Madame la députée, vous avez posé deux questions précises. D’abord, concernant la nature juridique de la mesure prolongeant la trêve hivernale, le communiqué du 11 mars a annoncé la signature le même jour d’une instruction aux préfets pour que ceux-ci suspendent jusqu’à la fin du mois toute décision accordant le concours de la force publique à une procédure d’expulsion locative. Cette instruction est consultable sur le site internet « circulaire.legifrance.gouv.fr ».
La conséquence de cette instruction est que les préfets n’ont pas donné suite pendant cette période aux demandes de concours de la force publique. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une extension de la trêve hivernale, puisque celle-ci, comme vous l’avez rappelé, est définie par la loi, et puisqu’elle suspend la décision de justice elle-même. Aussi, dans le cadre de l’instruction du 11 mars, l’État assume les conséquences de la non-exécution des décisions d’expulsion en indemnisant les propriétaires. Il est à noter, comme vous le savez, que la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et à un urbanisme rénové, dite loi ALUR, a légalisé le report de la trêve hivernale au 31 mars.
Quant à l’instruction du 26 octobre 2012, elle vise à mettre en oeuvre le relogement d’un ménage, lorsque celui-ci a été reconnu prioritaire et urgent au titre du droit au logement opposable, dans un délai tel qu’il intervienne avant l’exécution du concours de la force publique. D’une part, cette instruction concerne les ménages ayant bénéficié d’une décision favorable de la commission de médiation, laquelle doit se prononcer au regard de la bonne foi de l’occupant. Les ménages de mauvaise foi ne devraient pas bénéficier de cette décision favorable, et ne rentrent donc pas dans le champ d’application de l’instruction.
D’autre part, le principe juridique est le même que celui de l’instruction du 11 mars 2014 : il s’agit d’une suspension par le préfet de l’exécution de la décision d’expulsion prise par la justice. Dans le cas où la suspension perdure au-delà du délai légal, le propriétaire bailleur bénéficie du droit à une juste indemnisation, à hauteur du préjudice subi, et ce jusqu’au départ effectif de l’occupant, rendu notamment possible par le relogement.
Il s’agit donc, comme vous pouvez le constater, d’une mesure équilibrée, qui vise à reloger rapidement les ménages prioritaires au titre du droit au logement opposable, en évitant une expulsion forcée. Le respect de cette instruction permet précisément de concilier les droits respectifs du propriétaire et du locataire.