Cela peut être logique, si on veut déployer un réseau cohérent sur la globalité, entre les territoires. C’est d’ailleurs le principal argument avancé. J’ai des doutes, en revanche, sur la sacralisation de l’initiative publique qui sous-tend cette proposition de loi. J’y reviendrai lors de la discussion des amendements, mais je pose d’ores et déjà la question : pourquoi vouloir à tout prix que l’État – ou l’un de ses établissements publics – ait des parts dans l’opérateur qui sera choisi ?
N’est-ce pas fausser le jeu de la concurrence ? Nous savons parfaitement que certaines entreprises ont déjà montré leur intérêt, comme EDF ou Bolloré. Dès lors, pourquoi aussi retenir ce critère de participation de l’État, qui ferme un peu plus la porte ?
L’affirmation selon laquelle il y a une « insuffisance de l’initiative privée » – je cite l’exposé des motifs – reste à démontrer. Quand bien même, c’est un coup de pouce qu’il faudrait et non une centralisation totale.
On me répondra sans doute que l’État veut être sûr de pouvoir conserver la main sur un projet qui est sans nul doute d’intérêt général. C’est oublier que l’État aura bien une vue sur le projet, puisqu’il est explicitement soumis à l’approbation des ministres de l’écologie et de l’industrie, en concertation avec les collectivités territoriales.
Vous l’aurez compris, je ne suis pas favorable à ce parti-pris, car il exclut un certain nombre d’acteurs sans trop de raisons, si ce n’est une sorte d’idéologie.
À ce titre, l’amendement n° 7 du Gouvernement arrive à point nommé et je me félicite qu’il prenne en compte des doutes que j’avais exprimés en commission. J’y reviendrai.
Par ailleurs, il est à craindre que le rôle des collectivités territoriales soit réduit à peau de chagrin et que ce texte soit synonyme pour elles d’une dépossession quasi-totale.
Comme je l’ai dit, la seule obligation est en effet une obligation de concertation de la part du porteur du projet, sans plus de précision.
Il faudra sans doute que les ministres veillent à ce que cette concertation fasse partie intégrante du dossier qui leur sera présenté.
Car si le niveau national offre une vue d’ensemble utile, les collectivités gardent une expertise et une connaissance pertinente en termes de maillage du territoire.
Dernière remarque, ou plutôt dernière question : quel lien est-il prévu entre ce texte et l’article 184 de la loi ALUR ? Je le rappelle, cet article crée l’obligation d’installer des bornes de recharge dans les nouveaux bâtiments à usage industriel et les ensembles commerciaux. Cette nouvelle obligation relève de la même logique et participe du maillage du territoire. Une articulation devrait donc se faire entre ces dispositions.
En résumé, il y a derrière cette proposition de loi une bonne volonté, mais je bute principalement, monsieur le ministre, sur la question du porteur de projet. Or, le coeur du texte est bien de permettre la désignation d’un hyper-opérateur responsable de l’installation, de l’exploitation et de la maintenance des bornes. Lorsqu’on recherche une efficacité maximale – ici, le meilleur maillage possible –, la restriction est rarement la bonne solution. Cela vaut pour ce sujet comme pour d’autres.