiques aux entreprises, pourquoi ne sont-elles pas mentionnées dans ce document alors qu'elles représentent 110 milliards d'euros par an et qu'elles ne sont pas évaluées aujourd'hui ? On pourrait très bien baisser ce volume global de 5 % par an et affecter cette économie à la baisse de l'impôt sur les sociétés pour les TPE et les PME. En effet, aujourd'hui, une grande partie de ces 110 milliards d'euros d'aides bénéficie aux très grandes entreprises qui construisent des schémas d'optimisation fiscale.
Si la suppression de la C3S constitue une excellente mesure, comment les sommes aujourd'hui affectées à la dizaine de caisses des indépendants seront-elles compensées ? Le Gouvernement aura-t-il l'audace de faire fusionner ces caisses afin de réaliser des économies ou ira-t-il chercher des moyens ailleurs ?
Les travaux de simplification menés par notre collègue Thierry Mandon et M. Guillaume Poitrinal vont dans le bon sens : nous espérons ainsi faire fusionner les statuts des entrepreneurs individuels, ce qui aura néanmoins un coût pour les finances publiques puisque cela avantagera les petites entreprises. Une telle mesure a-t-elle été prise en compte dans vos calculs ? Ira-t-on plus loin en modifiant enfin les seuils de salariés applicables aux entreprises – qui ont pour effet de restreindre la création d'emplois ? Pourquoi attendre 2021 pour simplifier le millefeuille territorial ? Procédons-y plus tôt au lieu d'organiser des élections pour ensuite supprimer les départements !
Je conclurai mon propos en évoquant la lutte contre les inégalités. Si certains débattent aujourd'hui des retraites, des allocations de logement et de la politique du handicap, à gauche, notre volonté de lutter contre les injustices est aussi ancienne que notre conscience : c'est là notre engagement. Or, afin de préserver les plus faibles, il est possible de dégager d'autres marges de manoeuvre. Ainsi la liste des entreprises dont l'État est actionnaire et pratiquant l'optimisation fiscale a-t-elle été publiée par Le Canard enchaîné il y a plus d'un an : or, soit l'Agence des participations de l'État surveille effectivement ces entreprises comme elle se doit de le faire, soit on la supprime, ce qui permettrait aussi de réaliser des économies. C'est sur la lutte contre les paradis fiscaux et contre la fraude fiscale et sociale, de même que sur la justice fiscale – thème auquel des groupes de travail ont réfléchi sous le précédent gouvernement – qu'il convient de mettre l'accent afin que le pacte de responsabilité et de solidarité soit une réussite, mais aussi afin de protéger les plus faibles. En effet, ces derniers souffrent et attendent de la gauche qu'elle prenne des décisions courageuses pour redresser nos finances publiques dans la justice, pour restaurer notre compétitivité et pour garantir la solidarité dans notre pays.
Si la croissance est nulle depuis cinq ans, en France comme en Europe, c'est que la demande s'est effondrée du fait des politiques d'austérité qui y ont été conduites sans calibrage ni coordination. Ce risque a d'ailleurs été bien évalué par le Président de la République, qui a affirmé, lors de la campagne présidentielle puis au Conseil européen de juin 2012, que dans la mesure où tous les pays européens devaient procéder à une consolidation budgétaire, une compensation était nécessaire au niveau européen. Cela s'est traduit par un pacte de croissance et de responsabilité européen censé déboucher sur la mobilisation de fonds inutilisés de la Banque européenne d'investissement – BEI – à hauteur d'1 % du PIB – ce qui aurait eu un fort effet multiplicateur. Or, si ce plan a été adopté, il n'a guère été mis en application. Il reste cependant d'actualité et mériterait d'être relancé afin de compenser les politiques de réduction des déficits.
Par ailleurs, il est intéressant de comparer l'actuel programme de stabilité avec celui de juillet 2012 qui évaluait à une vingtaine de milliards d'euros le coût des soixante propositions de campagne du Président de la République et prévoyait leur financement par redéploiements de crédits. Le programme d'aujourd'hui conserve cette composante, mais s'y ajoutent 38 milliards d'euros d'allégements au profit des entreprises, voire 41 milliards d'euros si l'on y regarde de plus près comme l'a fait notre rapporteure générale. Or, compte tenu de la situation actuelle, cette différence de plusieurs milliards a son importance. Et s'il fallait de toute évidence prendre des mesures face à la dégradation de notre compétitivité, cela suppose que nous assurions une gestion budgétaire différente de celle que l'on envisageait il y a deux ans.
