Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Réunion du 14 mai 2014 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • EEDD
  • biodiversité

La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION

Mercredi 14 mai 2014

La séance est ouverte à neuf heures trente

(Co-présidence de M. Michel Ménard, vice-président, puis de M. Patrick Bloche, président de la Commission des affaires culturelles, et de Mme Catherine Quéré, vice-présidente de la Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire)

La Commission entend, au cours d'une audition commune avec la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, Mme Anne-Marie Ducroux, présidente de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental (CESE), et MM. Allain Bougrain Dubourg et Antoine Dulin, rapporteurs au nom de la section de l'environnement du CESE, sur l'avis intitulé « L'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique ».

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Poursuivant les auditions des rapporteurs du Conseil économique, social et environnemental (CESE), la Commission du développement durable et celle des affaires culturelles accueillent aujourd'hui les membres de la section de l'environnement du CESE.

Il est toujours bon de rappeler que le développement durable a trois composantes - environnementale, économique et sociale. L'imminence du débat sur la transition écologique et énergétique souligne l'intérêt des thèmes liés à l'éducation et à l'information.

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Je souhaite la bienvenue aux trois intervenants qui vont évoquer l'éducation à l'environnement, question indispensable si nous voulons que nos enfants deviennent des adultes respectueux de la planète.

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Anne-Marie Ducroux, présidente de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental

Je remercie les présidents et les membres de vos deux commissions. Si nous sommes entendus pour la première fois par la Commission des affaires culturelles et de l'éducation, nous retrouvons avec plaisir les membres de la Commission du développement durable.

La section environnement du CESE, issue de la réforme, occupe 75 % des nouveaux conseillers et travaille sur une grande partie des thématiques correspondant aux enjeux environnementaux. Ainsi en janvier 2013, nous avons rendu un avis sur la transition énergétique, et le Gouvernement devrait saisir prochainement le CESE sur le projet de loi de programmation sur la transition énergétique. Nous avons également rendu des avis sur les océans et la biodiversité et, en 2013, un avis sur l'éducation à l'environnement et au développement durable (EEDD). En 2014, nous rendrons un avis sur les inégalités environnementales et sociales. Il s'agit d'un sujet émergent dont il est difficile de déterminer le périmètre, mais pour lequel il est important que nous trouvions des pistes de réflexion.

Nous rendrons aujourd'hui même un avis sur l'adaptation climatique, en présence de Jean Jouzel et d'Antoine Bonduelle, et nous avons l'intention de rendre, avant la fin de l'année, un avis sur l'atténuation climatique. Nous aurons ainsi rendu avant le début de 2015 un avis sur les deux aspects de la politique en matière climatique.

L'éducation à l'environnement est un fil conducteur de tous nos avis et fait l'objet de recommandations de notre part dans l'ensemble des thématiques que nous traitons. Elle est également un fil rouge pour vous, mesdames et messieurs les députés, car j'ai lu avec plaisir que le projet de loi sur la biodiversité comportait un chapitre consacré à la formation et à la communication, et j'espère qu'il en ira de même du projet de loi de programmation sur la transition énergétique.

Cet avis a été établi à la suite de la saisine du Premier ministre. Celle-ci ne portait pas sur la formation initiale, mais les rapporteurs et la section, dans un souci de cohérence, ont souhaité l'intégrer à leur réflexion. Comme vous le savez, l'éducation était l'un des sujets abordés au cours de la Conférence environnementale et sera sans doute une composante de la stratégie nationale de transition écologique. Cet avis a recueilli 168 voix sur 176 votants au sein du CESE, ce qui traduit l'adhésion des membres du Conseil aux enjeux de ce thème.

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Allain Bougrain Dubourg, corapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique »

« L'éducation est l'arme la plus puissante que l'on puisse utiliser pour changer le monde » disait Nelson Mandela. En ce début de 21e siècle, le changement s'impose à nous : dérèglements climatiques, érosion, biodiversité, population mondiale de 9 milliards d'habitants d'ici 2050. Ces changements complexes doivent être compris de tous.

Nous avons pris le terme « éducation » au sens large, ce qui inclut l'information et la sensibilisation. L'éducation à l'environnement et au développement durable est une éducation à la complexité, à la solidarité et à la citoyenneté. Elle doit permettre à chacun de devenir un acteur responsable, capable de faire des choix pour inventer un nouveau mode de relations entre les hommes, d'une part, entre les hommes et la nature, d'autre part, et de dépasser notre vision anthropomorphique de la planète.

L'éducation à l'environnement et au développement durable a planté ses racines hors du champ de l'école. Les associations d'éducation populaire, les associations savantes de protection de la nature, les mouvements de scoutisme sont les premiers à tenter de sensibiliser nos concitoyens à la nature, puis par la suite aux enjeux environnementaux. En 1992, lors du Sommet de la terre à Rio, nous avons mobilisé les énergies au niveau mondial. J'avais à l'époque la naïveté de croire qu'aujourd'hui, en 2014, les problèmes seraient réglés – hélas, nous n'en sommes qu'aux balbutiements.

Les différents acteurs de l'éducation à l'environnement se rassemblent désormais à l'occasion d'assises territoriales et nationales. Le fait que la dernière Conférence environnementale ait retenu ce thème démontre son importance.

Nous avons néanmoins identifié trois obstacles à surmonter.

Le premier est de considérer que l'éducation à l'environnement s'adresse exclusivement aux enfants. Nous croyons, nous, à la nécessité d'une formation tout au long de la vie.

Le deuxième frein est de croire que des gestes simples pourraient suffire à répondre à la situation. Interrogeons-nous plutôt sur le sens à donner à ces actions. Il nous faut favoriser le sens de l'émotion et de l'émerveillement, réveiller nos sens et apprendre à toucher, caresser, sentir, écouter, que l'on soit riche ou pauvre. Enfin, nous devons prendre en compte le fait que certains intérêts, du fait de l'interdépendance des enjeux, s'avèrent contradictoires.

Nous avons rédigé notre avis comme s'il s'agissait d'une boîte à outils afin de permettre à tous – État, collectivités territoriales, entreprises, associations, élus, ministère de l'éducation nationale – d'engager une action volontariste.

M. Patrick Bloche remplace M. Michel Ménard pour assurer la co-présidence de la séance.

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Antoine Dulin, co-rapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique »

La saisine du Premier ministre ne portait pas sur la formation initiale. Le CESE, en s'appuyant notamment sur le travail de Jacques Moret, recteur de l'Académie de Poitiers, a considéré qu'elle devait être abordée puisqu'elle détermine l'entrée dans la vie active.

Nous avons distingué l'éducation formelle et l'éducation non formelle, qui, pour une grande part, relève d'initiatives bénévoles. Elle bénéficie également du soutien de l'administration et peut s'épanouir dans le cadre du service civil.

Véritable éducation à la responsabilité, l'éducation à l'environnement et au développement durable, l'EEDD, est au coeur de l'apprentissage de la citoyenneté. Le CESE a fait quelques recommandations relatives à l'éducation scolaire et non formelle. Il préconise de systématiser les projets et démarches EEDD dans les établissements scolaires, notamment par la mise en place dans chaque établissement d'un espace biodiversité qui participe à l'apprentissage des fondamentaux, tout en permettant à chaque enfant de découvrir le vivant et son territoire par une approche sensorielle qui développe la sensibilité et l'émotion esthétique.

Le CESE préconise également une approche transdisciplinaire. L'EEDD n'est pas une matière à proprement parler mais elle permet de poser en termes scientifiques des questions complexes recouvrant plusieurs matières, des sciences à la philosophie. Elle ne doit pas se réduire à l'ajout d'un module supplémentaire, car c'est bien la mise en cohérence de toutes les disciplines qui permet à l'élève de comprendre la complexité des enjeux du développement durable et de devenir un acteur de son apprentissage.

