Faut-il rappeler que 75 % des Français sont opposés à cette réforme ?Votre Gouvernement est d’ailleurs à l’image de la France, puisque les trois quarts de ses membres sont également opposés à ce texte. S’il y a une commission du consensus, le consensus n’a visiblement pas gagné ses rangs !
Je ferai juste trois remarques. Premièrement, le système pénal actuel est quasiment incontrôlable, en l’absence de réponse pénale claire. Faute d’assumer une réflexion sur la construction de nouvelles prisons, notre système provoque l’inflation de la délinquance. Pourquoi ? Parce qu’un délinquant sur deux ne purge pas sa peine. La France est en réalité devenue une vaste prison à ciel ouvert.
Nous avons une dichotomie totale. D’un côté, le code pénal agite le spectre de sanctions extrêmement fortes : trois ans de prison, des dizaines de milliers d’euros d’amende. De l’autre côté, la réalité est qu’on s’en tire avec une simple réprimande, parce qu’il n’y a pas de place ou que les juges ne vont pas jusqu’au bout pour des raisons pratiques. La justice en France, c’est donc : grand genre, petits moyens.
Comme on ne règle pas le problème de la délinquance, il y a un potentiel de gens, toujours les mêmes, qui se recyclent dans le crime et les délits. Les forces de police les arrêtent régulièrement, mais il y a une courbe d’apprentissage dans le crime : la première fois, on se fait arrêter parce qu’on n’est pas très malin ; la deuxième fois, après avoir été relâché dans la nature, on prend un peu plus de précautions : on découvre la technique des empreintes digitales, on utilise une voiture volée ; et puis, au fur et à mesure, ces délinquants deviennent des délinquants professionnels, parce qu’ils connaissent mieux les méthodes de la police que nous-mêmes.
Nous sommes donc dans un système incontrôlable, qui éduque les délinquants et déprime les forces de l’ordre, c’est-à-dire l’inverse de ce qu’il faudrait faire.
Notre système pénal est donc mou dans ce qu’il a de dur et dur dans ce qu’il a de mou, pour faire allusion à Bainville. Et ce texte, c’est ma deuxième remarque, vient amollir ce qu’il restait de dur.