Enfin, le Haut Conseil des finances publiques nous a rappelé ce matin ce que tous les modèles économiques nous indiquent depuis longtemps : l'effet dépressif d'une réduction de dépenses est rapide, même s'il s'estompe au bout d'un certain temps, tandis qu'à l'inverse, l'effet expansionniste d'un allégement de cotisations est lent, même s'il se renforce peu à peu. Le Haut Conseil insiste par conséquent sur la nécessité de veiller au calibrage dans le temps des réductions de dépenses et de la progression des allégements. Tout en restant dans le cadre des trois années qui a été fixé, on pourrait imaginer de ralentir la montée en charge des allégements et de répartir différemment les réductions prévues de façon à ce que les années 2014-2015, au cours desquelles la croissance doit repartir et se rapprocher de notre croissance potentielle pour nous faire sortir de ces trois années de récession, se passent le mieux possible. Cela nous sera d'autant plus aisé si l'on complète ce plan par des mesures de lutte contre la fraude fiscale et l'optimisation fiscale, sachant que l'Organisation de coopération et de développement économiques – OCDE – formulera des propositions fortes sur ces deux thèmes lors de sommets à venir. Dans ces conditions, un ajustement plus fin, en termes conjoncturels, des réductions de dépenses et des allégements de charges prévus nous permettra de préserver voire de consolider notre reprise économique tout en répondant à une demande sociale forte. Nous pourrons alors éviter le gel des prestations sociales, celui du point d'indice dans la fonction publique et celui des transferts financiers aux collectivités territoriales qui supprimeront en conséquence certains de leurs investissements. Je souhaite en tout cas qu'un effort soit fait en ce sens.
Il serait tout à fait possible d'aller au-delà des 11 milliards d'euros d'économies proposées sur les transferts aux collectivités locales, mais cela nécessiterait un plan courageux et ambitieux visant à réformer l'ensemble des dotations de l'État aux collectivités locales et toute la fiscalité locale – l'une des plus injustes qui existe. Nous pourrions alors dégager des marges de manoeuvre très importantes, à condition toutefois de redonner une certaine autonomie fiscale à ces collectivités, ainsi que Valérie Pécresse l'indiquait tout à l'heure, mais j'ai du mal à croire qu'on puisse le faire avant l'examen du projet de loi de finances pour 2015, c'est-à-dire en deux ou trois mois. Cela dit, il n'est ni acceptable ni réaliste d'annoncer une baisse de 11 milliards d'euros en continuant à diminuer la DGF. La baisse de 1,5 milliard de cette dotation cette année ayant été extrêmement difficile à vivre pour certaines collectivités, je n'ose imaginer ce qu'il en sera en cas de baisse dix fois supérieure – baisse qui, de surcroît, sera concomitante à l'augmentation de la péréquation. Il est en effet impensable de diminuer les dotations aux collectivités sans continuer à en donner aux plus pauvres d'entre elles, ce qui se traduira pour les autres par un écart encore plus important que celui occasionné par la baisse de 11 milliards.
Si j'entends bien votre demande, monsieur le ministre, les mesures annoncées dans le document qui nous a été distribué me laissent circonspect : ce n'est pas la suppression de la clause de compétence générale qui nous permettra de réaliser des économies, car les collectivités qui en seront privées continueront à dépenser le même argent dans l'exercice des compétences qui sont les leurs. Et jamais la fusion de communes dans des structures intercommunales n'a entraîné d'économies : chaque fois que l'on y a procédé, la collectivité nouvellement créée a dépensé autant, voire plus, que celles dont elle était issue.
Ainsi que je l'ai signalé au président du Comité des finances locales, il est urgent que le Gouvernement rencontre les responsables politiques chargés depuis plusieurs années des questions de finances locales afin de déterminer la manière de réaliser ces 11 milliards d'économies sans pour autant hypothéquer l'avenir des collectivités locales et tuer l'investissement public, dont elles assurent les trois quarts. Si elles devaient cesser d'investir, nous ne serions pas près de retrouver une certaine croissance.