Nous avons également souligné le besoin d'inscrire dans les emplois du temps une pédagogie de projet, à l'instar des travaux personnels encadrés (TPE), basée sur une séquence d'EEDD hebdomadaire ou mensuelle, dispensée de la primaire à la terminale. Cette pratique, qui peut être mise en place à moyens constants par les enseignants, fait des élèves les acteurs d'une véritable démarche d'investigation, en lien avec les réalités de leur territoire, tout en les faisant bénéficier de savoirs scientifiques.

Nous avons également souhaité inscrire le respect et la protection de la planète et du vivant dans l'enseignement de la morale laïque et civique – comme le préconise la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école – et donner aux élèves la possibilité de renouer le contact avec la nature. Nous assistons malheureusement, depuis plusieurs années, au déclin des classes découvertes et des sorties nature, pourtant porteuses de valeur comme la simplicité et la découverte de l'environnement naturel et du terroir. Ces sorties scolaires doivent être systématisées et valorisées, qu'il s'agisse de sorties de terrain ou de séjours en pleine nature, ce qui passe par une évaluation et une simplification de la réglementation en vigueur afin d'alléger la responsabilité qui pèse sur les organisateurs et les enseignants. Cela passe également par la mutualisation des moyens, notamment des collectivités locales, et par l'assouplissement de l'organisation administrative.

Enfin, nous avons rappelé la nécessité de définir un certain nombre de principes pédagogiques et déontologiques. C'est pourquoi nous avons proposé la mise en place d'une Charte nationale que les acteurs extérieurs de l'EED – associations, entreprises, collectivités – s'engageront à respecter, sous la responsabilité des chefs d'établissement et des enseignants.

En ce qui concerne l'enseignement supérieur, le CESE a rappelé l'intérêt des campus verts et de tout ce qui est mis en place par l'enseignement supérieur, en insistant sur la nécessité de former les professionnels de l'éducation nationale à l'EEDD, notamment au sein des nouvelles Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ÉSPÉ).

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Allain Bougrain Dubourg, corapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique »

L'EEDD concerne également le monde du travail. Elle doit nourrir et accompagner les mutations de notre appareil productif et pourrait figurer dans le rapport de développement durable réalisé par les entreprises. Celui-ci mentionnerait ainsi les actions de formation et de sensibilisation à la protection de l'environnement engagées par l'entreprise. Les représentants des entreprises de la section environnement sont plutôt sensibles à cette thématique. Dans cette logique, nous avons proposé que l'EEDD soit rapprochée des autres démarches de responsabilité sociétale des entreprises et organisations, ce qu'on appelle la RSE et la RSO.

Quant à la formation continue de l'EEDD, elle doit permettre à chacun d'acquérir une culture générale afin de mieux comprendre son environnement, en actualiser les enjeux et acquérir un langage commun sur les questions d'environnement et de développement durable. Nous souhaitons que la réflexion sur l'EEDD rejoigne celle sur l'évolution des métiers existants, les nouveaux métiers et les formations correspondantes. Cela passe par le renforcement du rôle des Observatoires prospectifs des métiers et des qualifications. Dans de nombreuses branches, les formations intègrent la dimension environnementale et le développement durable, mais une vision d'ensemble fait encore défaut. Les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) doivent sensibiliser davantage les entreprises et les formateurs à cette thématique. Ces formations devront également s'adresser aux dirigeants et aux représentants de l'État au niveau national et territorial.

Enfin, l'entreprise se conforme de plus en plus à l'EEDD dans toutes ses dimensions, de son mode de fonctionnement à sa gestion des déchets, en passant par sa consommation d'énergie et sa gestion des espaces extérieurs. Il convient donc de former prioritairement à l'environnement et au développement durable les salariés en charge de l'organisation des lieux de travail, qu'il s'agisse de la direction des achats, du service informatique, des ressources humaines ou de la communication.

Les citoyens et les consommateurs doivent être des acteurs avertis tout au long de leur vie. C'est pourquoi nous avons besoin d'un affichage environnemental « multicritères ». L'Institut national de la consommation (INC) y est très favorable.

Les médias sont un levier essentiel de l'EEDD. Nous avons apprécié les efforts réalisés par le service public, mais les émissions qui diffusent ce message sont encore trop rares. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) pourrait jouer un rôle dans ce domaine. Quant à la presse écrite, quelques quotidiens régionaux consacrent des pages remarquables à l'environnement, mais la page Planète du journal Le Monde est en voie de disparaître et celles consacrées à l'environnement par Libération sont de moins en moins étoffées.

Les initiatives individuelles et citoyennes doivent être valorisées. Je vous invite à ce titre à vous procurer un fascicule intitulé « Les sciences participatives au Muséum national d'Histoire naturelle ». Ce document, initié par le Muséum et soutenu par un réseau d'associations de protection de la nature détenant une expertise sur l'état des populations des espèces, a été établi grâce à la participation de 15 000 amateurs éclairés. Sans ces personnes, souvent bénévoles, la science ne pourrait pas avancer en France.

Comme l'a déjà indiqué le CESE, notre patrimoine naturel ne peut se limiter à la seule culture. Comme pour le Patrimoine mondial de l'humanité, initié dans les années 1960 par l'UNESCO – l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture – la nature doit être accolée à la culture. Le patrimoine français ne se limite pas à la Joconde, il englobe aussi le Marais poitevin, les Alpes maritimes et les loups, le marais de Rochefort et beaucoup de territoires remarquables…

À ce titre, nous souhaitons que les Journées européennes du patrimoine, qui se déroulent chaque année le 3ème week-end de septembre, ne soient plus seulement consacrées à la culture et aux bâtiments historiques, mais également à la nature. Cette démarche, que j'ai proposée au Président de la République lui-même, n'est pas aisée à mettre en oeuvre car d'aucuns craignent que la nature fasse de l'ombre à la culture. Mais notre insistance a payé puisque cette année, pour la première fois, les Journées européennes du patrimoine auront pour thème « Patrimoine culturel, Patrimoine naturel ». J'espère qu'avec votre aide nous pourrons pérenniser cette initiative.

Nous sommes convaincus que dans la période de crise que nous traversons, l'EEDD peut contribuer à redonner un sens à notre société. Comme le renard dit au Petit Prince « Tu es responsable de ce que tu as apprivoisé », nous avons apprivoisé la planète et désormais nous en sommes responsables.

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Antoine Dulin, co-rapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique »

Nous en sommes tous responsables, c'est pourquoi l'avis du Conseil fait de l'EEDD un projet collectif et porteur de changements, tant au niveau territorial que national.

Nous souhaitons que les lois à venir, celle sur la biodiversité comme celle sur la transition énergétique, comprennent un volet éducation qui se traduise dans les plans et les schémas des politiques publiques. Souvenons-nous qu'un grand nombre de politiques publiques ont échoué faute d'information et d'éducation. Or tous les acteurs que nous avons rencontrés nous ont fait part de l'absence totale d'état des lieux, au niveau territorial comme au niveau national, concernant les différentes initiatives menées dans le domaine de l'EEDD.

La section environnement du CESE a créé une plateforme sur internet. Ce site a recueilli plus de 250 initiatives, ce qui nous a permis d'appréhender la variété des actions proposées et des acteurs qui sont issus des entreprises, du monde associatif, de l'éducation nationale. Nous recommandons la réalisation, dans les meilleurs délais, d'une cartographie et d'une évaluation quantitative et qualitative des actions, qui pourrait s'appuyer sur les développements de la recherche en EEDD. Malheureusement, celle-ci est encore inexistante dans notre pays, ce qui n'est pas le cas dans différents pays étrangers, notamment dans les domaines de l'éco-sociologie et de l'éco-psychologie.

