À partir des constats que vous avez dressés, j'évoquerai les difficultés que nous rencontrons dans la régulation des dépenses de transport, les initiatives prises au cours des dernières années et les voies de progrès que nous avons identifiées.
Les dépenses de transport représentent un peu moins de 4 milliards d'euros en 2012 et leur progression reste plus dynamique, en dépit d'un léger ralentissement au cours des dernières années, que celle de l'ONDAM, dont la progression devrait être fixée autour de 2 % pour les trois prochaines années.
Cette dynamique des dépenses de transport s'explique en partie par des évolutions épidémiologiques et la transformation de l'organisation du système de soins. Il est certain que la réorganisation hospitalière et le développement des prises en charge ambulatoires impliquent pour les patients des déplacements vers des centres hospitaliers plus éloignés et des sorties précoces dans des conditions qui justifient un transport sanitaire.
Cette dynamique est donc justifiée. Si l'équilibre économique global nécessite que nous réalisions des économies, en allégeant les prises en charge hospitalières ou en regroupant les plateaux techniques, il nous faut parallèlement investir dans une prise en charge pertinente des transports de patients. Nous avons, sur cette question, engagé un dialogue avec l'assurance maladie et nous essayons de convaincre les professionnels transporteurs ; il ne faut pas se contenter de critiquer cette dynamique mais aller plus loin.
Pour autant, nous notons d'importantes disparités de prise en charge. Quelques chiffres : le coût par patient transporté varie de un à deux selon les départements, le pourcentage de patients transportés une fois en ambulance, qui se situe à 53 % au niveau national, varie de 22 % dans les Hautes-Alpes à 76 % dans le Val-de-Marne. Pour certaines pathologies comme l'IRC – insuffisance rénale chronique –, le recours à l'ambulance pour les patients dialysés va de un à deux, voire de un à trois. Ces disparités ne semblent pas reposer sur une analyse objective du besoin des patients.
Plusieurs éléments permettent d'expliquer cette situation.
Tout d'abord, les comportements de prescription, en ville et à l'hôpital, sont très variables et trop déconnectés des règles, des dispositifs réglementaires et des référentiels de prise en charge.
Ensuite, l'hétérogénéité de la tarification du service de transports, qui regroupe les ambulances et les véhicules sanitaires légers (VSL) – dont les tarifs sont fixés par l'assurance maladie dans le cadre de la négociation conventionnelle – et les taxis, dont la tarification est prévue par une autre autorité, suscite des stratégies d'optimisation, ce qui bloque l'instauration d'une régulation globale.
Cette situation est également due à l'organisation même des acteurs du transport de patients, qui souvent cumulent une offre de taxi, de VSL et d'ambulance. Les différentes tentatives de rationalisation de l'organisation hospitalière se heurtent à un marché très éclaté, fait de petites entreprises qui craignent qu'une réorganisation hospitalière soit de nature à les écarter de leur activité de transport.
Enfin, le secteur a fait l'objet, au fil du temps, d'outils de contrôle et de maîtrise médicalisée imparfaits ou insuffisamment développés.
Quelles sont les actions envisagées par la direction de la sécurité sociale ?
Il convient avant tout de rappeler que la DSS n'est que l'un des trois principaux acteurs publics concernés, aux côtés de la direction générale de l'offre de soins (DGOS), qui a compétence en matière d'organisation des soins, de négociations conventionnelles et de pilotage des opérations de maîtrise médicalisée et de lutte contre la fraude, et de l'assurance maladie.
Il s'agit tout d'abord d'agir sur l'offre de véhicules, qui se caractérise par un parc abondant, voire surabondant. C'est pourquoi le décret du 29 août 2012 renforce le pouvoir des directeurs généraux des agences régionales de santé (ARS) en matière d'agrément et d'autorisation des véhicules de transport sanitaire, qui leur permet de refuser les demandes de transformation d'un VSL en ambulance et leur donne un pouvoir d'appréciation sur l'opportunité des demandes de transfert d'autorisation suite à la cession ou à la modification de l'implantation géographique et de la catégorie du véhicule.
La réalité est complexe car le parc de véhicules se situe d'ores et déjà au-delà des normes fixées. Sauf à prendre des mesures radicales, qui pourraient d'ailleurs être critiquées pour leurs conséquences en matière d'emploi et d'activité économique, il nous apparaît pertinent de placer les directeurs généraux d'ARS en capacité d'adapter l'offre à la réalité des besoins et de faire évoluer le parc afin de limiter l'utilisation inadaptée des véhicules.