La diminution de 11 milliards d'euros des dotations aux collectivités aura un impact sur la capacité de celles-ci non seulement à financer leurs dépenses de fonctionnement, mais aussi à investir – impact qui sera démultiplié, compte tenu de l'effet de levier de tout investissement, avec les conséquences drastiques que cela emporte.
Monsieur le ministre, il faut être courageux ou inconscient pour prendre le poste que vous occupez aujourd'hui. Je vous présente mes condoléances car à mon grand regret, je ne crois pas véritablement à votre succès, malheureusement pour le pays. Vous continuez à analyser la crise que nous subissons comme une crise budgétaire alors que c'est d'abord une crise des balances des paiements. Les 50 milliards d'euros que vous pensez pouvoir économiser ont déjà produit leurs effets de purge dans d'autres pays : les Grecs ont vu leurs revenus baisser de 40 % et leur PIB diminuer de 25 % ; les Espagnols ont quant à eux vu leurs revenus baisser de 25 % ; et la situation a été presque identique en Italie. Le système macroéconomique dans lequel vous vous trouvez est donc en train de nous étrangler. Si l'on persiste à ne pas aider les collectivités territoriales et qu'on les oblige à augmenter les impôts locaux, on ne réglera nullement nos problèmes de dette. Et s'il convient effectivement d'effectuer des réformes internes, il faut d'abord pour cela maintenir en France le capital des Français pour qu'il s'y investisse. La France est en effet leader mondial en exportation de capitaux, devant les États-Unis. Nous exportons davantage de capitaux que nous ne recevons d'investissements étrangers.
En simplifiant le millefeuille territorial comme vous nous le promettez, vous allez créer de nouveaux ducs de province comme au Moyen Âge, ce qui est politiquement très dangereux. Par ailleurs, nos retraites n'ont pas véritablement été réformées. Et vous, vous nous dites maintenant que l'euro est trop fort, mais M. Christian Noyer reconnaissait lui-même la difficulté de le faire baisser dans un entretien publié dans un journal du matin. En effet, si vous faites baisser l'euro, l'Allemagne deviendra immédiatement encore plus compétitive si bien qu'elle exportera davantage, ce qui fera remonter la valeur de l'euro. C'est la quadrature du cercle !
Ne confondons pas causes et conséquences : tant que nous ne mènerons aucune réforme structurelle interne forte, nous irons dans le mur. Ce n'est pas avec 50 milliards d'euros de dévaluation interne – soit moins de 2,5 % du PIB – que nous nous en sortirons alors que nous devrions dévaluer de 25 % !
Monsieur Myard, il me semble vous avoir déjà fourni des éclaircissements sur la valeur de l'euro et expliqué pourquoi, aujourd'hui, notre vision est largement partagée au niveau européen, et en particulier par la Banque centrale européenne.
Plusieurs d'entre vous ont souligné la nécessité, pour relancer la croissance en Europe, d'un rééquilibrage entre les pays déficitaires et les pays excédentaires. Cette remarque est parfaitement exacte et est prise en compte dans nos échanges, sans que nous soyons soumis à des mécanismes contraignants en la matière. Encore que l'Allemagne elle-même ait été mise sous observation par la Commission européenne, compte tenu de sa situation excédentaire. D'ailleurs, en l'espace de dix-huit mois, ce pays a instauré un SMIC, au niveau interprofessionnel et sur l'ensemble de son territoire, qui équivaut à un doublement des salaires les plus bas. Les négociations salariales en Allemagne, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, constituent elles aussi un élément de rééquilibrage par rapport à la situation antérieure. Le principal effort accompli par ce pays a en effet consisté en la maîtrise de ses rémunérations, ce qui lui a permis un rattrapage sur d'autres pays et une conquête de compétitivité.
M. Muet a souligné combien il était nécessaire que des décisions d'investissement soient prises au niveau européen. Or, elles l'ont été à l'été 2012, lorsqu'a été adopté le pacte de croissance et de responsabilité : le capital de la BEI a alors été augmenté de 10 milliards d'euros – capital dont l'utilisation a exercé un effet de levier considérable. En France, les crédits apportés par la BEI ont doublé en l'espace de deux ans, passant de plus de 3 milliards d'euros à près de 7 milliards. J'ai d'ailleurs pu m'apercevoir hier à Lyon – dans le cadre d'une rencontre avec la BEI et des collectivités et entreprises ayant utilisé ces crédits – de l'existence de projets très concrets, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé. Peut-être trouverez-vous que les décisions prises restent insuffisantes, mais elles se traduisent par des capacités d'investissement supplémentaires, mutualisées au niveau européen.
