Intervention de général Denis Mercier

Réunion du 15 avril 2014 à 18h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

général Denis Mercier :

Pour pouvoir utiliser les MRTT dans les missions de transport stratégique nous devrons bénéficier d'une avionique particulière, développée par Thales, qui nous garantit un contrôle total en matière de sécurité des systèmes utilisés sur nos appareils, notamment quand ils sont déployés sur des terrains non militaires. Aucune impasse n'a été faite sur ce point.

Je ne partage pas vos analyses, M. de Rugy, vous vous en doutez bien. S'agissant de la composante terrestre, qu'elle soit tactique ou stratégique, avec les missiles du plateau d'Albion, c'est bien la notion de juste suffisance qui a été appliquée pour réduire notre dispositif et l'adapter à la disparition du bloc soviétique. Cette adaptation s'est prolongée notamment avec la suppression d'un escadron des FAS, sans pour autant baisser la garde dans un contexte de prolifération inquiétant. Les surprises stratégiques auxquelles nous avons à faire face actuellement montrent le bien-fondé de cette approche. Ce type de crises montre à mon sens que les armes nucléaires tendent à conférer un rôle plus important aux États qui les détiennent ; et si l'on peut souhaiter un monde sans armes nucléaires, tant que celles-ci existeront il faudra continuer à se poser la question de la manière dont nous protégeons nos intérêts vitaux. En ce qui concerne l'Iran, c'est bien parce que la France dispose de l'arme nucléaire que sa parole a un poids particulier.

Si nous avions dû intervenir en Syrie, cela aurait correspondu à ce que les FAS savent faire, notamment pour pénétrer dans des espaces très défendus, capacité que l'on aurait sans doute abandonnée pour des raisons budgétaires si l'armée de l'air n'avait plus eu de mission nucléaire. Incontestablement le nucléaire a tiré nos forces vers le haut, ce dont témoigne la mission réalisée avec un très faible préavis au Mali le 13 janvier 2013. Cette mission d'une durée de 9 heures 45, la plus longue de l'histoire du bombardement français, a permis de frapper une vingtaine d'objectifs djihadistes au nord de Gai. Nos capacités de ciblage, de planification, de commandement et de ravitaillement sur très court préavis sont toutes liées à la mission de dissuasion. Quant à nos faiblesses en matière de ravitaillement, elles sont certes réelles, mais s'expliquent par le grand âge de nos appareils, que nous nous astreignons à entretenir en permanence précisément en raison de la nécessité de maintenir la posture de dissuasion. Sans cette dernière, nos efforts en la matière seraient certainement moindres tout comme la disponibilité des ravitailleurs.

La question n'est pas celle des éventuels effets d'éviction, elle est de savoir si la protection de nos intérêts vitaux dépend de la dissuasion. Dans l'affirmative, les deux composantes sont indispensables pour en assurer la crédibilité face aux défenses de plus en plus efficaces de nos adversaires potentiels. La question de l'éviction est d'un autre ordre, et relève de choix politiques. Pour ma part je demeure convaincu que, sans la dissuasion, nous aurions fait des choix capacitaires qui n'auraient pas été dictés par les exigences d'excellence qu'implique le nucléaire.

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