Intervention de Nicolas Dhuicq

Séance en hémicycle du 4 juin 2014 à 21h30
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Après l'article 3

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dhuicq :

Ensuite, si je partage sur la forme l’argumentaire intelligent de M. le rapporteur, je n’en partage pas le fond.

Sur la forme, supprimer ce qui a été fait sous la précédente législature pour répondre à l’évolution réelle de la vie des adolescents d’aujourd’hui est sans doute logique pour une grande partie de la majorité, mais on peut s’interroger sur les conséquences d’une telle mesure si elle était adoptée aujourd’hui.

Cela étant, ces tribunaux ont bien une spécificité puisqu’ils concernent des adolescents âgés de seize à dix-huit ans, qui comparaissent devant des magistrats spécialisés. Mais surtout, ils ouvrent la nécessité d’un débat sur l’ordonnance de 1945, qui est aujourd’hui totalement dépassée. Ce n’est pas seulement, monsieur le rapporteur, qu’elle soit inapplicable, mais j’entends souvent parler d’enfants. On peut, certes, rappeler qu’à seize ans, on portait la toge à Rome. Aujourd’hui, en cas de délit, nous sommes face à des individus qui, à seize ou à dix-huit ans, ne sont plus des enfants, mais quasiment de jeunes adultes ; des individus dont la morphologie a, elle aussi, évolué ; des individus qui profitent, pour beaucoup d’entre eux, du statut de mineur pour, à quelques mois du passage à la majorité, commettre eux-mêmes – ou sous l’emprise des adultes – des méfaits.

Dans ma circonscription, un village d’un peu moins de 300 habitants est littéralement terrorisé par un individu de quatorze ans et demi qui a déjà échappé à deux centres dits « fermés ». Après une cinquantaine de condamnations, la seule possibilité offerte au magistrat était de prononcer une peine d’incarcération d’un mois.

Je suis prêt à ce que nous ayons un vrai débat, un débat construit, sur l’ordonnance de 1945, qui tienne compte de ce que nous avons tenté d’apporter comme réponse, à savoir qu’entre seize et dix-huit ans, aujourd’hui, nous ne sommes plus face à des enfants ni même à des adolescents : nous sommes face à de jeunes adultes qui vont fonctionner exactement de la même manière, qu’ils aient un peu moins de de dix-huit ans ou dix-huit ans révolus.

Il est très intéressant, mesdames et messieurs de la majorité, que vous ayez ce débat interne. Oui, monsieur le rapporteur, je pense qu’il est déraisonnable d’adopter, à cette heure de la nuit, ce type d’amendement. Non, sur le fond, nous ne sommes pas d’accord avec vous.

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