Intervention de Nicolas Dhuicq

Séance en hémicycle du 4 juin 2014 à 15h00
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dhuicq :

Comment voulez-vous que ces jeunes ne trouvent pas une fraternité d’armes, une collectivité qui les accueille et qui leur permette de justifier leurs actes hors la loi, dans les systèmes intégristes qui font florès dans nos prisons ?

Il aurait mieux valu que vous fassiez en sorte que le règlement pénitentiaire, et tout le règlement pénitentiaire, soit appliqué dans les centrales de France. Il est inadmissible que, dans une nouvelle centrale, un tiers du mobilier ait été détruit par les prisonniers, sans que ceux-ci soient punis ! Il est inadmissible que l’officier qui m’a fait visiter les lieux ait reçu l’ordre de changer la porte qui vient d’être cassée par un prisonnier sans que celui-ci soit puni !

Comment voulez-vous que l’autorité soit respectée, dans ces lieux mêmes qui sont censés recevoir des personnes qui la nient ? Pire que la nier : ils ne la reconnaissent pas.

Madame la garde des sceaux, votre projet de loi signifie donc la faillite totale d’un système qui est parvenu à son terme. Votre projet de loi rejoint finalement les raisonnements des libéraux radicaux. Vous avez employé dans votre discours introductif, les termes de « déviant » et de « déviance », suggérant par là-même que, quelle que soit la population considérée, il y a inéluctablement un pourcentage défini de personnes qui vivent aux marges de la société, c’est-à-dire qui vivent du crime, du meurtre, du viol. Le raisonnement reviendrait donc à dire, si nous allions à la racine des choses puisque vous citiez Derrida, que pour l’État, la dépense que représente un système judiciaire et carcéral est superfétatoire : il suffirait de considérer qu’il y a inéluctablement un certain pourcentage de délinquance et que la seule réparation auprès des victimes serait suffisante.

Votre projet de loi rejoint donc – les extrêmes se rejoignant – ces discours ultra-minoritaires venus d’outre-Atlantique, qui consistent à nier la fonction première de la justice : gérer la violence inhérente à l’être humain et faire en sorte que nous puissions écarter de la société, temporairement ou parfois définitivement – comme le voulait le projet de loi de Mme Dati qui concernait une vingtaine de personnes par an – de grands pervers qui ne sont pas accessibles à la culpabilité, donc à la rédemption, et ce, quelle que soit notre foi en l’humain.

Madame la garde des sceaux, nous vous demanderons donc de revenir sur ce projet de loi.

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