Intervention de Philip Cordery

Réunion du 13 mai 2014 à 16h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilip Cordery :

La politique en faveur de la jeunesse, au niveau européen, est assez récente ; elle participe de la volonté du Conseil européen de réorienter la politique européenne dans son ensemble, et de faire de l'emploi, notamment des jeunes, une priorité. Sachez également que le Gouvernement et la majorité actuels sont pleinement mobilisés pour que cette question reste à l'ordre du jour de l'Union et du prochain Parlement européen.

La Commission des affaires européennes s'est saisie pour observations de la proposition de loi relative aux stages ; je prépare aussi un rapport plus large sur la politique de l'emploi des jeunes, notamment sur la mise en oeuvre de la garantie jeunesse. Sur ce point, si les crédits alloués dans le cadre des politiques en faveur la jeunesse sont bien utilisés, la garantie elle-même fait souvent défaut, qu'il s'agisse de l'emploi, de la formation ou de l'apprentissage. Avez-vous des propositions pour assurer sa mise en oeuvre effective en France ? C'est là tout l'enjeu de nos discussions avec le Gouvernement. Priorité est donnée, en tout cas, aux jeunes décrocheurs. La Finlande a créé pour eux un guichet unique dont nous pourrions nous inspirer car ces jeunes, bien souvent, ne savent pas à quelle porte frapper ; de plus, la constitution de dossiers est si complexe qu'ils abandonnent très vite. Un meilleur accompagnement serait utile. Je serais heureux de recueillir vos avis à ce sujet.

Les fonds de l'Initiative européenne pour la jeunesse ( IEJ ) ont le mérite d'exister, mais ils ne suffisent pas ; aussi plaiderons-nous pour leur augmentation. Le Président de la République a d'ailleurs proposé qu'une partie du produit de la taxe sur les transactions financières soit affectée à l'IEJ, afin de la proroger ; reste qu'il faudra se pencher sur le bon usage de ces fonds : ils doivent être destinés, non à un saupoudrage, mais à des réformes structurelles.

La mobilité est l'autre grand chapitre de mon rapport. Quid du statut européen de l'apprenti, actuellement en discussion ? Les modèles diffèrent tellement d'un pays à l'autre que la mobilité n'est pas évidente dans toutes les filières.

Il est également essentiel que la mobilité soit choisie et non contrainte. J'ai été choqué de l'accord signé entre le Gouvernement espagnol et le Gouvernement allemand, aux termes duquel des milliers de jeunes apprentis espagnols partent en Allemagne, après avoir appris l'allemand dès le plus jeune âge dans les écoles andalouses. Une telle exportation de main d'oeuvre infantile constitue la limite du système : plutôt que de prendre sa main d'oeuvre à un pays, mieux vaudrait, par exemple, l'aider à la former.

J'en viens à la question des stages, qui pose à l'échelle européenne un problème de terminologie. En effet, la proposition de la Commission européenne ne concerne que les stages effectués en dehors du cursus universitaire, lesquels ne sont pas considérés comme des stages en France, et sont même interdits par notre législation. À cet égard, il n'existe pour l'instant aucune proposition européenne en faveur de l'encadrement des stages au sens où nous l'entendons.

En revanche, la commission des affaires européennes a défendu plusieurs amendements à la proposition de loi, en cours d'examen, tendant au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires. L'un d'entre eux prévoit que tout stage effectué par un jeune Français à l'étranger fasse l'objet d'une convention fondée sur la loi française. Il s'agit d'une mesure incitative, puisqu'on ne peut pas, évidemment, imposer aux entreprises étrangères l'application du droit du travail français. Un autre prévoit d'informer les jeunes qui partent à l'étranger sur le droit du travail applicable dans le pays d'accueil.

Je partage par ailleurs ce qui a été dit sur le rôle d'Erasmus dans la mobilité ainsi que sur la question des langues.

Il convient également de développer les échanges d'offres d'emploi au niveau européen grâce au réseau EURES. Cela pose le problème de la « portabilité » des aides sociales d'un pays à l'autre. Autant il existe un règlement pour cordonner au sein de l'Union l'application des régimes de sécurité sociale, autant rien n'est prévu en matière d'aide sociale. Par exemple, un Français partant à l'étranger perd ses droits à une bourse étudiante ou à l'aide au logement, et l'aide attribuée par Erasmus ne couvre pas le manque à gagner. Pour un grand nombre de jeunes, ce problème constitue un frein à la mobilité.

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