Monsieur le président, monsieur le ministre, madame et monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, à la demande du groupe UDI, de la commission des affaires étrangères et de la commission des finances, le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques a inscrit à son programme de travail, le 31 octobre 2013, une évaluation de la politique d’accueil des demandeurs d’asile. Le rapport d’information, objet du débat de ce jour, présenté par nos collègues Arnaud Richard et Jeanine Dubié, est le fruit de ce travail d’évaluation. L’objectif était de fournir à notre assemblée une évaluation et des propositions en vue de la discussion d’un projet de loi réformant le droit d’asile – projet de loi dont, rappelons-le, le précédent gouvernement avait annoncé l’examen en avril dernier. Nous espérons que ce texte sera remis à l’ordre du jour très prochainement, à l’automne, semblerait-il.
La discussion d’aujourd’hui, proposée par le groupe RRDP, est l’occasion de débattre, sur la base de ce rapport d’information, d’un aspect essentiel de notre politique d’accueil et d’intégration : le droit d’asile, inscrit dans notre tradition républicaine, garanti par le préambule de la constitution de 1946 et qui confère aux autorités le droit de « donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté » ou pour tout autre motif. En premier lieu, je tiens à saluer l’excellent travail de nos collègues et rapporteurs de cette évaluation, Arnaud Richard et Jeanine Dubié, qui ont su, dans l’esprit républicain que requiert ce type de débat, décrire les dysfonctionnements de notre système et formuler, dans ce rapport, des propositions constructives. Je crois que tous ici, nous partageons le constat préoccupant de la situation de l’asile dressé par le rapport.
Ce constat, c’est celui d’un système en crise, fragilisé par une demande en forte croissance. Ce constat, c’est celui d’un système paralysé par des procédures qui échappent le plus souvent au contrôle des pouvoirs publics, un système ralenti par des délais de traitement de plus en plus longs. Ce constat, c’est aussi celui d’un système à bout de souffle dont les failles et les limites ont été crûment révélées, en novembre dernier, par l’affaire Leonarda. Cette affaire a surtout démontré combien il était vital de simplifier les procédures afin d’accélérer le traitement des dossiers avant qu’ils ne s’enlisent. Comment se manifeste cette crise de notre politique d’accueil des demandeurs d’asile ? Avant tout par l’augmentation considérable de la demande d’asile adressée à la France depuis 2007. Elle n’est certes pas le seul pays à subir cette augmentation. Avec 435 000 demandes d’asile déposées l’an dernier dans les vingt-huit pays de l’Union européenne, le nombre de demandeurs a augmenté de 30 % entre 2012 et 2013. La France se distingue néanmoins dans le paysage européen par une forte demande d’asile : plus de 66 000 pour la seule année 2013, ce qui la place au second rang de l’Union européenne derrière l’Allemagne.
Ensuite, cette crise se manifeste par de nombreux dysfonctionnements de la procédure, tant en termes de délais que de coûts, mais aussi par les suites insatisfaisantes données à l’issue de la procédure, que la décision soit positive ou négative. Le rapport met également en cause le recours trop fréquent aux solutions d’hébergement d’urgence et la gestion défaillante de l’allocation temporaire d’attente qui auraient fragilisé le pilotage budgétaire de notre politique publique. Afin de mettre en oeuvre une vraie réforme d’ensemble de la politique d’accueil des demandeurs d’asile, alliant respect des droits et performance de l’action publique, nos collègues Jeanine Dubié et Arnaud Richard ont exposé une vingtaine de propositions. Nous espérons que ces recommandations sauront utilement inspirer les futurs projets de loi relatifs à l’asile et à l’immigration. Le groupe UDI partage les objectifs de ce rapport pour mener une vraie réforme de notre politique d’accueil.
Il s’agit tout d’abord de simplifier et d’harmoniser l’accueil sur l’ensemble du territoire. Il est évident que la multiplicité d’interlocuteurs et de lieux a rendu les procédures complexes. D’une région à l’autre, l’étape de l’entrée dans la procédure n’est pas harmonisée. Il est donc nécessaire de rendre plus lisible et plus fluide cette procédure, afin de diminuer les délais. À ce titre, nous ne pouvons que saluer les différentes mesures proposées dans le rapport : l’instauration d’un lieu unique d’accueil des demandeurs d’asile, la suppression de l’exigence de domiciliation préalable ou encore l’accélération et à la modernisation du traitement des dossiers par les préfectures. Ce sont là des mesures pragmatiques qui devraient apporter une réelle simplification à des procédures souvent trop complexes.
Autre objectif : proposer aux demandeurs d’asile un hébergement et un accompagnement adaptés. Aujourd’hui, le dispositif national d’accueil connaît une saturation liée à l’augmentation de la demande. Des inégalités de traitement entre les demandeurs se sont également installées. Là encore, le rapport fait des propositions utiles : il s’agit notamment de faire des CADA le dispositif central de l’hébergement des demandeurs d’asile ou de mettre au point un outil intégré de suivi de la situation des demandeurs. Il est également nécessaire de travailler à l’amélioration de l’insertion des personnes protégées et de se préoccuper davantage de la situation des déboutés, notamment par une politique d’accompagnement au retour. En outre, nous souscrivons à l’urgence soulignée par le rapport de dynamiser les procédures pour offrir de meilleures conditions d’accueil. Il est bien évident que l’amélioration de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile ne pourra se faire sans une refonte des procédures qui garantira un traitement plus rapide et plus abouti des dossiers.
Enfin, pour les députés du groupe UDI, profondément européens, une vraie réforme de l’asile devra inévitablement s’accompagner, à terme, d’une harmonisation européenne et aller vers la création d’une véritable politique d’asile commune. Depuis 1999, l’Union européenne souhaite développer une telle politique, en mettant notamment en place un régime d’asile européen commun. Depuis le 1er janvier 2014, le règlement Dublin III pose le principe d’un mécanisme d’alerte, de préparation et de gestion de la crise subie par un État membre confronté à un afflux de demandeurs et impose des délais de procédure restreints. Néanmoins, malgré une volonté d’uniformisation européenne, la décision prise par l’organe de protection de chaque pays n’est toujours pas sujette à une telle harmonisation. Nous pouvons donc aller encore plus loin, vers une uniformisation européenne de l’encadrement juridique, une harmonisation de nos législations et une mutualisation de nos moyens pour faire face au mieux à la problématique de l’asile.
Ainsi, mes chers collègues, nous plaidons pour une réforme d’ensemble de la politique d’accueil des demandeurs d’asile, dans le sens d’une harmonisation européenne qui permette de pallier les problèmes que rencontre aujourd’hui ce système. Nous espérons, monsieur le ministre, que la future réforme saura prendre en compte les propositions présentées par ce rapport.