« Qu'attendons-nous de l'Europe ? », nous a-t-on demandé. Et juste après cette question, à ma grande surprise, l'un des intervenants s'est interrogé sur ce que les « adultes » pouvaient faire pour nous, les jeunes. Nous nous sentons pourtant adultes, et nous sommes en tout cas majeurs. Il est amusant de voir ainsi révélée involontairement cette tendance à considérer les jeunes comme, sinon des enfants, du moins des personnes pas tout à fait adultes. C'est peut-être cela, la première chose que nous attendons : une reconnaissance sociale de notre autonomie, qui implique une intégration pleine et entière à la vie politique. Élise Drouet l'a rappelé : les moins de 30 ans voudraient pouvoir se présenter aux élections européennes, ou bénéficier au même titre que n'importe quel adulte des mesures sociales ou politiques, en matière d'emploi, notamment.
De ce point de vue, les politiques en Europe diffèrent fortement d'un État à l'autre. Au Danemark, par exemple, les jeunes peuvent bénéficier d'une aide leur permettant de vivre de façon autonome, tandis qu'en France, il est plus difficile d'accéder à un système d'aide ou de solidarité quand on fait ses études.
Si on veut que les jeunes s'intéressent à la politique, nationale ou européenne, il faut donc les considérer comme des adultes autonomes et leur permettre d'accéder aux mêmes droits que tout le monde.
Cela m'amène à la question du « SMIC jeune », sur laquelle l'UNEF a d'ailleurs déjà réagi. Nous ne jugeons pas cette proposition acceptable : en quoi le fait d'être jeune pourrait-il justifier d'être moins bien payé pour le même travail ? Il en est de même pour la protection sociale, puisque les moins de 25 ans n'ont pas droit au RSA : que change, pour un chômeur, le fait d'avoir 24 ou 26 ans ? Il faut réfléchir à une véritable intégration des jeunes dans les dispositifs sociaux publics.
Je suis préoccupée par la défiance manifestée par la jeunesse à l'égard des institutions. De fait, pour un certain nombre de jeunes, l'Europe équivaut à moins de services publics, moins de protection sociale, moins d'investissement dans l'avenir, parce que la vie et dure, que c'est la crise, qu'il faut réaliser des économies afin de maintenir le déficit dans la limite des 3 %… Or, pour que les jeunes se rallient à la cause européenne, il faut qu'ils comprennent les termes du contrat, et connaissent, certes, leurs devoirs, mais aussi leurs droits. C'est très important.
En ce qui concerne la Garantie jeunesse, il est évidemment nécessaire de renforcer le dispositif et son budget, et d'en étendre le périmètre, de façon à s'adresser au plus grand nombre de jeunes possible. L'objectif serait qu'elle devienne un droit. Mais, même si l'on reste dans le cadre d'un dispositif contingenté, il faut arrêter de classer les personnes dans des cases : jeunes sans qualification, issus de milieux populaires, ayant suivi des études, etc. La jeunesse est, certes, hétérogène, mais doit tout de même faire l'objet d'une politique globale, prenant en compte l'ensemble des publics et permettant de répondre à toutes les aspirations.
Je finirai par une remarque inspirée des manifestations auxquelles nous avons assisté au cours des dernières années, contre l'augmentation des frais d'inscription à l'université ou la réduction du montant des bourses. Nous avons besoin de garantir un accès de tous à l'éducation, et de faire de celle-ci un droit. Or l'Europe peut y contribuer. En procédant étape par étape, on pourrait parvenir à garantir à tout jeune Européen, quelle que soit son origine sociale ou le pays où il vit, l'accès à une formation sanctionnée par un diplôme, afin que son insertion professionnelle se fasse dans les meilleures conditions possibles. Il s'agit d'un énorme chantier, difficile à entreprendre, mais passionnant.