Les réponses à vos questions, monsieur le président, éclairent bien les fondamentaux qui sous-tendent le scénario négaWatt.
Avant même l'énergie finale, on trouve l'énergie utile, c'est-à-dire la chaleur, le nombre de calories nécessaires pour maintenir la température d'une pièce par exemple. En choisissant de passer de 21 à 19 degrés, on obtient des négawatts grâce à la sobriété énergétique.
L'énergie finale correspond à l'énergie distribuée au consommateur tandis que l'énergie primaire correspond à la ressource énergétique initiale. L'analyse de la chaîne énergétique réserve de belles surprises : on constate ainsi que l'usage peut permettre des gains énergétiques importants dès lors que le service attendu et les besoins sont déterminés afin d'éviter les consommations superfétatoires ou le gaspillage.
Dans la production nucléaire actuelle, le volume d'énergie lié au rendement des centrales, sous forme de chaleur, est perdu. Il représente 830 milliards de kilowattheures, soit plus que le chauffage de tous les logements et les bâtiments tertiaires de France. Il y a très peu de co-génération. La différence entre l'énergie primaire et l'énergie finale reflète le rendement énergétique du système.
Certaines notions utilisées, que vous n'avez pas citées, n'ont aucun sens. C'est le cas de l'électricité primaire : elle n'existe pas – il n'y a ni gisement, ni mine. L'électricité est un vecteur énergétique, c'est l'uranium qui est l'énergie primaire. Il faut faire plus de pédagogie.
NégaWatt propose un scénario – le troisième pour elle – qui a demandé dix ans de travail à des experts qui sont des gens de terrain. On ne peut pas comprendre ce scénario si on ne s'interroge pas sur les risques énergétiques. Cette question n'a pas été suffisamment posée lors du débat sur la transition énergétique alors qu'il s'agit d'une question sociétale et politique forte. Doit-on prendre le risque nucléaire ou pas ? Le risque est faible, nous l'admettons, mais ses conséquences sont immenses. Peut-on continuer malgré les risques ou essayer de limiter ceux-ci ? Il existe, en outre, d'autres risques, notamment les risques géopolitiques liés au pétrole.
Le scénario que nous présentons repose sur une gageure : peut-on sortir de tous les risques sur une période de trente ou quarante ans ? Existe-t-il une trajectoire possible pour y parvenir ? La trajectoire nous semble d'ailleurs plus pertinente que l'horizon.