Voilà donc deux mesures de caractère européen qui participent du rééquilibrage global des capacités de développement de notre continent.
Madame Pécresse, les dépenses publiques ont augmenté en volume de 1,1 % en 2012, et en moyenne de 1,3 % par an sur la période 2007-2012, alors qu'entre 2013 et 2017, nous prévoyons une évolution en volume de 0,4 % par an. Si l'on voit la différence, on perçoit également la difficulté d'une telle évolution.
M. le secrétaire d'État nous a indiqué que la croissance tendancielle des dépenses publiques pour les années 2015 à 2017 prise comme base de référence pour calculer les économies à réaliser serait de 1,5 % en volume. Si l'on y ajoute 1,3 % d'inflation, on obtient 2,8 %, à multiplier par 1 200 milliards d'euros. L'évolution tendancielle en valeur se situe donc entre 30 et 40 milliards d'euros, ce qui est considérable ! Et l'économie de 50 milliards d'euros que vous proposez sur trois ans est à rapporter à cette augmentation – considérée comme inéluctable – de la dépense publique d'environ 35 milliards d'euros par an. J'ai du mal à comprendre ce point.
S'agissant du rythme d'application des allégements de cotisations et d'impôts, nous avons précisément été attentifs à 2015, année délicate puisque l'on y prévoit 1,7 % de croissance – ce qui constitue une amélioration mais ne correspond ni au niveau de croissance que nous souhaitons atteindre ni à un niveau suffisant pour que nos recettes augmentent de façon considérable. Nous avons donc concentré sur 2015 nos mesures en faveur des PME et sur les bas salaires afin que la courroie de transmission entre la baisse du coût du travail et l'augmentation du nombre de salariés dans ces entreprises soit la plus courte possible. La montée en puissance s'opérera principalement en 2016-2017 : le retour de fiscalité en faveur des entreprises ne sera en effet que de 5 milliards d'euros en 2015, mais il sera de 12 milliards en 2016. Nous ne pouvons plus reculer ces mesures dans le temps car nous les avons déjà aujourd'hui étalées de manière à tenir compte de vos préoccupations quant à leur financement. En revanche, les mesures en faveur du pouvoir d'achat – qui soutiendront l'activité – seront de près de 3 milliards d'euros dès 2015. Nous avons ainsi cherché, dès la conception du pacte de responsabilité et sa traduction dans ce programme de stabilité, à équilibrer le mieux possible les diminutions de cotisations ou d'impôts des entreprises et des ménages de manière à éviter qu'un effet récessif trop important n'annule l'effet de relance attendu des mesures que nous prenons.
Enfin, je partage tout à fait l'idée selon laquelle il nous faut simplifier les seuils de salariés applicables aux entreprises : à la demande des partenaires sociaux eux-mêmes, cette question fait aujourd'hui l'objet d'une négociation qu'accompagnera le Gouvernement, de manière à moderniser le dialogue social dans les entreprises d'ici à la fin de cette année. Car si les seuils ont parfois un effet psychologique nuisible à l'embauche, à l'inverse, il est des secteurs et des entreprises dépourvus de présence syndicale et où, par conséquent, le dialogue social n'existe pas – avec les inconvénients que cela suppose.
Je laisse à Christian Eckert le soin de répondre aux autres questions qui ont été posées, s'agissant en particulier des collectivités locales – à la situation desquelles nous sommes tous sensibles.
Tout d'abord, il me semble avoir omis de répondre à M. Lefebvre lorsqu'il nous suggérait d'adopter des mesures fiscales dès la loi de finances rectificative pour 2014 : le Gouvernement est ouvert aux propositions en la matière, notamment celles du groupe de travail sur la fiscalité des ménages auquel M. Lefebvre a participé. Le président Carrez ayant à juste titre souligné en aparté l'importance des effets de seuil, il convient de travailler à la fois sur les tranches les plus basses du barème de l'impôt sur le revenu, la décote, le seuil de recouvrement et le revenu fiscal de référence afin de parvenir aux mesures les plus efficaces possibles.
