Absolument ! Si des juges décident de ne plus appliquer la loi, nous ne sommes plus dans une démocratie. Je suis entièrement de votre avis. C’est le législateur qui établit les normes et une fois que celles-ci sont adoptées, après un débat contradictoire où chacun fait valoir ses arguments, elles s’appliquent et le juge doit se référer à la loi.
Le problème principal, concernant cette ordonnance de protection, résidait dans une connaissance inégale, sur l’ensemble du territoire, de ce qu’elle était vraiment et des situations dans lesquelles elle pouvait être prononcée. Nous avons voulu corriger cette inégalité entre des ressorts où l’ordonnance de protection était bien prononcée et où elle était un instrument servant à protéger les femmes et les familles et des ressorts où il en était peu fait usage.
Nous avons corrigé cette situation grâce à plusieurs moyens. D’abord, nous avons allongé la prorogation en la faisant passer de quatre mois à six mois, et nous avons permis qu’elle soit prononcée deux fois. Ensuite, nous avons fait en sorte, par circulaire, que l’ensemble des ressorts aient connaissance de ce qu’est l’ordonnance de protection. L’École nationale de la magistrature a également, à ma demande, conçu des modules de formation initiale sur ces instruments de protection des femmes contre les violences. En juin 2013, nous avons ouvert le cycle de formation aux magistrats, aux policiers, aux gendarmes et aux avocats. Nous avons en outre introduit dans la loi des dispositions relatives à l’expulsion du conjoint hors du logement commun. Vous êtes certainement sensible, monsieur Geoffroy, au fait que nous avons aussi ajouté des obligations de stage chez le conjoint, parce que les histoires amoureuses et familiales sont compliquées.
Nous connaissons des cas, y compris dramatiques, de séparation difficile où la femme porte plainte et, sans qu’il y ait forcément eu des pressions, revienne sur sa plainte ; elle peut être dans une attitude d’hésitation, tout simplement parce que c’est la réalité des sentiments humains. Par conséquent, nous introduisons la sanction pour l’auteur des violences, mais aussi des dispositions permettant qu’il soit contraint de suivre des stages contre les violences faites aux femmes. Vous savez que j’ai lancé en janvier 2014 un marché public pour la généralisation, sur l’ensemble du territoire, de l’opération « Téléphone, femmes en grand danger », et ce sera mis en place dès le mois de juillet de cette année. Je voulais absolument revenir là-dessus, d’abord parce que c’est un sujet très sérieux et très douloureux, ensuite parce que je sais que vous y avez beaucoup travaillé et que vous le connaissez vraiment très bien, monsieur Guy Geoffroy, et que vous ne pouvez pas prétendre que la suppression des peines plancher est de nature à punir moins sévèrement les récidivistes de violences commises contre les femmes.