Intervention de Denis Baupin

Réunion du 2 avril 2014 à 18h00
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenis Baupin, rapporteur :

Vous indiquez que nous devrions connaître à la fin de juin le nouveau chiffrage arrêté par le ministère. N'est-ce pas en contradiction avec le fait que l'ANDRA dispose de trois mois, à compter de la publication du compte rendu et du bilan du débat public, pour indiquer les suites qu'elle entend donner au projet ? Sachant qu'il faudra ensuite que le Gouvernement définisse une position, cette échéance de fin juin vous paraît-elle vraiment réaliste ? D'autre part, le chiffrage du Gouvernement portera-t-il sur le seul coût de l'investissement, ou aussi sur le coût de fonctionnement pour toutes les années à considérer ?

Quant à la distinction entre « pilote » et « phase pilote », c'est un sujet à traiter d'urgence. L'ANDRA prendra certainement position sur la question. En effet, les implications ne sont pas du tout identiques dans les deux cas. Si je comprends bien, opter pour la phase pilote emporte la décision de tout faire en échelonnant la réalisation. Pour ma part, j'avais plutôt retenu du débat public et de l'audition de la CNE2 par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) qu'il y avait besoin d'un pilote pendant une quinzaine d'années pour voir comment cela fonctionnait avant de prendre une décision pour la suite. Vous nous dites que la CNE2 serait favorable à une phase pilote plutôt qu'à un pilote. J'aimerais savoir si elle a défini cette position avant le compte rendu et le bilan du débat public ou après, et comment elle tient compte de ce qui a été dit par les citoyens.

Nous étions hier à La Hague. Selon AREVA, stocker directement les produits des réacteurs coûterait à peu près la même chose que les retraiter et produire du MOX. Comme nous l'a dit tout à l'heure M. Repussard, directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), le retraitement n'a donc d'intérêt que si l'on se place dans la perspective d'une quatrième génération : en dehors de cette hypothèse, la réduction du volume de déchets n'aurait que peu d'avantage au regard du coût qu'elle engendre. J'aimerais connaître votre analyse d'économiste, car ce point a des implications directes sur le dimensionnement de Cigéo. Selon vous, cette évaluation peut-elle être validée ?

L'ASN et l'IRSN nous ont indiqué cet après-midi que la démonstration de sûreté n'était pas faite, et que de nombreuses questions restaient posées, par exemple sur le risque d'incendie ou sur la résistance des alvéoles dans le temps. Partagez-vous leur sentiment ?

Il nous a aussi été dit à plusieurs reprises – notamment par l'IRSN, par l'ASN et par le CEA – que le calendrier prévu dans la loi de 2006 devait être modifié, parce qu'il serait un peu incohérent de demander un dossier à l'ANDRA avant que ne soit votée une loi sur la réversibilité et la récupérabilité. Quel est votre avis sur ce point ? Lors de l'audition de la CNE2 par l'OPECST, j'avais demandé à quels éléments les parlementaires devraient être attentifs en matière de réversibilité ; son président m'avait répondu que la CNE2 aimerait être saisie sur ce point, ce qui m'avait stupéfié. Je n'avais pas envisagé que cette question puisse ne pas être étudiée par votre commission !

Le président Brottes a peut-être été un peu… incisif tout à l'heure, mais convenez que les parlementaires ne peuvent décider seuls de tout ce qu'il faudrait mettre sous le terme « réversibilité » : il faudra bien que les techniciens compétents nous éclairent sur de grandes lignes et sur les diverses options possibles. Il est pour le moins inquiétant que la CNE2 n'ait pas été saisie sur le sujet, alors même que le Parlement est censé voter une loi l'année prochaine…

Enfin, quelle est votre analyse sur les provisions constituées par les entreprises ? Nous savons qu'elles l'ont été en fonction d'un coût de 15 milliards que la Cour des comptes et vous jugez sous-évalué. Il en résulte qu'elles sont, elles aussi, sous-évaluées, ce qui n'est pas sans poser problème. Même si, comme vous l'indiquez, l'impact sur le kilowattheure n'est pas très important, il s'agit bien de faire payer au consommateur – dès l'instant où il utilise l'électricité – l'ensemble des coûts, et non de les reporter sur d'autres. La juste évaluation des provisions est donc une question cruciale, ne serait-ce que d'un point de vue éthique.

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