Notre section a également abordé la question des moyens financiers consacrés à l'EEDD face à la diminution des subventions publiques, nationales et territoriales. À titre d'exemple, le budget que lui consacre l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) a baissé de 70 % entre 2009 et 2013, et les subventions attribuées aux associations de protection de nature ou aux associations d'éducation populaire par le ministère de l'écologie et les services déconcentrés ont baissé de moitié en dix ans. Nous demandons que les actions menées dans le cadre de l'EEDD fassent l'objet de financements pluriannuels inscrits dans des conventions d'objectifs. Cette disposition pourrait être proposée dans le cadre du projet de loi relatif à l'économie sociale et solidaire actuellement examiné par l'Assemblée nationale.

Enfin, l'EEDD ne saurait avoir un réel impact sans une implication cohérente de tous les acteurs mobilisés dans l'action et la transition énergétique. Les discours sans les actes n'ont jamais porté leurs fruits. C'est pourquoi nous encourageons les démarches comme l'Agenda 21, outil destiné aux collectivités locales, et les initiatives prises par certains établissements d'enseignement scolaire et supérieur en matière de développement durable.

Nous attirons votre attention sur les risques d'abandon du dispositif « État exemplaire » issu du Grenelle de l'environnement, alors qu'il conviendrait de réviser à la hausse ses objectifs en alignant a minima les obligations du secteur public sur celles fixées aux entreprises privées. Les administrations, les collectivités locales, les acteurs privés et associatifs se devant d'être exemplaires, il leur faut se soumettre à un certain nombre d'obligations de gestion durable. Nous avons encouragé le CESE lui-même à s'investir dans cette démarche et nous espérons que les autres assemblées, Sénat et Assemblée nationale, suivront.

L'EEDD constitue un levier essentiel à l'indispensable transition écologique qui se met en place en ce début de 21e siècle. Mais cette notion, qui s'inscrit dans des secteurs aussi divers que l'éducation nationale, l'entreprise, les médias, les collectivités territoriales, l'administration, l'agriculture et les associations en tous genres, pâtit de sa complexité. Il faut lui assurer une cohérence, améliorer sa lisibilité et prévoir des actions transversales.

L'EEDD ne doit pas être perçue comme une contrainte mais comme une remarquable potentialité, souvent ludique, susceptible de faire du citoyen un éco-citoyen. Elle participe au mieux-être, au mieux-vivre et à la solidarité, elle contribue à réduire les inégalités d'appréciation et elle est source d'émotions multiples. Pourtant, combien de jeunes sortis de l'université – et combien de personnes dans cette salle – sont aujourd'hui capables d'identifier dix arbres, dix plantes ou dix oiseaux ? Combien savent lire le livre de la nature ? Ceux qui le peuvent disposent là d'une richesse particulière, à la portée de tous.

Alors que notre pays connaît une situation économique, sociale et environnementale difficile, l'EEDD, nous en avons la conviction, peut nous aider à retrouver un sens commun. Après avoir été longtemps liée à l'engagement d'un certain nombre de personnes, elle doit devenir une véritable politique nationale dotée de moyens à la hauteur de ses enjeux.

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Je vous remercie. La présence ce matin de nombreux membres de nos deux commissions témoigne de notre intérêt pour votre travail.

J'ai noté votre souhait de dédier le temps périscolaire à l'EEDD, comme le permet l'aménagement récent des rythmes scolaires. Nous sommes nombreux ici – ou tout au moins majoritaires – à partager votre sentiment.

Pour ce qui est d'ouvrir les Journées du patrimoine aux éléments du patrimoine naturel, nous avons bien entendu votre appel.

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Je vous remercie à mon tour, madame, messieurs, et je félicite les rapporteurs pour leur présentation à deux voix.

Vos propositions s'adressant à des publics très divers – collégiens, étudiants, citoyens, salariés, consommateurs – faut-il cibler les objectifs éducatifs selon le public concerné ?

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Au nom de mes collègues du groupe socialiste, je vous remercie. Nous partageons votre avis sur quatre points : l'état des lieux, à savoir la fragilité de la planète, l'urgence qu'il y a à agir, l'objectif – construire un monde durable – et les moyens, c'est-à-dire l'éducation. Sur les outils que vous proposez pour développer l'éducation à l'environnement, nous ne pouvons que nous retrouver.

En revanche, il y a un point sur lequel je ne suis pas persuadée que nous pourrons nous retrouver : il s'agit de la notion même de développement durable. Car parlons-nous de la même chose ? Nous avons tous en tête le rapport Brundtland qui le définit comme un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins. Cette définition est louable et l'intention est bonne, mais comment fait-on concrètement ? Quelles actions et quels moyens devons-nous mettre en oeuvre pour y parvenir ?

Les participants à la Conférence environnementale étaient censés partager et défendre les mêmes valeurs, pourtant il est apparu que le développement durable se limitait pour certains à un « verdissement », tandis que d'autres voulaient s'assurer de la durabilité d'activités existantes qui ne sont pas forcément durables. Vous souhaitez que soit établi un état des lieux de l'ensemble des initiatives prises en matière d'éducation à l'environnement et de développement durable : nous considérons que c'est un premier pas.

Quelques mois plus tard, une navigatrice, à la tête d'une fondation reconnue d'intérêt général et qui mène des actions d'éducation à l'environnement, prenait la défense des gaz de schiste dans un journal parisien. D'où la nécessité de nous interroger sur ce que recouvre la notion de développement durable.

Monsieur Bougrain Dubourg, vous disiez hier au Sénat que nous marchons en spectateurs éclairés vers une catastrophe annoncée. Nous sommes éclairés, en effet, mais il est urgent que nous passions à la seconde étape de notre réflexion et que nous nous mettions d'accord, indépendamment de nos convictions politiques, sur le vrai sens du développement durable.

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Je remercie les membres du CESE pour leur rapport dont nous ne pouvons, au groupe UMP, que partager les grands principes. Il est incontestable et incontesté que la transition écologique nous oblige à faire évoluer notre modèle économique et social, et cela dans un contexte de mondialisation. Au-delà d'un simple « verdissement » de nos politiques actuelles, il faut une prise de conscience générale si nous voulons préserver notre environnement et offrir un avenir aux générations futures.

La Charte de l'environnement de 2004 stipulait déjà, dans son article 2, que « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement car l'avenir et l'existence de l'humanité sont indissociables de son milieu naturel ». L'EEDD est indispensable pour responsabiliser les consommateurs que nous sommes et elle est au coeur de l'apprentissage de la citoyenneté. C'est une notion que je partage totalement.

J'ai la chance d'habiter un parc naturel régional, le Parc des Vosges du Nord. Depuis une vingtaine d'années, grâce à l'engagement des élus locaux, aux structures associatives, aux CINE (Centres d'initiation à la nature et à l'environnement) et à un certain nombre d'enseignants, le développement durable est devenu familier pour de nombreux concitoyens.

Après les avancées obtenues grâce au Grenelle de l'environnement, les événements organisés en 2010, Année internationale de la biodiversité, et quelques créations cinématographiques – je pense à la Marche de l'Empereur – ont contribué à cette prise de conscience.

Il faut naturellement commencer cette éducation à l'école. Ainsi que le préconise le rapport, il appartient à l'État et aux collectivités locales de mener une action volontariste en matière d'éducation, de formation et d'information. Le projet de loi pour la refondation de l'école prévoit d'intégrer l'éducation à l'environnement dans les programmes. La Commission des affaires culturelles et de l'éducation auditionnera dans une quinzaine de jours M. Alain Boissinot : nous souhaitons que le Conseil supérieur des programmes (CSP) veille à ce que l'EEDD soit traitée transversalement afin d'irriguer l'ensemble des disciplines de la maternelle au lycée. Nous verrons quelle sera sa réponse.

J'ai apprécié la richesse de votre plateforme d'initiatives, mais rares sont celles qui concernent la gestion des déchets et je le regrette.

Dans le domaine du développement durable, il faut de l'exemplarité. Les enfants d'une école de ma circonscription avaient fait beaucoup d'efforts en matière de tri sélectif. Le jour où ils se sont rendu compte que les différentes poubelles qu'ils avaient soigneusement remplies se retrouvaient dans la même benne de ramassage, leur réaction a été dramatique. Les adultes doivent se montrer exemplaires, ce qui suppose une éducation à tous les niveaux, via les entreprises et les collectivités locales.

