Trois facteurs contribuent à créer une perspective qui n'a pas été anticipée ; ils plaident tous pour la nécessité d'une nouvelle stratégie. Le premier facteur est la décision du président Hollande de réduire la part de l'énergie nucléaire à 50 % à l'horizon 2025 ; le deuxième est la perspective d'un « non-besoin » d'une vingtaine de réacteurs, ainsi que l'a évoqué devant cette commission le directeur général de l'énergie et du climat ; le troisième est l'échéance des quarante ans pour les réacteurs de 900 mégawatts, notamment ceux qui sont moxés : que fera-t-on si ces derniers ne reçoivent pas leur autorisation de fonctionnement jusqu'à quarante ans, sachant que, en début d'année, seule l'unité n° 1 de Tricastin avait reçu un avis favorable ?
Un document de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), cité lors d'une précédente audition ce matin, envisage deux scénarios pour la durée de vie des réacteurs, l'un prenant en compte leur renouvellement, l'autre se fondant sur leur arrêt au bout de quarante ans. Selon les responsables de l'ANDRA, que nous avons interrogés, ce schéma a été conçu par EDF. Je suis donc surpris qu'EDF cite l'ANDRA en la matière ; une clarification s'impose peut-être. Reste que l'arrêt des réacteurs moxés à l'âge de quarante ans impliquerait qu'on cesse de séparer le plutonium, donc qu'on arrête le retraitement, si l'ensemble des stocks de plutonium est susceptible d'être absorbé dans les réacteurs existants. L'arrêt de retraitement en 2018-2019 a été envisagé avec vingt-deux réacteurs moxés, soit deux ans et deux réacteurs de plus qu'initialement prévu. Se pose de toute façon, de manière aussi urgente, la question des stocks de plutonium étranger.
À partir de ces constats, nous avons bâti trois scénarios. Le premier prévoit une reconversion du retraitement vers l'entreposage prolongé des combustibles irradiés, notamment à sec, le démantèlement, le conditionnement des déchets et l'immobilisation du plutonium. Le deuxième scénario envisage une sortie du retraitement au rythme de la fermeture progressive des réacteurs 900 mégawatts moxés, ainsi que l'envisageait l'accord préélectoral PS-Verts. Enfin, le troisième scénario propose de remplacer les réacteurs 900 mégawatts par d'autres réacteurs moxés – il pourrait s'agir, théoriquement, des réacteurs 1 300 mégawatts ou de l'EPR de Flamanville, mais, pour le moment, aucune autorisation n'a été donnée ni aucun détail technique, et aucun dossier n'est instruit par l'Autorité de sûreté nucléaire.