Les chiffres que nous donnons sont ceux de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS). Il y avait 31 384 taxis en 2009 et 37 100 en 2013.
Sur ces différents points – dynamiques des dépenses, augmentation du parc de véhicules, augmentation du nombre de transports –, notre constat n'est pas mieux documenté aujourd'hui qu'en 2012. Nous n'avons pas eu connaissance depuis lors de nouvelles études éclairant davantage les déterminants de la dépense.
Ces derniers incluent des facteurs objectifs, bénéfiques pour les patients et propices à l'efficience du système de soins. Car le transport de patients, naturellement essentiel au parcours de soins, est aussi un gage d'efficience en ce sens qu'il permet de concentrer les ressources du système de santé et les prises en charge dans certains lieux, plateaux techniques ou établissements, tout en garantissant à l'ensemble de la population l'égalité d'accès à des soins de qualité.
D'autres facteurs sont moins positifs. D'abord, les habitudes de prescription peuvent beaucoup varier selon la zone géographique, le département, le médecin prescripteur. Ensuite, le nombre de prescriptions d'un transport paraît d'autant plus important que le parc de véhicules installés est dense.
Qu'ils soient positifs ou négatifs, ces facteurs sont insuffisamment connus. C'est à nos yeux un problème majeur. Pour mieux piloter la dépense, il convient donc d'investir dans une analyse plus précise de ses déterminants.
Précisons en outre que les mesures de « gestion du risque » prises par les pouvoirs publics depuis 2012 n'ont pas encore fait la preuve de leur efficacité.
S'agissant des problèmes organisationnels, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a ainsi prévu l'expérimentation de nouveaux modes d'organisation du transport de patients, consistant à confier ces derniers, dans certaines zones géographiques, à des entreprises de transport de patients désignées sur appel d'offres, quel que soit le prescripteur. Cette disposition a suscité l'émotion des transporteurs, ce qui a conduit les pouvoirs publics à surseoir à la parution du décret d'application de cette expérimentation. Ce sursis perdure à ce jour.
Sans annuler cette expérimentation, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 en a prévu d'autres. Il s'agit d'abord de confier aux établissements de santé volontaires le soin d'organiser le transport de patients à destination ou au départ de l'établissement ; en d'autres termes, d'internaliser la prestation de transport au sein des établissements de santé – mais non son financement comme l'avait proposé la Cour. Là non plus, les décrets d'application ne sont pas encore parus ; il est vrai que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 est parue récemment.
Afin de réguler, et en vue de mieux maîtriser la dépense émanant des hôpitaux, la loi précitée alourdit, en outre, les pénalités dont les établissements de santé sont redevables en cas d'augmentation de leurs prescriptions de transports. Nous avions, en effet, constaté que les prescriptions de transport émanaient à 53 % des médecins hospitaliers et que les contrats d'amélioration de la qualité de l'organisation des soins (CAQOS) en matière de transport de patients avaient essentiellement une existence virtuelle. Il est évidemment trop tôt pour mesurer l'effet de cette disposition.
Un décret du 29 août 2012, qui résultait en grande partie de nos travaux, a renforcé les dispositions tendant à réguler l'offre de transports. Ainsi, la transformation d'un VSL en ambulance, qui permettait jusqu'à présent de contourner le plafonnement du parc d'ambulances, est désormais subordonnée à l'avis favorable des ARS. En outre, pour limiter l'attribution de nouvelles autorisations par l'ARS lorsque le plafond calculé en fonction de la population n'est pas atteint, cette attribution n'est plus automatique ; les conditions du transfert de l'autorisation d'exploitation des véhicules sont durcies ; en particulier, la maîtrise des dépenses peut désormais constituer un motif de refus de transfert.
Ces mesures visent à « colmater » certains des points de fuite que nous avions identifiés. Toutefois, elles ne remédient pas au principal défaut que nous avions mis en lumière : l'absence d'articulation entre les dispositifs de régulation applicables aux VSL et ambulances, d'une part, et aux taxis, de l'autre.
Du côté de l'assurance maladie, on peut noter des progrès dont la portée ne peut être encore véritablement appréciée. Il s'agit de la mise en oeuvre effective, qui nous avait été annoncée par la CNAMTS, d'une évolution de son application informatique permettant d'automatiser davantage la liquidation des factures de transport. Les prescriptions sont dématérialisées, les droits des patients vérifiés lors de l'établissement des factures et les pièces justificatives sont elles aussi dématérialisées. Selon les informations fournies par l'assurance maladie, le nombre de rejets a été divisé par deux depuis que les factures sont traitées par ce nouveau système. Toutefois, la diminution du nombre d'incidents bloquants ne signifie pas que les vérifications soient plus efficaces.
Dans le cadre de notre campagne de certification des comptes 2013 de la branche maladie, dont nous remettrons le rapport au Parlement courant juin, nous avons étudié plus particulièrement l'indicateur de risque financier résiduel, c'est-à-dire la mesure des anomalies touchant les factures de transport de patients. En 2013, 11 % des règlements de prestations de transport sanitaire ont été affectés par des erreurs de liquidation à caractère définitif, imputables à des anomalies de facturation qui n'ont pas été détectées ni corrigées par les dispositifs de contrôle interne. Ces erreurs ont notamment pour origine l'application de tarifs erronés, des cumuls non autorisés de prestations et l'incohérence du nombre de kilomètres parcourus entre le domicile du patient et le lieu où il a bénéficié d'actes de soins. L'incidence financière de ces erreurs représente 3,4 % du montant total des règlements de prestations de transport de patients pris en charge par le régime général au cours de l'année, soit environ 140 millions d'euros, sur un montant total de 3,36 milliards d'euros répartis entre la branche maladie, qui en absorbe l'essentiel, et, pour une part résiduelle, la branche accidents du travail et maladies professionnelles.