La plupart des entreprises ont entrepris des démarches pour se voir attribuer la norme ISO 14001 et se sont dotées d'un management environnemental. C'est une avancée dont nous nous réjouissons.

Vous proposez de privilégier une approche transdisciplinaire : je partage votre souhait.

Quant à la baisse du nombre des sorties scolaires, elle est effectivement due aux contraintes administratives draconiennes qui sont dissuasives pour les responsables. Il faut y remédier car les grands défis qui sont devant nous – transition énergétique, énergies renouvelables, réchauffement climatique, préservation de la biodiversité et de la nature – commencent par l'éducation.

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Nous faisons ce matin salle comble. C'est un signe positif dont je remercie les intervenants.

Les députés du groupe Écologiste sont passionnés et très actifs dans le domaine de l'EEDD. D'ailleurs je remercie mes collègues du groupe Écologiste membres de la Commission des affaires culturelles d'avoir fait adopter dans le projet de loi pour la refondation de l'école un amendement visant à intégrer l'EEDD dans notre politique éducative.

Ma première question concerne la définition même du concept d'éducation à l'environnement et au développement durable. Pour certains, il se limite à quelques gestes éco-citoyens comme le tri des déchets. Or, celui-ci est utile mais il est à mon sens insuffisant, voire contre-productif s'il nous amène à penser que nous pouvons seulement ajuster notre mode de vie au lieu de modifier notre perception du monde.

Votre avis évoque l'éducation au changement. S'agit-il d'un changement de comportement ou d'un changement total de mode de vie ? Sachant que l'empreinte écologique des Français est largement supérieure aux capacités de la terre et que si le monde entier vivait comme nous il faudrait trois planètes, des ajustements à la marge de nos modes de vie sont tout à fait insuffisants. L'urgence de la situation, qui saute aux yeux de tous, doit nous amener à changer profondément notre perception du monde, notre comportement, nos modes de production et de consommation.

Quelle est la place et le rôle de l'EEDD face à la course à la surconsommation, au « toujours plus », ce que l'économiste Thorstein Veblen appelait la consommation ostentatoire ? Dans un contexte de mondialisation, nous assistons à un alignement des modes de vie des populations sur les modes de vie des Occidentaux, plus précisément des personnes les plus riches dans les pays riches. Face à cette attraction envers un mode de vie de plus en plus coûteux en ressources naturelles, qui pille les ressources de la planète et provoque un énorme gaspillage, l'EEDD peut-elle engendrer un mouvement suffisamment puissant pour changer le cours des choses ? Je reconnais manquer d'optimisme sur ce sujet, mais Gandhi ne disait-il pas déjà que « la terre peut répondre aux besoins de chacun, mais pas à l'avidité de tous » ?

Nous parlons de plus en plus d'adaptation aux changements climatiques et de la géo-ingénierie qui nous permettrait de sauver la planète et de préserver nos modes de vie. N'est-ce pas contradictoire avec l'éducation à l'environnement et au développement durable ?

Concernant l'exemplarité des acteurs publics, que pensez-vous d'imposer dans les administrations et les grandes entreprises une sorte d'Agenda 21 tourné vers la formation et la sensibilisation du personnel ? À l'Assemblée nationale, un plan de développement durable ne serait pas superflu…

En matière de développement durable, la formation tout au long de la vie est une nécessité.

Quant à la place des chasseurs dans l'EEDD, le code de l'environnement ainsi que diverses conventions signées entre l'éducation nationale et les fédérations de chasseurs leur confèrent un rôle en la matière. N'est-il pas contradictoire de confier aux chasseurs une mission d'éducation à l'environnement et de préservation de la biodiversité ?

Enfin, que pensez-vous de la création d'un délit d'incitation à la destruction d'espèces protégées – je pense au loup et à l'ours ? Appeler à tuer ces espèces, qu'elles soient ou non menacées, me semble aller à l'encontre de l'éducation au développement durable et à la préservation des espèces.

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J'interviens au nom du groupe UDI. Face à la fragilité de notre planète et aux interrogations que font peser sur son devenir le changement climatique et la diminution de la biodiversité, il est clair que nos enfants, mais aussi les actifs et les consommateurs doivent acquérir un socle de connaissances sur les enjeux et la pratique du développement durable. C'est la raison pour laquelle la décennie 2005-2014 avait été décrétée par les Nations Unies « Décennie pour l'éducation au service du développement durable » sous l'égide de l'UNESCO.

La grande complexité de cet enjeu vient de notre difficulté à penser le long terme. Aristote affirmait dans sa philosophie de l'action qu'un individu doit s'interroger sur les implications de ses propres actions pour les autres individus.

Il y a trente ou quarante ans, personne ne se préoccupait du réchauffement climatique alors même que la consommation de carbone sur la planète progressait de façon galopante. Le mois dernier, le magazine The Economist publiait un article indiquant que 50 % des métiers actuels auront disparu dans vingt ans. Cela signifie que seulement la moitié des métiers qu'exercent les parents des enfants qui naissent aujourd'hui seront occupés par ces derniers lorsqu'ils seront eux-mêmes en âge de travailler. Qui a vraiment conscience de cette réalité ?

La transition écologique et énergétique suppose une véritable transition intellectuelle et culturelle.

Vos propositions sont foisonnantes et concernent de nombreux domaines, à tel point que l'éducation à l'environnement irrigue littéralement la vie quotidienne des élèves, des étudiants, des actifs, des consommateurs et des familles, au risque de générer une certaine saturation qui pourrait être contre-productive. Qu'en pensez-vous ?

En ce qui concerne l'information des consommateurs, vous écrivez : « Il existe un niveau maximal d'information au-delà duquel une information supplémentaire détériore la qualité de la prise de décision du consommateur au lieu de l'améliorer, de par la complexité du traitement qu'elle entraîne ». L'éducation à l'environnement ne risque-t-elle pas d'aboutir au même effet ?

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Je vous remercie, au nom du groupe RRDP, pour toutes les informations que vous nous avez transmises.

Après plusieurs millions d'années d'évolution des espèces, l'homme, de par sa seule existence et sa volonté inconsidérée de dominer la nature, se met lui-même en danger, et nul ne peut ignorer l'accélération des atteintes faites à la biodiversité, l'extinction et la disparition programmée de certaines espèces.

Je souscris pleinement à l'idée d'une crise du vivant associant une crise environnementale et une crise économique. Ces crises ne doivent pas être traitées de manière indifférenciée. Les solutions passent nécessairement par une éducation à la nature et à la diversité du vivant. À ce titre je vous félicite pour le travail prospectif que vous accomplissez.

Nos modes de vie et de consommation, nos modes de pensée et d'action sont prédateurs. Nous déconsidérons tout. Nous gaspillons. Nous avons perdu le sens des valeurs pour ne plus nous attacher qu'à l'argent. Que pensez-vous des travaux des économistes qui entendent préserver la nature en lui attribuant une valeur monétaire ?

Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de mettre en place des programmes contribuant à la préservation de la biodiversité, mais dans un contexte de crise économique, de chômage massif et de crise de la citoyenneté, comment concilier la préservation de la biodiversité, le développement économique et social de notre territoire, et les loisirs ?

S'agissant de l'exemplarité, je vous rejoins totalement, et cela vaut naturellement pour l'Assemblée nationale, mais comment calculer les plus-values environnementales et les impacts économiques positifs induits par la biodiversité ?

Des actions sont mises en place dans nos territoires – Agenda 21, PCET (Plan climat énergie territorial), SCOT (Schémas de cohérence territoriale), Trames vertes et bleues – mais les collectivités ont du mal à se les approprier. Quels outils pouvez-vous nous proposer ?

