Intervention de Didier Quentin

Séance en hémicycle du 6 novembre 2012 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Quentin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, dans un contexte budgétaire très contraint, ce budget est en hausse de 3,7 % en crédits de paiement par rapport à 2012, ce qui en fait un budget préservé : nous vous en donnons acte. Je crois simplement nécessaire pour la clarté de nos échanges d'indiquer que le périmètre de la mission a été modifié par l'affectation sur le programme 138 « Emploi outre-mer » d'une enveloppe de près de 3 millions d'euros provenant du ministère de l'intérieur.

Cela étant, je reconnais aussi que les dépenses fiscales outre-mer échappent, pour l'instant, au plafonnement global des niches fiscales, fixé à 10 000 euros par foyer en métropole. Elles continueront donc à bénéficier d'un plafonnement global de 18 000 euros avec une assiette de 4 % élargie, en plus des revenus du travail, à ceux du capital, pour répondre aux difficultés de l'investissement outre-mer.

Néanmoins, nous nous interrogeons sur la pérennité de telles mesures au-delà de 2013. Le Gouvernement aura-t-il les moyens de maintenir ces dépenses, notamment pour ce qu'il est convenu d'appeler le dispositif Girardin, durant la totalité du quinquennat, comme s'y était engagé monsieur Hollande dans les trente engagements pris en faveur des outre-mer ?

Nous sommes d'autant plus perplexes que le ministre du budget, M. Jérôme Cahuzac, ancien rapporteur spécial de ce budget de l'outre-mer, a déclaré en septembre dernier – je le cite – : « Nous avons entamé une réflexion sur l'efficacité de ces incitations. Nous déciderons ensuite s'il est pertinent ou non de les garder. »

Je rappelle que les avantages fiscaux liés à l'outre-mer devraient s'élever pour 2012 à 470 millions d'euros au titre des investissements productifs, ainsi qu'à 315 millions d'euros pour les investissements locatifs et à 80 millions d'euros pour le logement social.

Le programme « Emploi outre-mer » de ce budget confirme les crédits propres au dispositif d'exonération des cotisations patronales qui est plus favorable que celui applicable en métropole, mais il remet en cause l'aide au fret créée par l'article 24 de la loi de développement économique des outre-mer, la LODEOM. En effet, ce projet de loi de finances prévoit une dotation de 9 millions d'euros pour les aides aux entreprises, comprenant à la fois l'aide au fret et l'aide à la rénovation hôtelière. Cette dotation est bien inférieure à celle de 2012 qui était de 17 millions d'euros ! Il y a là une certaine incohérence, alors que nous venons d'examiner le projet de loi sur la régulation économique outre-mer pour lutter contre la vie chère et la « profitation ».

En tout état de cause, notre débat pourrait être l'occasion, comme l'a proposé l'excellent rapporteur spécial de cette mission, M. Patrick Ollier, de réfléchir à l'élargissement de l'aide au fret à l'ensemble des importations et exportations, et non pas uniquement à celles en provenance ou en direction de l'Union européenne. Dès lors qu'elle est limitée aux échanges entre l'outre-mer et l'Union européenne, l'aide au fret ne favorise pas l'intégration des collectivités ultramarines dans leur environnement économique régional, alors que c'est l'une des clés de leur développement.

En outre, l'action « Insertion économique et coopération régionale » n'est dotée que de 1,9 million d'euros. En valeur absolue, cette dotation, au regard du nombre de territoires concernés, ne saurait permettre aux collectivités ultramarines de participer au dynamisme des zones auxquelles elles appartiennent, où se situent nombre de pays émergents. Si l'on veut à l'avenir donner toute sa portée à cette action, il faudra sensiblement augmenter sa dotation.

Par ailleurs, lors de la campagne présidentielle, M. François Hollande s'était engagé à doubler le nombre de bénéficiaires du Service militaire adapté, le faisant passer de 3000 à 6000. Il reprenait ainsi une orientation forte du président Sarkozy, qui avait commencé d'être appliquée par le gouvernement de François Fillon.

Or ce doublement des bénéficiaires du SMA est manifestement repoussé à 2016. À moins que vous envisagiez de doubler le nombre de bénéficiaires à moyens constants ? Nous vous serions donc reconnaissants, monsieur le ministre, de nous apporter des précisions à ce sujet, comme l'a déjà demandé Patrick Ollier.

En outre, le « passeport mobilité formation professionnelle » constitue le dispositif central d'aide aux personnes bénéficiant d'une mesure de formation qualifiante pouvant aller jusqu'à 24 mois, hors de leur département ou de leur collectivité d'origine, dès lors que cette formation n'est pas dispensée sur place. Mais la subvention à cette fin s'élèvera à seulement 8,5 millions d'euros en 2013, contre 9,1 millions d'euros en 2012. Il s'agit d'une baisse significative pour l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité ou LADOM, qui est chargée d'accompagner les jeunes ultramarins vers l'insertion professionnelle. À moins que vous n'ayez en tête une suppression pure et simple de ce dispositif au bénéfice des régions ? Il m'a en effet été rapporté que la région Guadeloupe, dont vous étiez président, monsieur le ministre, n'avait pas spécialement aidé – c'est une litote – le précédent gouvernement à mettre en place cette aide au bénéfice de la continuité territoriale, sur la base de critères sociaux plus justes et équitables.

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