Au-delà de la maintenance courante de l'outil industriel, qui représente 50 millions par réacteur et par an, le grand carénage est une opération de modernisation, de rénovation et d'amélioration de la sécurité, dont la terminologie rappelle celle de la navigation. Le coût de cette restructuration, qui permettra de prolonger la durée potentielle des réacteurs, a été estimé à 55 milliards.
Pour préciser notre méthode de calcul, plutôt que vous noyer sous les données, je préfère évoquer les grandes phases des opérations. Tous ces travaux vont être sous-traités par des filières industrielles – françaises, je l'espère, en tout cas prioritairement européennes – et si je m'aventurais à préciser les montants ligne à ligne, les appels d'offres risqueraient de prendre une curieuse allure. Je suis prêt à livrer à l'un ou l'autre d'entre vous le chiffrage précis dont nous disposons, mais l'officialiser ferait exploser tous les prix de revient : il suffit d'indiquer le montant que l'on est prêt à consacrer au remplacement d'un moteur pour qu'aucun garagiste ne veuille plus le faire à moins ! Telle est la raison de notre prudence en matière de chiffres. Sachez cependant que le montant de 55 milliards a été validé en interne. D'ailleurs, je rends des comptes à mes actionnaires, qui doivent, via le conseil d'administration, disposer de toutes les informations nécessaires.
Les travaux prévus renforceront la sûreté et amélioreront l'efficacité industrielle. Nous espérons, grâce à un investissement considérable, faire profiter nos clients d'un passage de quarante à soixante ans de la durée de vie des réacteurs. C'est toutefois sur une durée moyenne de cinquante ans que nous amortissons le coût économique complet des MWh électronucléaires produits par le parc français, ce qui aboutit, au terme d'un calcul qui nous semble prudent, au prix de 55 euros par MWh.
Pendant les travaux du grand carénage, la durée d'indisponibilité des réacteurs ne dépassera pas celle que nous connaissons actuellement, puisque les travaux seront réalisés dans le cadre de la maintenance du parc. Nous avons à coeur d'améliorer le coefficient d'indisponibilité qui a été anormalement élevé pendant l'année 2013, où il a fallu effectuer neuf arrêts de tranche et des travaux de maintenance lourde. Nous avons mis toutes nos équipes à contribution pour retrouver dès 2014 les objectifs que nous espérions atteindre en 2013.
En tant qu'opérateur d'un service public de l'électricité responsable, EDF fait réaliser les travaux de grande maintenance durant l'été, où les centrales sont moins sollicitées. De ce fait, pendant l'hiver 2013, le coefficient de disponibilité de notre parc a été l'un des meilleurs jamais atteint.
Je vous remercie, monsieur Sordi, d'avoir souligné l'excellente qualité de la centrale de Fessenheim, qui a été totalement modernisée. Ces dernières années, EDF a embauché massivement dans le nucléaire, pour conserver des compétences qu'aurait fragilisées un programme important de départs à la retraite : lors de mon arrivée en 2009, 40 % du personnel devaient quitter l'entreprise avant quatre ans. L'important programme d'embauche, qui va se poursuivre en 2014, puis en 2015, concerne essentiellement le nucléaire, où il faut cinq ans pour former un opérateur. Nous investissons massivement dans les ressources humaines, pour que les équipes puissent continuer à gérer le parc existant et à développer la présence d'EDF dans le monde.
Le grand carénage mobilisera quelque 110 000 emplois situés, pour l'essentiel, dans la filière industrielle, mais à l'extérieur d'EDF.