Quel sera, selon vous, le rôle de la future Agence nationale de la biodiversité en matière d'éducation et de communication ?

Outre la qualité de vos rapports, je voudrais souligner l'état d'esprit qui prédomine au Conseil, en particulier la recherche d'un consensus. Si seulement nous pouvions suivre votre exemple ici même, à l'Assemblée nationale !

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Allain Bougrain Dubourg, corapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique »

Ce n'est pas toujours gagné, vous savez !

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Rejoignez la Commission des affaires culturelles et de l'éducation, cher collègue, car nous y parvenons.

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Vous proposez de dispenser l'EEDD pendant le temps périscolaire, alors que les journées de cours sont déjà insuffisantes pour appliquer les programmes scolaires !

Vous préconisez que les projets d'EEDD bénéficient de financements pluriannuels inscrits dans des conventions d'objectifs ainsi que de la création d'un fonds régional dédié abondé par l'État et les collectivités. Or les élus locaux, confrontés aux difficultés budgétaires, sont contraints d'opérer un recentrage drastique sur leurs compétences propres. Comme vous le savez, les régions sont tenues de prendre en charge les transports, les lycées, la formation professionnelle, l'aménagement du territoire et le développement économique. La création d'un fonds régional dédié à l'EEDD est-elle conciliable avec les restrictions actuelles des budgets de l'État et des collectivités territoriales ? Faut-il espérer une aide de l'Union européenne ou rechercher une mobilisation accrue du secteur associatif ?

Selon vous, les écoles de management et de gestion ainsi que les écoles d'ingénieurs ont un rôle d'analyse critique à jouer pour favoriser la diffusion des concepts de développement durable et de responsabilité sociale et environnementale, en particulier en matière d'évaluation. C'est tout le sens du Sustainability Iteracy Test lancé récemment par des étudiants de grandes écoles et d'universités françaises. Ce test, destiné à évaluer les compétences et les connaissances des étudiants en matière d'environnement, sera déployé dans 25 pays à partir de 2014. Je tenais à saluer cette initiative exemplaire, en lien direct avec notre propos. La France est-elle devenue un terreau fertile pour de telles idées ? Tiendra-t-elle un rôle de premier plan en la matière ?

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Promouvoir l'EEDD tout au long de la vie est une initiative que nous ne pouvons que soutenir, quelle que soit notre sensibilité politique.

Plus que jamais, dès leur plus jeune âge, les citoyens doivent être responsables de leur comportement. La tâche demeure ardue. En effet, nombreux sont ceux de nos compatriotes qui se veulent défenseurs de l'environnement mais ont un comportement opposé à leurs convictions. Nous le constatons dans nos villes, où divers déchets sont abandonnés sur les trottoirs ou dans les espaces verts, et dans nos campagnes où des appareils sont abandonnés sur les berges des rivières. Les pollueurs ne sont pas des industriels, mais des citoyens qui ont une vision purement conceptuelle de la transition énergétique.

Comment faire évoluer les mentalités pour que les bons sentiments affichés deviennent enfin concrets ? L'éducation seule est-elle suffisante ? Les pouvoirs publics ne doivent-ils pas se montrer plus coercitifs face à ces comportements ?

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Votre rapport suscite l'intérêt des députés écologistes. Souhaitant agir concrètement pour le développement durable, nous avons amendé, l'année dernière, le projet de loi de refondation de l'école afin d'introduire l'éducation à l'environnement dans la formation des écoliers et des collégiens. Car former les élèves sur les grands enjeux environnementaux est la seule manière de faire évoluer notre manière de vivre et de consommer, donc de préserver notre planète. C'est un pan essentiel du parcours citoyen que doit proposer le système scolaire. Cette éducation doit être transdisciplinaire et dépasser les enseignements magistraux, en s'intégrant dans un parcours éducatif basé sur des pédagogies innovantes.

Nous partageons votre analyse sur l'utilisation du temps périscolaire et des projets éducatifs de territoire, d'autant que nous avons en France la chance de disposer d'un monde associatif très riche. Mais il appartient aussi à l'école de la République de s'engager concrètement dans cette voie et d'engager les moyens nécessaires afin de former réellement l'ensemble des élèves. Que proposez-vous concrètement pour que l'école s'investisse de façon innovante et pour dépasser le cadre du cours magistral et de l'approche disciplinaire ?

L'environnement doit aussi s'imposer comme une nécessité dans le secondaire. Et cette approche doit être proposée dans le cadre de la formation continue par le biais du droit individuel à la formation (DIF) de Pôle Emploi.

J'en terminerai avec la formation des formateurs, qui n'apparaissait pas de façon très nette dans votre avis mais dont vous avez parlé dans votre intervention. C'est un élément essentiel dans les ÉSPÉ pour les enseignants du primaire et du secondaire, mais également pour tous les professionnels.

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L'EEDD est au coeur des défis du siècle qui commence. Le Grenelle de l'environnement a traduit cette ambition dans la loi en intégrant le développement durable dans les formations et la gestion des établissements.

Lors de la mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires, une partie du corps enseignant et certaines fédérations de parents d'élèves ont regretté le manque de pertinence pédagogique de certaines activités périscolaires. Le projet éducatif territorial doit-il réserver systématiquement une place significative à l'EEDD ?

En 2013, l'éducation nationale a lancé le Label « E3D » pour les établissements qui s'engagent dans la mise en oeuvre d'un projet de développement durable. L'État et les collectivités locales peuvent-ils améliorer la visibilité et la cohérence de ces initiatives ?

Enfin, le CESE souhaite inscrire son action et sa réflexion au coeur de la société civile, mais il peine à trouver sa légitimité. J'ai la conviction que l'EEDD et les contributions aux enjeux de la transition écologique lui permettront de se construire une nouvelle légitimité.

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Messieurs les rapporteurs, votre travail devrait encourager le Gouvernement à prendre en compte le rapport d'information sur l'accessibilité des jeunes aux séjours collectifs et de loisirs qui a été publié par l'Assemblée nationale en 2013. Je vous en remercie, d'autant que j'étais le rapporteur de ce document. Vous évoquez les réglementations : sur quels items l'évaluation des établissements doit-elle être basée ? Connaissez-vous des modèles ou des références d'organisation de sorties de terrain ou de séjours en pleine nature qu'il serait utile de diffuser largement auprès de la communauté éducative ?

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Je remercie les rapporteurs pour l'excellence de leur travail.

L'éducation, en développant la sensibilisation des enfants et des adultes, est un sujet central pour le développement durable. Je ne vous parlerai pas du loup, bien qu'il s'agisse d'un sujet majeur pour la survie de l'agro-pastoralisme, mais de la protection de la nature. Vous avez parlé de culture, de science, de recherche et d'éducation, mais vous avez peu parlé d'économie circulaire, notamment en matière de déchets. Pourtant cette notion doit être au coeur de l'EEDD. Qu'en pensez-vous ?

Je ne connais pas non plus votre avis sur le numérique. Son utilisation dans tous les domaines n'est-elle pas antinomique avec l'éducation à l'environnement ?

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Je partage votre constat concernant l'absence de pluridisciplinarité dans l'enseignement scolaire. J'attire votre attention sur l'enseignement de l'économie qui est proposé aux élèves. Je me réjouis de l'existence de l'option « Écologie, agronomie, territoires et développement durable », mais force et de constater qu'elle est disponible dans très peu d'établissements et de classes de seconde générale et technologique et de seconde agricole. L'option « Sciences économiques et sociales » est la plus courante, mais manifestement elle n'a pas encore été adaptée aux évolutions récentes de la théorie économique sur les services rendus par la biodiversité ou la sensibilité du PIB aux aléas climatiques et à l'intensité énergétique. En terminale, un seul chapitre est consacré au développement durable dans l'enseignement de l'économie sociale. Au regard de la prise en compte croissance des services économiques rendus par la biodiversité et, de façon transversale, de l'EEDD, quelles pistes doit envisager l'éducation nationale pour « verdir » l'enseignement des sciences économiques et sociales au lycée ?

