Intervention de Allain Bougrain Dubourg

Réunion du 14 mai 2014 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Allain Bougrain Dubourg, corapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique » :

L'EEDD concerne également le monde du travail. Elle doit nourrir et accompagner les mutations de notre appareil productif et pourrait figurer dans le rapport de développement durable réalisé par les entreprises. Celui-ci mentionnerait ainsi les actions de formation et de sensibilisation à la protection de l'environnement engagées par l'entreprise. Les représentants des entreprises de la section environnement sont plutôt sensibles à cette thématique. Dans cette logique, nous avons proposé que l'EEDD soit rapprochée des autres démarches de responsabilité sociétale des entreprises et organisations, ce qu'on appelle la RSE et la RSO.

Quant à la formation continue de l'EEDD, elle doit permettre à chacun d'acquérir une culture générale afin de mieux comprendre son environnement, en actualiser les enjeux et acquérir un langage commun sur les questions d'environnement et de développement durable. Nous souhaitons que la réflexion sur l'EEDD rejoigne celle sur l'évolution des métiers existants, les nouveaux métiers et les formations correspondantes. Cela passe par le renforcement du rôle des Observatoires prospectifs des métiers et des qualifications. Dans de nombreuses branches, les formations intègrent la dimension environnementale et le développement durable, mais une vision d'ensemble fait encore défaut. Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) doivent sensibiliser davantage les entreprises et les formateurs à cette thématique. Ces formations devront également s'adresser aux dirigeants et aux représentants de l'État au niveau national et territorial.

Enfin, l'entreprise se conforme de plus en plus à l'EEDD dans toutes ses dimensions, de son mode de fonctionnement à sa gestion des déchets, en passant par sa consommation d'énergie et sa gestion des espaces extérieurs. Il convient donc de former prioritairement à l'environnement et au développement durable les salariés en charge de l'organisation des lieux de travail, qu'il s'agisse de la direction des achats, du service informatique, des ressources humaines ou de la communication.

Les citoyens et les consommateurs doivent être des acteurs avertis tout au long de leur vie. C'est pourquoi nous avons besoin d'un affichage environnemental « multicritères ». L'Institut national de la consommation (INC) y est très favorable.

Les médias sont un levier essentiel de l'EEDD. Nous avons apprécié les efforts réalisés par le service public, mais les émissions qui diffusent ce message sont encore trop rares. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) pourrait jouer un rôle dans ce domaine. Quant à la presse écrite, quelques quotidiens régionaux consacrent des pages remarquables à l'environnement, mais la page Planète du journal Le Monde est en voie de disparaître et celles consacrées à l'environnement par Libération sont de moins en moins étoffées.

Les initiatives individuelles et citoyennes doivent être valorisées. Je vous invite à ce titre à vous procurer un fascicule intitulé « Les sciences participatives au Muséum national d'Histoire naturelle ». Ce document, initié par le Muséum et soutenu par un réseau d'associations de protection de la nature détenant une expertise sur l'état des populations des espèces, a été établi grâce à la participation de 15 000 amateurs éclairés. Sans ces personnes, souvent bénévoles, la science ne pourrait pas avancer en France.

Comme l'a déjà indiqué le CESE, notre patrimoine naturel ne peut se limiter à la seule culture. Comme pour le Patrimoine mondial de l'humanité, initié dans les années 1960 par l'UNESCO – l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture – la nature doit être accolée à la culture. Le patrimoine français ne se limite pas à la Joconde, il englobe aussi le Marais poitevin, les Alpes maritimes et les loups, le marais de Rochefort et beaucoup de territoires remarquables…

À ce titre, nous souhaitons que les Journées européennes du patrimoine, qui se déroulent chaque année le 3ème week-end de septembre, ne soient plus seulement consacrées à la culture et aux bâtiments historiques, mais également à la nature. Cette démarche, que j'ai proposée au Président de la République lui-même, n'est pas aisée à mettre en oeuvre car d'aucuns craignent que la nature fasse de l'ombre à la culture. Mais notre insistance a payé puisque cette année, pour la première fois, les Journées européennes du patrimoine auront pour thème « Patrimoine culturel, Patrimoine naturel ». J'espère qu'avec votre aide nous pourrons pérenniser cette initiative.

Nous sommes convaincus que dans la période de crise que nous traversons, l'EEDD peut contribuer à redonner un sens à notre société. Comme le renard dit au Petit Prince « Tu es responsable de ce que tu as apprivoisé », nous avons apprivoisé la planète et désormais nous en sommes responsables.

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