Je serai plus brutal en ce qui concerne les collectivités territoriales : je pourrais vous dire que les mesures d'économie de 3,5 milliards d'euros par an ici prévues ne représentent qu'un pourcentage relativement faible de l'ensemble des dépenses des collectivités territoriales, tout en sachant que les résultats en termes de dosage de l'effort à accomplir pourront être interprétés de diverses manières suivant l'assiette de calcul retenue. Cela étant, le Gouvernement est déterminé à mener une réforme profonde de la DGF, aujourd'hui fort injuste pour de nombreuses raisons. Il ne s'agit certes pas là du grand soir de la fiscalité locale évoqué par M. Pupponi, mais le sujet est en discussion. Je doute que l'on soit capable d'y parvenir d'ici à l'examen du projet de loi de finances pour 2015, tant le sujet est complexe. Sans doute continuera-t-on donc à appliquer pendant un an un système proportionnel comme l'an dernier. Reste que je suis très ouvert sur la question : à vous, parlementaires, de formuler des propositions et au Gouvernement de déterminer celles qui pourront être retenues. M. Pupponi sait d'ailleurs que le Parlement a passé des jours et des nuits à discuter de questions de péréquation. Quoi qu'il en soit, à condition que vous respectiez les volumes indiqués, nous sommes ouverts à vos propositions en matière de répartition et de soutenabilité de la réforme.
S'agissant de la lutte contre la fraude fiscale, il ne faudrait pas interpréter mes propos comme un signe de mollesse ou de frilosité. Le Conseil constitutionnel s'étant opposé l'an dernier à l'adoption de plusieurs des dispositions que le Gouvernement avait proposées, il nous faut les retravailler ensemble. Nous ne faisons donc preuve d'aucune complaisance en la matière. Quant aux dossiers fiscaux délicats qui ont été évoqués, j'en ai effectivement trouvé certains sur mon bureau à mon arrivée au Gouvernement mais le secret fiscal m'empêche de vous en dire davantage. Compte tenu de la difficulté qu'elle présente, la fraude doit être traitée au niveau international, dans le périmètre le plus large possible. Nous sommes en tout état de cause prêts à reprendre les travaux qui ont été entamés, notamment par M. Muet, Mme Mazetier et M. Galut.
Enfin, monsieur Grandguillaume, nous sommes preneurs de toute proposition de rationalisation et de simplification des aides aux entreprises.
Pour conclure, contrairement à ce que d'aucuns affirment, nous n'appliquons aucun coup de rabot ; nous proposons des réformes dans certains domaines, en fonction des possibilités et des structures existantes ainsi que de l'idée que nous nous faisons de l'équilibre et de la justice.
Membres présents ou excusés
Commission des Finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 23 avril 2014 à 12 heures
Présents. - M. Éric Alauzet, M. Guillaume Bachelay, M. Laurent Baumel, M. Jean-Marie Beffara, M. Étienne Blanc, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Yves Censi, M. Pascal Cherki, M. Alain Claeys, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Carole Delga, M. Henri Emmanuelli, M. Olivier Faure, M. Alain Fauré, M. Yann Galut, M. Marc Goua, M. Laurent Grandguillaume, M. Régis Juanico, M. Jérôme Lambert, M. Jean-François Lamour, M. Dominique Lefebvre, M. Jean-François Mancel, M. Thierry Mandon, M. Hervé Mariton, M. Pierre-Alain Muet, M. Patrick Ollier, Mme Valérie Pécresse, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, M. Alain Rodet, M. Thomas Thévenoud, M. Michel Vergnier, M. Philippe Vigier, M. Laurent Wauquiez
Excusés. - M. Dominique Baert, M. Olivier Dassault, M. Jean-Louis Dumont, M. Marc Francina, M. Jean-Claude Fruteau, M. Jean-Pierre Gorges, Mme Arlette Grosskost, M. Jean Launay, M. Patrick Lebreton, M. Marc Le Fur, Mme Monique Rabin, M. Thierry Robert, M. Pascal Terrasse, Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Assistaient également à la réunion. - Mme Danielle Auroi, M. Alexis Bachelay, M. Gérard Bapt, M. Alain Calmette, Mme Fanélie Carrey-Conte, M. Daniel Goldberg, Mme Estelle Grelier, M. Christophe Léonard, M. Pierre Lequiller, M. Jean-Philippe Mallé, Mme Sandrine Mazetier, M. Jacques Myard, M. Christian Paul, M. Joaquim Pueyo, M. François Pupponi, M. Bernard Roman, M. Gérard Sebaoun