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Nous ne pouvons prévoir l'avenir de façon certaine, mais nous avons la responsabilité de modifier nos comportements. L'éducation à l'environnement et au développement durable doit irriguer toute la société, à toutes les étapes de la vie, mais c'est dès le plus jeune âge qu'elle peut modifier les comportements futurs.

Les entreprises ont également un rôle à jouer. Les TPE et PME sont inci tées à mettre en place des démarches éco-responsables en matière de tri des déchets et d'économies d'énergie. Les petites entreprises sont prêtes à s'engager dans cette dynamique, dès lors qu'elles bénéficient d'un accompagnement, que les actions sont adaptées à leur spécificité et qu'elles peuvent en mesurer les impacts en termes de développement durable.

Un rapprochement entre les entreprises et les établissements d'enseignement en vue d'illustrer les enseignements par des situations concrètes serait très utile. Qu'en pensez-vous ?

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Votre suggestion d'inscrire l'éducation au développement durable dans les politiques publiques est très intéressante. J'apprécie particulièrement vos propositions concernant la formation initiale. L'Assemblée nationale associe les jeunes à cette action puisque l'un des thèmes du 19e Parlement des enfants est cette année l'impact de l'environnement sur la santé.

Le rapport souligne l'importance des associations dans les actions de sensibilisation. Or nous savons tous que le monde associatif souffre d'importants problèmes de financement qui mettent parfois en péril ses actions.

En ce qui concerne les entreprises, vous ne mentionnez pas le plan de lutte contre le gaspillage qui a été mis en place par le précédent gouvernement. Est-ce volontaire ?

Dans le contexte de la lutte contre le gaspillage et des besoins croissants de denrées des associations qui oeuvrent dans le domaine du don alimentaire, en particulier en produits frais, il est proposé aux entreprises potentiellement mécènes différents arguments en faveur du don, en particulier la défiscalisation. Avez-vous d'autres pistes à proposer ?

Selon la FAO, l'organisation de l'ONU pour l'alimentation, ce sont chaque année pas moins de 1 300 milliards de tonnes de produits alimentaires qui sont gaspillés, soit un tiers de la production mondiale. Ce chiffre donne le tournis. Quelques communes, comme celle de Herstal en Belgique, luttent contre cette gabegie alimentaire. En France, l'aide alimentaire repose essentiellement sur le volontariat et le conventionnement. Ne faut-il pas aller plus loin ?

Enfin, vous citez les associations sportives pour les efforts environnementaux qu'elles déploient lors des manifestations et pour développer l'éco-citoyenneté. Je m'en réjouis.

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L'EEDD est effectivement nécessaire tout au long de la vie du citoyen responsable. Elle est déjà présente à l'école, via les classes de découverte et les sorties nature, qui malheureusement se raréfient du fait du manque de financement et de la complexification des réglementations.

Cette éducation a toute sa place dans le primaire car plus on éduque tôt, plus cela est efficace. Au collège et au lycée, il ne me paraît pas nécessaire d'en faire une discipline supplémentaire car du fait de sa nature transversale, elle peut être intégrée dans les cours de SVT ou d'éducation civique.

Les médias ont un rôle très important à jouer et le jouent de plus en plus, nous ne pouvons que nous en féliciter.

La baisse de 70 % en quatre ans du budget que l'ADEME consacre à l'éducation à l'environnement a-t-elle une cause autre que budgétaire ?

En tant qu'élu d'un beau département rural, la Mayenne, j'aimerais que notre pays fasse mieux connaître notre patrimoine naturel et nos terroirs. Nos concitoyens prendraient ainsi conscience des enjeux de la préservation de la biodiversité.

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Les débats visant à démontrer la nécessité de nous mobiliser pour le développement durable sont superflus car si, après le dernier rapport du GIEC, nous n'en sommes pas convaincus, il ne sert plus à rien de travailler dans nos commissions, en particulier celle du développement durable.

Pour ce qui est de la participation des chasseurs à l'éducation à l'environnement, je considère qu'il ne faut exclure personne. Certes, il peut paraître antinomique de confier cette éducation à des gens qui passent leurs loisirs à « courir après les oiseaux », mais dans les faits, leur participation se passe très bien. J'ai créé sur mon territoire un Parc ornithologique, géré par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). La manière dont les chasseurs travaillent au service de la biodiversité est tout à fait exemplaire. Je regrette la dualité qui existe entre les chasseurs et les écologistes, étant moi-même l'un et l'autre. Je suis de ceux qui pensent que nous devons établir des passerelles et ne pas écarter les bonnes volontés mais les fédérer. C'est pourquoi je pense que les chasseurs ont toute leur place dans l'éducation à l'environnement.

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J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt vos exposés, messieurs, particulièrement celui d'Allain Bougrain Dubourg, étant une auditrice fidèle de l'émission « Vivre avec les bêtes ».

Il me semble toutefois qu'une piste n'a pas été explorée ; or elle suscite de nombreuses initiatives de la part des collectivités territoriales : il s'agit de la réintroduction d'usages ancestraux consistant à utiliser les animaux comme les chevaux cantonniers, les ruchers, certaines races de poules...

Comment formaliser cette démarche ? Ce n'est pas uniquement une question de financement mais de culture, de visibilité, d'envie. Je vois certains de mes collègues sourire, mais la réintroduction des chevaux cantonniers a une réelle efficacité, et le secteur hospitalier utilise la médiation animale. On sait par exemple que la présence de chiens est bénéfique pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Cette démarche serait d'autant plus intéressante que nous avons de plus en plus de difficultés pour vivre avec les bêtes.

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L'EEDD est en effet un défi majeur pour les années à venir, mais pour moi il s'agit essentiellement de modifier le regard que nous portons sur le monde et notre rapport avec le vivant. Il s'agit aussi de repenser ce que l'on appelle communément le progrès.

La création d'espaces de biodiversité serait une excellente chose, dans le temps périscolaire ou tout au long de la scolarité, car nous avons perdu notre capacité à observer, à comprendre et à respecter un certain nombre d'espèces. Pouvez-vous en dire plus sur ces espaces ?

Dans quelques semaines, nous aurons à débattre du projet de loi sur la biodiversité qui porte création de l'Agence de la biodiversité. Quel rôle jouera l'Agence en matière d'éducation à l'environnement et à la biodiversité ?

Quant à ce que peuvent faire les collectivités locales en faveur de l'éducation à l'environnement, seule une volonté politique forte peut amener tous les acteurs de la vie sociale d'un territoire à partager ces enjeux. Cela a été fait dans quelques villes, dont celle dont j'avais la charge il y a quelques mois.

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Je me réjouis de l'unanimité qui règne dans cette salle, mais il ne faudrait pas que cette unanimité ne soit qu'une façade. Je laisse de côté les contingences financières des uns et des autres pour insister sur les difficultés de l'exercice pédagogique. Une bonne pédagogie consiste à trouver un équilibre entre idéalisme et réalisme. Ainsi en matière de tri et de valorisation des ordures ménagères, beaucoup de choses ont été faites par les collectivités. Vous inspirez-vous de ce qui a été fait en matière d'information et de communication pour établir vos préconisations ?

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Je remercie à mon tour les rapporteurs. Est-il efficace de saucissonner l'éducation ? En d'autres termes, existe-t-il des éducations – à l'environnement, au civisme – ou une seule éducation, donnée dès le plus jeune âge par la famille, puis par l'école et par la société ? Je pense pour ma part que l'éducation, en tant qu'apprentissage du respect du vivant, doit être globale et non parcellisée.

