Intervention de Thierry Salomon

Réunion du 17 avril 2014 à 15h30
Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Thierry Salomon, président de l'association négaWatt :

Si l'Ukraine avait adopté un scénario négaWatt, elle serait plus résiliente face à l'ours russe.

La notion de résilience est très importante dans le système énergétique. Il faut construire un système dans lequel la prise de risque est minimale.

La sobriété et l'efficacité énergétique ainsi que le développement des énergies du pays – la France possède les six grands types d'énergie renouvelable – permettent d'être mieux armés face aux risques.

Le scénario de négaWatt propose un mix décarboné à hauteur de 90 % pour la production d'électricité en 2050. Il est composé de la manière suivante : 48 % d'éolien, 21 % de photovoltaïque, 20 % d'hydraulique, 6 % de gaz d'origine renouvelable et 5 % pour la géothermie et les énergies marines, ce qui laisse une marge en cas d'innovations technologiques. Ce travail examine l'équilibre entre l'offre et la demande sur le réseau d'électricité de manière très précise.

Notre scénario ne s'oppose pas à l'électricité, mais plaide pour le développement de ses usages les plus nobles. La part de mètres carrés chauffés à l'électricité dans le résidentiel reste stable, tandis que la part des voyageurs par kilomètre effectué grâce à l'électricité passe de 8 % en 2010 à 31 % en 2050, soit une multiplication par quatre, et celle des tonnes transportées par kilomètre passe de 7 à 38 %.

S'agissant du nucléaire, nous avons décidé d'examiner la situation réacteur par réacteur et de partir de l'hypothèse qu'aucun d'entre eux ne dépasserait les quarante ans. Autrement dit, sur le plan économique, la vie et la production de l'ensemble des réacteurs seraient soumises à cette limite de temps. Cela éviterait de repartir sur cinquante, voire soixante ans. Or il est clair que l'on se dirige vers les soixante ans, dans la mesure où les investissements sont considérables. Cette limite une fois fixée, il faut prévoir le développement des énergies renouvelables. Mais dans la mesure où celles-ci ne se développent pas en un jour, leur montée en puissance doit être réaliste et acceptable.

Notre scénario porte sur une diminution du nucléaire en trois phases : premièrement, un arrêt rapide des réacteurs qui semblent présenter le plus de risques, soit sept ou huit ; deuxièmement, une phase de réduction assez régulière, mais évidemment rapide ; troisièmement, une phase de clôture assez rapide vers 2030-2033, un peu comme le prévoit l'Allemagne – en effet, à un certain moment, il faut fermer l'amont et l'aval du cycle. Cela suppose d'avoir réfléchi aux contraintes de sûreté et aux contraintes énergétiques qui y sont liées.

Le développement des énergies renouvelables doit être maîtrisé et cohérent. Selon notre scénario, pour l'éolien, le rythme maximal d'installation, à terre, serait de 1,75 GW par an. En Allemagne, 3 GW ont été installés en 2013. Les Allemands ont donc déjà fait deux fois mieux. Pour le photovoltaïque, nous envisageons d'installer au maximum, vers 2025, 3 GW par an. L'année dernière, en Allemagne, 3,4 GW ont été installés. Nous sommes donc sur des rythmes que notre voisin a connus et même dépassés.

Au final, on arrive à un résultat assez intéressant, qui est la stabilisation du gaz fossile. Pourquoi du gaz d'origine fossile importé ? Parce que ce scénario ne développe pas le gaz de schiste.

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