Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’ordonnance du 17 juin 2004 a créé un nouveau type de contrat administratif, inspiré de pratiques européennes voisines : je veux parler des partenariats public-privé. Il devait étoffer le maigre carquois d’outils mis à la disposition des autorités publiques, soit seulement la délégation de service public et le marché public. Ces PPP permettent l’association d’un ou plusieurs entrepreneurs privés à la construction, à l’entretien et à la gestion d’un ouvrage public. Lors de leur création, ces partenariats semblaient constituer la forme idéale pour permettre aux collectivités territoriales la réalisation, notamment, de grands projets de travaux publics.
Mais quel bilan peut-on en dresser aujourd’hui ?
Nous avons tous en mémoire la récente affaire Ecomouv’, qui a démontré les limites de ces partenariats. Les élus locaux font actuellement face à des difficultés de taille : les caisses se vident, les partenariats ont fait la preuve de leurs insuffisances et les autres types de contrats ne sont plus adaptés aux besoins toujours plus grands d’optimisation du fonctionnement des services publics.
C’est pour remédier à ces problèmes que nos collègues sénateurs ont déposé cette proposition de loi visant à créer des sociétés d’économie mixte à contrat, renommées « sociétés d’économie mixte à opération unique ».
Cette adaptation des partenariats public-privé institutionnels devrait répondre aux attentes et aux besoins des élus mais aussi des entreprises. Ensemble, ils vont pouvoir faire usage d’un nouvel outil – entité mixte alliant une personne dite publique à une personne privée. De cette alliance devra naître un contrat, pour que soit exécutée une opération unique.
La nouveauté, qui constitue la principale caractéristique de ce dispositif, est l’organisation d’une seule procédure de mise en concurrence pour le choix de la personne privée qui participera effectivement à la constitution de cette entité. Ainsi la personne publique devrait-elle récupérer la gouvernance nécessaire à la bonne gestion des deniers publics dont elle est garante.
Si nous avons confiance en cette nouvelle entité, c’est que cette dernière a fait ses preuves au niveau européen. Comme certains de nos collègues l’ont rappelé, plusieurs de nos voisins l’ont mise en place ces dernières années – l’Allemagne ou la Suède pour ne citer qu’eux – et les résultats escomptés sont là.
Je ne me livrerai pas ici à de longues explications mais je rappellerai simplement les grands principes régissant la création et le fonctionnement de ce nouveau type d’entreprise publique locale.
Ces sociétés prendront la forme de sociétés anonymes, mais, contrairement au droit classique les régissant, elles seront constituées, au minimum, par deux actionnaires : une personne publique et au moins une personne privée.
Contrairement aux SEM locales, la personne publique ne sera pas nécessairement l’actionnaire majoritaire de l’entreprise mais, pour conserver son influence et avoir un droit de regard, elle détiendra obligatoirement une minorité de blocage au sein du conseil d’administration ou du conseil de surveillance.
Enfin, une fois accompli le contrat pour lequel la société a été créée, cette dernière sera dissoute.
Je tiens à saluer le travail des commissions des lois du Sénat et de notre assemblée, qui a permis de faire bénéficier ce nouvel outil de la sécurité juridique nécessaire à son appropriation complète par les différents acteurs, ce qui permettra ainsi de garantir la meilleure gestion possible des services publics locaux.
Je défendrai tout à l’heure deux amendements qui, tout en sauvegardant l’équilibre exact du texte qui nous est soumis, tendent à en clarifier certains aspects.
Ce texte répond à la fois aux besoins identifiés par les élus locaux pour réaliser de grands ouvrages publics et à ceux des entreprises cocontractantes. Il respecte tant les exigences du droit européen, en matière de concurrence, que celles du droit français, s’agissant de la sécurité juridique des parties au contrat.
Le législateur français avait déjà eu l’occasion d’innover sur ce terrain, toujours à l’initiative de nos collègues sénateurs, avec la création des sociétés publiques locales, par la loi du 28 mai 2010 : ce nouveau statut venait s’ajouter aux outils de gestion à disposition des collectivités territoriales – établissements publics et sociétés d’économie mixte locales – et répondait, conformément au droit communautaire, aux exigences du in house.
L’importance des investissements publics des collectivités territoriales – ils représentent plus de 70 % de l’ensemble des investissements publics en France – impose de permettre aux donneurs d’ordre de pouvoir compter sur des outils juridiquement solides et économiquement adaptés pour mettre en oeuvre leur politique. En adaptant et en élargissant la palette des outils de gestion à disposition des collectivités territoriales, le législateur est pleinement dans son rôle. Nous nous en félicitons. Le groupe RRDP votera donc ce texte.