Vous préconisez de renforcer certains outils, dont l'enseignement périscolaire, ce qui passe par un soutien au monde associatif. Mais l'audiovisuel et les écrans sont devenus les nounous des jeunes et leur bouillon de culture. Sachant qu'ils ne sont pas naturellement attirés par les émissions spécifiques, nous devons agir sur la publicité car elle fait d'eux de parfaits consommateurs peu soucieux de circuits courts, de tri et d'environnement. Il faut revoir le système éducatif dans son ensemble. Quoi qu'il en soit, cessons d'ostraciser certaines catégories ou groupes sociaux car c'est ensemble que nous y arriverons.

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Je salue la qualité de ce rapport et je félicite les rapporteurs pour le travail qu'ils ont accompli et l'incroyable diversité des initiatives recueillies dans tous les domaines, en particulier l'audition, pour illustrer le gaspillage alimentaire, de l'association Disco Soup.

Monsieur Dulin, quelles sont les initiatives provenant des enfants eux-mêmes ? Dans le cadre du Parlement des enfants 2014, la classe de CM2 de ma circonscription a présenté une proposition de loi qui prévoit que chaque école parraine un animal ou un végétal. Que pensent les enfants au sujet de leur éducation à l'environnement ?

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Je remercie à mon tour les rapporteurs.

J'insiste tout d'abord sur le rôle indispensable de l'éducation, en particulier l'éducation tout au long de la vie, la place essentielle des associations et l'importance de la notion de citoyenneté que vous placez au coeur de votre réflexion.

Le Gouvernement accorde une place prépondérante à l'éducation à l'environnement et au développement durable, c'est pourquoi le Conseil supérieur des programmes a pour mission de prendre en compte l'EEDD et d'adapter les programmes aux enjeux contemporains de la société.

La réforme des rythmes scolaires devrait favoriser cet apprentissage grâce au temps dégagé, ce qui permettra aux associations d'éducation populaire d'occuper une place majeure dans cet enseignement.

Bon nombre d'équipes enseignantes travaillent avec conviction sur des projets de classe ou d'établissement relatifs à l'EEDD. Comment généraliser ces pratiques ? Comment envisagez-vous le partenariat entre les associations et les établissements scolaires et les universités ? Quel rôle peut jouer l'éducation populaire ?

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Je salue la qualité et la pertinence du rapport qui vient de nous être présenté.

Plus personne ne doute de la nécessité de penser autrement l'avenir de la planète et de promouvoir l'éducation au développement durable. Cependant je voudrais vous faire part de mon inquiétude à la lecture de l'annexe n° 7 de ce document, intitulée « Évolution des préoccupations environnementales des Français » qui fait apparaître que les préoccupations environnementales des Français sont devenues une « sous priorité », derrière l'emploi, les prix et les inégalités.

En tant que député de la Guyane, territoire qui recèle un fort pourcentage de la biodiversité française et qui appartient au patrimoine national, je confirme que la situation sur le terrain est extrêmement critique.

Mon objectif n'est pas de cultiver le pessimisme, mais peut-on demander à l'école, en plus de ses missions fondamentales, de réparer tous les maux de la société et de prendre en charge l'éducation à la santé, à la sécurité routière, à la sexualité, à la citoyenneté, et maintenant à l'éducation à l'environnement et au développement durable ?

Nous espérons que la loi sur la biodiversité répondra à un grand nombre de nos interrogations, mais l'entêtement des faits associé aux contraintes budgétaires font craindre le pire ou, à tout le moins, l'impossibilité de faire évoluer durablement notre prise de conscience.

En clair, notre mobilisation en faveur de l'EEDD doit être accentuée, mais elle doit être accompagnée d'un engagement sans faille susceptible de compenser les contraintes budgétaires et économiques qui pourraient constituer un véritable frein à notre ambition collective.

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Monsieur Dulin, pouvez-vous nous en dire davantage sur la Charte nationale que vous proposez d'instaurer ?

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J'ai beaucoup apprécié vos interventions, d'autant que sans faire partie du groupe Écologiste, je suis une écologiste.

Le civisme écologique est de plus en plus présent au sein des familles, mais l'éducation nationale ne doit-elle pas également s'investir ? Lorsque j'étais enfant, j'ai beaucoup apprécié les classes de découverte, qui ont fait la preuve de leur richesse, pour les enfants mais également pour les enseignants et les familles. Hélas, elles se font rares aujourd'hui. Nous essayons de les remplacer par la réforme des rythmes scolaires et diverses animations, mais rien ne remplace un déplacement d'une semaine dans un nouvel environnement.

Je suis l'initiatrice du service civique car j'avais à l'époque déposé une proposition de loi en ce sens. Que deviennent les animateurs du service civique ? Sont-ils véritablement investis ? Ne pourrait-on les utiliser mieux encore ?

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Anne-Marie Ducroux, présidente de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental

Je vous remercie vivement, mesdames et messieurs les députés, pour l'intérêt que vous manifestez à ce sujet, comme en témoigne la maturité de vos questions. J'en ferai part à la section de l'environnement et au président du Conseil, M. Jean-Paul Delevoye.

Pour ce qui est du consensus auquel nous parvenons dans nos débats, c'est bien le rôle de la section environnement que de faire bouger les lignes et de rapprocher les points de vue pour aider les parlementaires et le gouvernement à prendre des décisions. Lorsque nous avons établi le premier avis sur la biodiversité, peu de conseillers avaient mesuré la dimension stratégique du sujet. Les débats ont été vifs au sein de la section, et si nous parvenons à des formulations consensuelles, toute idée est discutée et rien n'est anodin. Tout ce que nous écrivons, à la virgule près, fait l'objet de discussions.

S'agissant du débat sur l'environnement et le développement durable, souvenons-nous que c'est l'alerte adressée par la société civile à propos de l'environnement qui a donné lieu au Sommet du développement durable. C'est bien l'environnement qui, historiquement, nous a amenés à nous interroger sur les interactions avec les autres domaines. Nous nous sommes appuyés sur cette chronologie pour fonder notre avis. Nous avons étudié les références historiques et juridiques de la loi pour la refondation de l'école, notamment les amendements que vous avez mentionnés.

S'agissant de la géo-ingénierie, nous présentons cet après-midi même un avis sur le sujet en réunion plénière. C'est en effet l'une des solutions que nous pourrions envisager. Nous n'avons pas écarté la possibilité de poursuivre les recherches, mais nous n'avons pas retenu la géo-ingénierie comme une priorité, ni sur le plan des actions à entreprendre ni sur le plan des investissements, car l'adaptation climatique exige que nous tenions compte des besoins existants.

Je remercie M. Philippe Martin qui a pris la balle au bond lorsque nous avons présenté cet avis. Votre collègue fut l'artisan de la transformation de la plateforme d'initiatives et de sa reprise par le ministère de l'écologie, ce qui a permis à nos recommandations de prendre vie et de se concrétiser. Dans tous nos débats, nous constatons que les acteurs de l'environnement souhaitent que leurs initiatives et les actions soient valorisées. Ils ont besoin d'être encouragés. Il faut savoir conjuguer la part qui revient aux lois, souvent trop peu appliquées, et les dispositifs d'encouragement et de valorisation des efforts.

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Allain Bougrain Dubourg, corapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique »

Nous vous remercions sincèrement, mesdames et messieurs, pour votre attention. Nous avons beaucoup travaillé sur cette question et nous avions un sentiment de solitude car l'éducation à l'environnement et au développement durable a été longtemps considérée comme le parent pauvre. J'en veux pour preuve certaines de vos questions.

Je suis président d'une association de protection de la nature, la LPO (Ligue de protection des oiseaux) qui, avec 400 salariés et 46 000 membres, est la première association française dans le domaine de la biodiversité. Je peux en témoigner, les collectivités territoriales, les entreprises et les élus locaux nous demandent souvent comment sensibiliser et éduquer les populations.

Cette demande est positive, encore faut-il pouvoir y répondre. Le travail que nous avons conduit au CESE, même s'il a des manques ou des incohérences, est une sorte de boîte à outils destinée à être utilisée, notamment par les associations. Nous pouvons nous réjouir du fait que la Conférence environnementale ait consacré une table ronde à l'éducation à l'environnement et au développement durable, mais soyons réalistes : mettre une trentaine de personnes autour d'une table, même avec un ministre de l'éducation nationale à nos côtés, pour refaire le monde, cela ne suffit pas. Il faut travailler de façon pragmatique.

