Intervention de Hugues Fourage

Séance en hémicycle du 7 mai 2014 à 15h00
Sociétés d'économie mixte à opération unique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHugues Fourage :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la SEM à opération unique est une initiative parlementaire regroupant des sénateurs et des députés. Cette proposition de loi a fait l’objet d’un large consensus sur les bancs de notre assemblée et au Sénat, comme cela a été rappelé tout à l’heure.

En effet, les élus sont contraints, pour mettre en place des services publics locaux, de trouver des modes de gestion qui permettent d’offrir le meilleur service aux usagers dans un contexte de resserrement budgétaire. C’est pourquoi les collectivités locales souhaitent aujourd’hui pouvoir bénéficier d’outils de gestion rénovés, voire innovants.

La gestion en régie directe a montré aujourd’hui ses limites et les expériences de partenariats public-privé ont suscité de nombreuses critiques quant à leurs coûts pour les collectivités et à leur mise en oeuvre.

Cette proposition de loi présente ainsi de nombreux avantages pour les collectivités locales : un risque financier limité à l’apport en capital, le maintien de l’influence des élus par la présidence des organes de décision et l’instauration d’une minorité de blocage, la possibilité de bénéficier de l’expertise et de la technicité du secteur privé.

La SEM à opération unique répond également à une attente très forte des collectivités locales, car très souvent les élus ont le sentiment d’être dépossédés de leur pouvoir de direction dans le cadre de la gestion de services publics ou d’opérations d’aménagement.

Cette nouvelle disposition aura pour conséquence le retour des exécutifs locaux dans la direction des services publics et des opérations d’aménagement ; c’est un point fondamental. Elle donne ainsi la possibilité à des communes ou à des intercommunalités de reprendre le contrôle de ces opérations d’aménagement, de logement, de construction ou de gestion de services publics.

Cette proposition de loi introduit donc dans notre droit un instrument permettant la constitution d’une entité mixte, composée d’une personne publique et d’au moins une personne privée, chargée d’exécuter, par contrat, une opération unique. La principale caractéristique de cette entité est l’organisation d’une seule procédure de mise en concurrence, non pas pour l’attribution du contrat à la société, mais pour le choix de la personne privée qui participera à la future entité.

Les dispositions prévues sont, contrairement à ce que d’aucuns craignent, compatibles avec le droit communautaire, comme cela a été rappelé dans la décision de la Cour de justice des communautés européennes du 15 octobre 2009. Celle-ci juge en effet que les dispositions du traité instituant la Communauté européenne « ne s’opposent pas à l’attribution directe d’un service public impliquant la réalisation de certains travaux à une société à capital mixte, public et privé, spécialement créée aux fins de la fourniture de ce service et ayant un objet social unique, dans laquelle l’associé privé est sélectionné sur appel d’offres public », selon, il convient de le préciser, les règles de droit communautaire en matière de libre concurrence, de transparence des procédures et d’égalité de traitement.

Sous l’impulsion de notre rapporteur, que je remercie, notre commission des lois a fait le choix de sécuriser le dispositif en prévoyant l’application des procédures d’appel à la concurrence de droit commun. Ainsi, si la SEM à opération unique est une innovation dans les modalités de gestion des services publics ou de mise en oeuvre d’opérations, elle s’inscrit pleinement dans les procédures habituelles de la commande publique. Une telle orientation me paraît pertinente et judicieuse.

Je voudrais maintenant revenir sur deux questions qui ont été au coeur de nos débats et que M. Paul Molac a évoquées voilà quelques instants : l’évaluation préalable et la sous-traitance.

Concernant l’évaluation préalable, certains voudraient que la création d’une SEM à opération unique soit soumise aux conditions de l’article L. 1414-2 du code général des collectivités locales concernant les contrats de partenariat, qui dispose que « les contrats de partenariat donnent lieu à une évaluation préalable précisant les motifs de caractère économique, financier, juridique et administratif qui conduisent la personne publique à engager la procédure de passation d’un tel contrat. » Une SEM à opération unique ne peut être constituée que pour un contrat de délégation de service public, de concession de travaux, de concession d’aménagement ou de marché public. Elle ne peut être utilisée pour l’exécution d’un contrat de partenariat. Il n’y a donc pas lieu de soumettre la décision de recourir à une SEM à opération unique au droit des contrats de partenariat.

De plus, il convient de rappeler que l’opportunité de recourir à un mode de gestion de service public – régie, délégation de service public, concessions – relève de la libre administration des collectivités.

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