À la suite d'une demande d'un élu local qui lui a été adressée récemment, la CNSA nous a sollicités pour savoir si le nombre de bénéficiaires de l'AAH s'expliquait par les caractéristiques du département ou par des facteurs exogènes. Il est tout à fait logique que les élus se demandent si les prestations correspondent à des besoins.
Votre question comporte deux volets : l'offre et les besoins.
L'offre, en tout cas en établissement, est décrite de façon assez détaillée dans les deux enquêtes quadriennales que j'ai mentionnées tout à l'heure – l'enquête auprès des établissements d'hébergement pour personnes âgées (EHPA), et l'enquête auprès des établissements et services pour enfants et adultes handicapés (ES « handicap »). Il nous est parfois reproché que ces enquêtes ne permettent pas aux agences régionales de santé (ARS) et à la CNSA de réaliser un pilotage fin, annuel. Cependant, les renouveler plus souvent, comme cela nous est parfois demandé, est hors de portée pour nous en termes de moyens. Ces enquêtes sont très utiles non seulement à la CNSA, mais aussi aux missions d'inspection, en particulier à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS).
Deux éléments devront être pris en compte pour l'avenir. D'une part, une partie des futurs systèmes d'information de la CNSA, en particulier le portail sur les établissements pour personnes âgées, permettra éventuellement d'alléger certaines de nos enquêtes et, par conséquent, de réaliser des économies ou des enquêtes plus fréquentes. D'autre part, nos enquêtes sont progressivement dématérialisées. La prochaine vague, qui aura lieu l'année prochaine auprès des établissements et services pour personnes handicapées, sera pour la première fois totalement dématérialisée. Pour autant, nous n'aurons jamais les moyens de mener ces enquêtes annuellement, si bien que ce type d'outil ne permet pas un pilotage annuel.
Aujourd'hui, la seule solution serait que l'ARS décide, pour tel type de population, de pathologie ou de handicap, de suivre l'évolution des places chaque année, comme cela est fait, par exemple, avec le plan Alzheimer.
Quant à la demande, elle est très compliquée à mesurer car très difficile à définir. C'est vrai dans le champ de la santé comme dans celui du handicap et de la dépendance, car il n'est pas aisé de déterminer le moment à partir duquel un besoin s'exprime, si bien que, malgré l'existence de grilles, comme la grille Aggir (autonomie gérontologie groupes iso-ressources), nous sommes obligés de retenir des hypothèses.
Les choix d'adaptation de l'offre exigent que l'on soit capable de mesurer les besoins localement, ce qui implique la réalisation d'enquêtes. Concrètement, il faut interroger un nombre important de personnes sur leurs souffrances, les limitations qu'ils rencontrent dans la vie quotidienne, en procédant le plus souvent en face en face, ce qui rend ces enquêtes coûteuses et difficiles à mettre en place et à réitérer. Nous menons cet exercice cette année et l'année prochaine sur la perte d'autonomie ; nous le réaliserons avant 2020 sur le handicap, objectif en réalité ambitieux car très coûteux. L'enquête Handicap-Santé de 2008 – cofinancée par l'INSEE, qui s'est ensuite désengagé de ce type d'enquête – a représenté au moins la moitié du budget de la DREES. Beaucoup d'acteurs souhaiteraient des enquêtes plus fréquentes, permettant d'évaluer l'adaptation du nombre de places à l'évolution des besoins, mais elles sont conditionnées à l'évolution de nos budgets. Sur ces sujets, à propos desquels nous échangeons quotidiennement avec la CNSA, nous sommes obligés de programmer à moyen terme.