Nous sommes là pour donner des pistes et des orientations. Notre boîte à outils reste ouverte et c'est à vous, mesdames et messieurs les députés, de reprendre le flambeau.

En résumé, il faut établir un pont entre les demandes et les potentialités.

Les sorties nature et les classes découverte sont effectivement de plus en plus rares, pour des raisons légitimes comme l'inquiétude des parents, mais aussi pour d'autres raisons qui le sont moins – je pense à une circulaire, encore en vigueur, qui conseille aux enseignants de ne pas emmener leurs élèves dans la nature à cause du risque lié à la grippe aviaire. Comme s'ils allaient attraper cette maladie en observant les oiseaux à la jumelle ! Nos associations ont dû licencier des animateurs nature pour cette raison. Il faut assouplir ces réglementations. J'ai connu un retraité qui avait conduit des bus pendant toute sa vie professionnelle et voulait continuer à le faire pour emmener bénévolement des enfants dans la nature. Devant le nombre impressionnant de contraintes, il y a renoncé ! C'est dommage, car une vraie compétence existe au sein des associations de protection de la nature.

Je me réjouis de voir que beaucoup d'élus locaux s'emparent de la question de la biodiversité, en particulier les communautés de communes, en consacrant des moyens à la création de postes d'écogarde ou à l'organisation de séances d'initiation à l'environnement. Nous nous en réjouissons, mais il ne faudrait pas déposséder les associations de protection de la nature qui ont une vraie compétence en matière d'éducation à l'environnement et jouent un rôle important de lanceurs d'alerte.

Je ne m'attarderai pas sur la chasse, mais je dirai simplement que le président de la Fédération nationale des chasseurs, membre de la section environnement, a voté pour cet avis. Cela dit, la moindre des choses pour un chasseur qui prétend être le premier des écologistes, est de respecter le droit. Or je constate qu'au nord du Gers on continue à braconner l'ortolan, avec la complicité de tous, ce qui à mes yeux n'est pas de la chasse. Et je ne vois pas de chasseurs s'élever contre cette mesure. Je pourrais citer une multitude de situations de même nature.

Par ailleurs, j'ai vu, à l'occasion des voeux du mois de janvier, une photo montrant un garçon qui semblait avoir douze ans avec un fusil à la main, sa camarade ou petite soeur portant les cadavres d'oiseaux sur son épaule. C'est inacceptable ! Oui, nous pouvons travailler avec les chasseurs sur l'éducation à l'environnement, car nous avons des intérêts communs, mais pas n'importe comment. Je ne veux pas de l'éducation au braconnage, au piégeage, à la souffrance animale.

Je crois à la valeur de l'exemple. Des choses admirables sont réalisées par des scientifiques, des collectivités, des associations. Il faut les valoriser. En 2010, à l'occasion de l'année de la biodiversité, j'ai réalisé pour France Télévisions une petite série « Les héros de la biodiversité ». En 2015, nous réaliserons « Les héros du climat ». Pour résoudre les problèmes d'éducation et de sensibilisation, il faut certes alerter, mais également adresser un message optimiste montrant que c'est dans la joie que l'on construit plutôt que dans la contrainte. C'est d'ailleurs l'avis de Ségolène Royal qui souhaite « positiver l'environnement ».

Pendant la campagne pour les élections municipales, avec Anne Hidalgo, nous avons rencontré des enfants d'une dizaine d'années dans le but de comprendre leurs besoins. Nous avons été frappés par leur maturité et leur connaissance des problèmes qui nous préoccupent aujourd'hui.

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Antoine Dulin, co-rapporteur au nom de la section de l'environnement du Conseil économique, social et environnemental, de l'avis sur « l'éducation à l'environnement et au développement durable tout au long de la vie, pour la transition écologique »

Trop longtemps l'éducation à l'environnement et au développement durable a été le parent pauvre. Nous devons donc nous réjouir des avancées de la loi sur la refondation de l'école et nous rappeler que nous les devons à un amendement déposé à la dernière minute.

Même si elle est inscrite dans la loi, nous devons travailler pour que l'éducation à l'environnement existe vraiment et qu'elle trouve sa place dans les programmes scolaires. Il faut placer cette question au centre des discussions avant la présentation des propositions du Conseil supérieur des programmes.

Non, les informations relatives à l'éducation à l'environnement ne sont pas trop nombreuses, bien au contraire. Dans la mesure où il s'agit de questions complexes, on peut malheureusement regretter que les journalistes fassent plutôt le choix de ne pas en parler.

Pour ce qui est de cibler les publics, il est clair que nous ne pouvons pas aborder avec les enfants en bas âge les questions climatiques. Cela dit, nous avons pu observer dans des écoles maternelles et primaires que des enfants en difficulté avaient réussi à apprendre à compter en utilisant le cadre très concret d'un espace de biodiversité.

Nous proposons de refondre les examens – brevet et baccalauréat – dans le but d'utiliser l'adaptation au réchauffement climatique pour valider des compétences acquises en SVT, en SES ou en philosophie, ce qui permettait de développer l'esprit critique des élèves et leur capacité d'argumenter sur la base de données scientifiques plutôt que sur un apprentissage discipline par discipline. Nous avons été interrogés par le Conseil supérieur des programmes sur ce sujet et nous espérons que notre travail pourra être utilisé.

Il est important de ne pas cibler uniquement les enfants et les jeunes car ils sont déjà sensibilisés aux questions liées à l'environnement. Nés avec la contrainte écologique, ils en ont pleinement conscience. Cela dit, les adultes ne sont pas toujours exemplaires. En tant qu'éducateur qui travaille depuis de nombreuses années dans un mouvement de scoutisme, je peux témoigner de la déception des enfants en pareil cas.

Nous devons faire en sorte que l'éducation ne soit pas uniquement prescriptive. Certes, il est important de fermer le robinet lorsqu'on se lave les dents, mais cela ne suffit pas. Comment aller de l'éducation vers la transition écologique ? Comment penser le changement ? J'ai relevé à ce propos l'expression de « transition intellectuelle et culturelle ».

L'outil numérique permet de contribuer à la science participative et de référencer toutes les espèces qui peuplent notre jardin. C'est un outil au service de l'environnement et du développement durable, à condition qu'il soit bien utilisé, et un outil de diffusion des savoirs, notamment dans la recherche et l'enseignement supérieur avec les MOOC (Massive Open Online Courses). Il offre aux adultes, via le e-learning, la possibilité de se former aux questions environnementales et au développement durable.

S'agissant de la réglementation, il y a en effet beaucoup de travail à faire. Les accueils collectifs de mineurs et les mouvements de scoutisme, en emmenant les jeunes camper dans la nature, développent leur sensibilité au monde du vivant. Il est important de réduire nos réglementations et d'accepter le fait que le risque zéro n'existe pas. L'éducation à l'environnement et au développement durable, c'est aussi accepter de prendre des risques. C'est l'une des missions de notre système éducatif.

Quant à la charte que nous préconisons, il s'agit de faire en sorte que les chefs d'établissement disposent d'un outil leur permettant d'imposer aux intervenants dans le cadre scolaire – entreprises, acteurs associatifs – un certain nombre de principes pédagogiques et déontologiques.

Vous nous avez posé des questions très intéressantes qui nous permettent de témoigner que l'Assemblée nationale et le Sénat sont sensibles à la question de l'éducation à l'environnement et au développement durable, et qu'ils en ont fait un sujet prioritaire.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie pour la passion avec laquelle vous avez présenté votre rapport. L'éducation à l'environnement est un sujet important, sur lequel il nous reste une marge de progression.

La séance est levée à onze heures trente-cinq.